La Sécurité sociale

Annuaire Sécu - Jacques Toubon tire un bilan mitigé de la mise en oeuvre de ses recommandations de septembre 2017 sur les abus de la lutte contre la fraude aux prestations sociales

Avril 2019, par Info santé sécu social

28/03/19

Un an et demi après la publication de son rapport « Lutte contre la fraude aux prestations sociales : à quel prix pour les droits des usagers ? » dans lequel il avait identifié et évalué les effets des dispositifs de lutte contre la fraude aux prestations sociales sur les droits des usagers des services publics, le Défenseur des droits rend public un bilan intitulé "Le droit à l’erreur, et après ?".

Ce bilan révèle des avancées significatives, comme l’instauration d’un droit à l’erreur pour les demandeurs et bénéficiaires de prestations sociales dans le cadre de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance. Cette modification, également proposée par le Défenseur des droits dans ses avis, permet de distinguer l’erreur de la fraude et conduit les organismes sociaux à exclure les pénalités financières en cas d’erreur ou d’oubli non intentionnel de la part de l’usager, et à les réserver aux seuls cas avérés de fraude.

Le Défenseur des droits constate cependant que le changement sur le terrain se fait attendre. Ainsi, plus de six mois après l’adoption de cette loi, que la direction de la Sécurité sociale n’a pas élaboré les instructions nécessaires au déploiement de ce dispositif. Il note par ailleurs que sa recommandation concernant la nécessité de diffuser des instructions détaillées relatives à la notion de concubinage n’a été suivie que par la CNAF, alors qu’une instruction ministérielle reste nécessaire à l’harmonisation des pratiques des organismes en la matière.

Les agents des départements continuent à contrôler en direct les bénéficiaires du RSA, alors que cette attribution relève des seules caisses de protection sociale, déplore-t-il. Le ministère des Solidarités fait la sourde oreille, ce qui risque, selon lui, "d’alimenter les dérives potentielles des collectivités dans le contrôle du RSA". De même, le fichage des fraudeurs se poursuit sans que les droits des usagers soient respectés : pas de bilan des trois premières années du fichier, pas de communication aux usagers en cas d’inscription. La CNAV est montrée du doigt alors que la CNAF a fait des efforts.

Jacques Toubon déplore enfin que le traitement des bénéficiaires convaincus de fraude reflète toujours "la primauté des impératifs budgétaires sur le respect du principe de dignité de la personne humaine". Le Défenseur des droits rappelle, une nouvelle fois, que les bénéficiaires de prestations sociales, y compris ceux considérés comme fraudeurs, doivent conserver certains droits dont celui de vivre dans la dignité. Pour cela, les organismes doivent respecter le droit à un « reste à vivre ». Le Défenseur prône ainsi le respect du plan de remboursement personnalisé opposable aux CAF, même en cas d’indus frauduleux, et la mise en œuvre d’un délai maximal de suspension des versements de prestations durant l’enquête visant à établir une fraude.