Réforme retraites 2023

Alternatives économiques - Retraites : marre des mensonges présidentiels !

Mars 2023, par Info santé sécu social

CHRISTIAN CHAVAGNEUX
LE 20/03/2023

Rien, absolument rien, ne justifie l’acharnement politique du président de la République à faire adopter, quoi qu’il en coûte au pays, sa réforme des retraites dont personne ne veut, ni la population, ni les syndicats, ni même les députés.

L’agacement face à cet entêtement autocratique est d’autant plus de mise lorsque Emmanuel Macron enchaîne les mensonges financiers pour justifier sa réforme.

Dernier en date, l’argument invoqué pour recourir au 49.3 : « je considère qu’en l’état, les risques financiers, économiques, sont trop grands ». Comme si la France n’allait plus pouvoir se financer si la réforme n’était pas adoptée !

Nous allons emprunter comme jamais cette année sur les marchés : 270 milliards d’euros. Le financement se passe très bien depuis janvier et le spread franco-allemand, le petit surplus de taux d’intérêt que nous devons payer par rapport à l’Allemagne, est légèrement au-dessus de 50 points de base (un demi-pourcent) et stable depuis de longs mois : les créanciers internationaux se moquent de la réforme des retraites tant que la France rembourse sa dette comme elle le fait depuis des siècles.

A l’inverse, c’est la tension sociale provoquée par le Président qui pourrait pousser nos créanciers à s’inquiéter. En matière de financement de la dette publique française, le chef de l’Etat est aujourd’hui le problème, pas la solution.

Et s’il est vraiment inquiet sur notre capacité à payer les intérêts pourquoi a-t-il dépensé 60 milliards de baisses d’impôts lors de son premier quinquennat, suivies d’une nouvelle baisse des impôts de production ? Il est temps que le gouvernement arrête de penser qu’à chaque problème, la solution est une baisse d’impôt : stop au quoi qu’il en perde fiscal !

Alors, ce sont peut-être nos engagements européens qui nous obligent à faire la réforme pour maîtriser notre dette ? Dès que l’on regarde le sujet d’un peu près, il est clair que la réponse est là aussi négative. Il faut déjà se rendre compte que les recommandations extérieures, qu’elles viennent de la Commission européenne, de l’OCDE, du Fonds monétaire international, sont toujours négociées entre les institutions et les hauts fonctionnaires français : telle ou telle « recommandation » n’est le plus souvent que le résultat de la demande des dirigeants français pour pousser leur agenda politique par l’extérieur.

En l’occurrence, personne n’a demandé à la France de faire une réforme des retraites. Le rigorisme budgétaire de ces institutions les conduit à préférer moins de déficits et moins de dette publique et leur crainte des impôts à plutôt opter pour la diminution des dépenses. Mais chaque pays peut faire ce qu’il veut – sauf en période de crise – tant que la dette reste soutenable et la dette française l’est, sans ambiguïté.

Il est encore plus simple de faire fi d’un dernier argument financier éventuellement mis en avant, à savoir les caractéristiques de notre système de retraite qui nous obligeraient à travailler plus. La liste est longue des ressources possibles à mobiliser : revenir sur les exonérations de cotisations salariales qui ne créent pas d’emplois, soumettre l’épargne salariale à des cotisations retraite, etc., et, bien sûr, accroître le taux d’emploi des jeunes et des seniors. Se réunir pour augmenter le taux d’emploi de ces catégories de population aurait dû être la première étape de toute réflexion sur l’avenir de notre système par répartition.

Sans oublier de ne pas se priver d’augmenter les cotisations, non seulement pour combler les déficits mais aussi pour accroître les futures pensions dont la chute relative par rapport aux revenus salariaux explique en bonne partie pourquoi les futurs déficits du régime restent limités.

Notre système de retraite a bien un problème financier : il a besoin de plus de dépenses et de plus de recettes.