Le chômage

Blog de Médiapart - Macron au secours des chômeurs, ou de MEDEF ?

Mars 2016, par Info santé sécu social

Par etienne.adam@anpag.org
Blog : Le blog de etienne.adam@anpag.org

Notre jeune et brillant ministre a donné une interview aux Échos où il se targue de définir un nouveau projet de gauche en prenant la défense des chômeurs. Il est utile de lui prêter attention mais aussi de lui répondre

Une nouvelle social- démocratie ? Un réformisme au service des plus fragiles ?

Selon une tradition longuement établie chez les sociaux-libéraux, l’instrumentalisation du chômage de masse est un outil idéologique pour justifier la remise en cause des garanties des salarié-e-s. Rappelons par exemple que ce fut le cas pour développer les emplois dits « atypiques » de la création des TUC (créés en 1984 stages effectués à mi-temps pendant un maximum de six mois dans des collectivités publiques, des hôpitaux ou des établissements publics,par des jeunes en recherche d’emploi et indemnisés un peu en dessous de la moitié du Smic.)à la facilitation par M Aubry des temps partiels avec des exonérations de cotisations.
Ces formes d’emplois ont alimenté l’idée que le CDI comportait trop de contraintes pour celles et ceux qui avaient des difficultés ( bizarrement, pour beaucoup la jeunesse est devenue un handicap qui rend l’accès au travail quasiment impossible sans passer par des dispositifs spécifiques...). Des gens de gauche, des syndicalistes osaient alors dire « mieux vaut un p’tit job que rien, ça met le pied à l’étrier » sans analyser -et tirer le bilan- ces dispositifs, et surtout sans demander l ’avis de celles et ceux qui les subissaient. Il faut dire que le mouvement syndical n’a pas non plus été à la hauteur de la défense des victimes de ces emplois atypiques ...
Parallèlement à ces formes dites « atypiques », à ces sous-contrats en temps parfois très partiel, d’autres dispositions permettent de mettre en cause les garanties du Code : développement des contrats précaires, dérogations qui dispensent de respecter le code …

Mais aujourd’hui c’est encore le sort des chômeurs qui sert de prétexte à la remise en cause du code : de Badinter à Terra Nova ( le think thank de gauche qui n’aime pas les ouvriers), c’est la lutte contre le chômage – objectif de gauche, acte de politique sociale- qui est mise en avant. Terra Nova écrit dans son rapport (« Réformer le droit du travail Gilbert Cette et Jacques Barthélémy ») : « Cette situation [i le code du travail ne parvient pas à concilier efficacité économique et protection des travailleurs] nuit au dynamisme économique et contribue à un chômage structurellement élevé et souvent de longue durée, ainsi qu’aux difficultés d’insertion sur le marché du travail qui frappent en particulier les jeunes. Elle nuit du même coup à la protection des travailleurs eux-mêmes : le chômeur de longue durée ou le jeune qui ne parvient pas à trouver un emploi ne sont pas réellement pris en compte. »

Et Macron reprend le même refrain « la situation actuelle sur le marché de l’emploi est inefficace et injuste. Nous sommes l’un des rares pays européens où le chômage ne baisse pas. Nous avons depuis trente ans dans notre pays plus de 18 % des jeunes au chômage en moyenne. ». Et à partir de ce constat, que l’on ne peut contester, Macron nous ressert la version de la « préférence française pour le chômage », vieille idée qui sous entend un consensus social entre le patronat et le salariat employé contre les chômeurs pour sacrifier des derniers « le droit social protège essentiellement ceux qui sont installés dans l’emploi, mais en les paupérisant par ses effets sur le dynamisme économique, et il renforce le nombre et la détresse des plus précarisés et de ceux qui attendent aux portes de l’emploi ou cherchent à s’y réinsérer » Terra Nova ( c’est moi qui souligne ). Macron va même un peu plus loin en opposant de fait le camp des salariés à celui des chômeurs « En France, on a longtemps vécu sur un accord implicite échangeant hyper-protection pour les insiders et hyper-précarité pour les outsiders, souvent livrés à eux-mêmes ».

On voit là se dessiner ce qui pourrait être une sortie de crise sur la loi EL Khomri, une solution de rechange à la stratégie brutale de Monsieur Muscle et son 49-3 une stratégie de réponse idéologique qui propose du social (améliorer le sort des exclus), mais aussi vise à construire un consensus politique contre les réactionnaires de gauche crispés sur des privilèges que leur payent les chômeurs mais aussi contre la droite la plus radicalisée qui défend la chasse aux pauvres (comme Wauquier avec sa haine des pauvres profiteurs de l’aide sociale).

Ce que Macron propose c’est un compromis social dans lequel chacun donne un petit peu dans l’intérêt de tous : en mettant l’accent sur la misère, il veut jouer de la culpabilisation des salariés pour leur faire accepter les reculs. Que l’efficacité économique pour l’emploi de mesures visant à faciliter les licenciements soit nulle (comme le montrent très bien nombre d’économistes) risque fort de compter bien peu dans un débat qui pourrait être dominé par l’émotionnel. Mais il aussi faut voir plus que le bout de la session parlementaire et comprendre que Macron prend acte pour la « construction idéologique » d’un centre, d’un parti démocrate (voir l’utilisation des mesures de Renzi du parti démocrate italien), sur les ruines de la gauche, avec des échéances sans doute plus à long terme que la prochaine présidentielle.

C’est pourquoi il me semble important de répondre à Macron et de ne pas considérer que ce qu’il dit est sans importance parce qu’il est un valet du Capital. Si nous ne sommes pas capable de mener le débat, de démonter leurs argumentations pour pouvoir proposer autre chose, nous risquons fort de perdre les batailles politiques qu’ils préparent : il faut arrêter de les prendre pour des imbéciles, ou des suicidaires, qui font n’importe quoi.

Les faux-amis des chômeurs et des chômeuses

Dès le début de son interview macron met l’accent sur la lutte contre le chômage en des termes particulièrement forts : « nous avons décrété un état d’urgence économique et social pour inverser la courbe du chômage. ». Et il insiste sur la nécessité d’un diagnostic partagé sur la gravité de la situation ; « Nous sommes l’un des rares pays européens où le chômage ne baisse pas. Nous avons depuis trente ans dans notre pays plus de 18 % des jeunes au chômage en moyenne. Aujourd’hui, il touche plus de 10 % de la population active et 25 % des jeunes de moins de 25 ans. ». Avec cet accent mis sur le drame social qu’est le chômage qui touche 6 millions de personnes , et on attendrait l’annonce de mesures à la hauteur de la part de celui qui se pose en défenseurs des chômeurs ? Or que trouve t-on ?
Une politique gouvernementale qui vis à faire payer aux chômeurs la réduction de la dette de l’UNEDIC pour respecter les pourcentages de dette publique imposés par l’UE. Pour y arriver, les gouvernement fait pression sur les partenaires sociaux qui négocient l’accord UNEDIC pour qu’ils mettent en place des mesures d’économies sur l’indemnisation ; Ce sont des ministres du gouvernement qui ont « proposé » la réduction des durées d’indemnisation ( avec une campagne dans les médias sur l’indemnisation du chômage en France la plus favorable en Europe !). C’est aussi ce gouvernement, dans la suite de ses prédécesseurs qui a continué à mettre en œuvre (avec les conventions Etat-Pôle Emploi) un contrôle accru des chômeurs-euses avec ses conséquences en matière de sortie de l’indemnisation (la moitié des chômeurs-euses ne sont pas indemnisé-e-s. Pôle Emploi ne se préoccupe pas de celles et ceux qui ses désinscrivent découragé-e-s : dans les fin d’inscription à Pôle Emploi 45 % sont faite pour des motifs « absence au contrôle » ou « arrêt de recherche » catégories qui ne disent rien sur le destin de ces personnes). Dans cette logique de contrôle le groupe au pouvoir propose le retour à la dégressivité qui fait baisser les allocations - tous les mois les trimestres ou autre- pour soi-disant inciter les chômeurs à ne pas rester au chômage ; qui peut prouver l’efficacité de cette mesure quand Pôle emploi ne propose que 2 emplois stables (dont des CDI de + de 6 mois) pour 100 demandeurs ? quand la moitié des Demandeurs d’Emploi retrouvent du travail ( généralement précaire) dans l’année ? Par contre la nocivité des ces réductions d’allocation est bien réelle, elle contribue à alimenter la spirale infernale qui conduit les chômeurs de la précarité au chômage de longue durée (y compris au RSA) et au découragement (au retrait de la liste des DE) : vivre dans des conditions d’incertitude financière ou de dettes est usant et désocialise.

Macron n’a pas un mot pour contester cette politique.

Dans la loi il est des dispositifs qui vont dans le même sens, contre les intérêts des chômeur-euse-s. Sans faire une trop longue énumération, citons en 2 .
Le plafonnement des indemnités pour licenciement abusif : la réparation, toujours trop partielle, du préjudice subi avec un licenciement sans cause réelle et sérieuse n’est pas seulement un apport financier non négligeable. La convention UNEDIC de 2014 s’en prenait déjà à cette réparation : portant déjà atteinte au droit à réparation des salariés, elle prenait en compte la totalité de l’indemnité, qui répare aussi d’autres préjudices que la perte de revenu, pour calculer la période pendant laquelle un-e chômeur-euse doit attendre d’être indemnisé-e. Cette forfaitisation du préjudice ne tient pas compte de la situation concrètes des chômeurs -euse-s et ce sont celles et ceux qui ont subi le préjudice le plus important qui sont le plus pénalisé-e-s par cette loi : c’est une manière d’en finir avec la conception du chômeur victime pour valider celle de la normalité du chômage.

Il est un article qui porte atteinte aux droits des chômeur-euse-s c’est celui qui légalise des dispositions jugées illégales par le conseil d’Etat en octobre dernier.
Par l’article 52 Pôle Emploi pourra décider arbitrairement, récupérer les indus même si les interessé-e-s en contestent le bien fondé. Pôle Emploi grâce à cette disposition s’affranchit de tout contrôle du juge et prive les chômeur-euse-s du droit à l’arbitrage d’un juge au terme d’un débat contradictoire. Le seul recours prévu est une instance interne à Pôle Emploi. Voilà un droit essentiel dont sont privé-e-s les chômeur-euse-s alors que le rapporteur public du Conseil d’Etat avait condamné cette pratique en disant que les partenaires sociaux n’ont pas le droit de procéder à des mesures coercitives vis à vis des DE … mais le respect des droits n’est pas la caractéristique de ce gouvernement et la peur du juge domine … quand ce dernier est le garant des droits et libertés...

Par ce même article le gouvernement décide – contre l’arrêt du Conseil d’Etat- que le MEDEF et ses complices syndicaux sont désormais « compétentes pour prévoir une réduction des droits des travailleurs privés d’emploi qui auraient omis de déclarer, dans les conditions prévues par cet accord, des périodes d’activité » Voilà encore un moyen d’éviter que les juges fassent respecter le droit des chômeur-e-s.
Au bout du compte la seule disposition « favorable aux chômeur-e-s » serait la possibilité d’un partage élargi de la précarité. Quand Macron écrit « Si l’on veut lutter contre ce que l’on appelle le dualisme du marché du travail et l’injustice qu’il y a entre le CDD et le CDI, il faut avoir pour objectif que tout le monde puisse avoir un CDI. » et que dans le même temps il propose : « La bonne réponse à notre situation, c’est donc de donner plus de flexibilité au niveau de l’entreprise. On a commencé à le faire avec les accords de maintien dans l’emploi, notamment dans la loi Croissance et activité, que j’ai portée. Quand ça va mal, une entreprise peut désormais négocier par le biais d’un accord majoritaire des dérogations à la loi pour une durée qui peut aller jusqu’à cinq ans. » c’est la précarisation des CDI qu’il organise, la dérogation aux normes générales d’emploi qui facilite le licenciement . Avec un CDI plus précaire, la situation d’une bonne partie des chômeurs sera t-elle véritablement modifiée ? Une telle idée repose sur une conception erronée et archaïque du chômage.

Macron, ne connaît pas le chômage

Depuis déjà longtemps le chômage de masse n’est plus la privation totale d’emploi qui est encore la définition courante du Chômage. La montée des catégories B et C, partiellement demandeurs d’emploi, se sont plus développées que la catégorie A, celle des chômeurs traditionnels ( disponibles dans les 15 jours pour un CDI à temps plein). Dans les derniers chiffres ces chômeurs partiels représentent près de 25 % du total. Macron semble ignorer que nombre de chômeur-euse-s partagent leur temps entre des petits boulots à temps plus ou moins partiels et le chômage. Quand il évoque les inscriptions au chômage il met en avant 2 motifs « Il y a deux fois plus d’entrées à Pôle emploi à la suite d’une rupture conventionnelle qu’à la suite d’un licenciement économique […] qui comporte des garanties pour les salariés et qui ne représente que 2,5 % seulement des entrées à Pole emploi, car c’est un dispositif assez rigide. » et fait l’impasse sur les autres motifs par exemple les fins de CDD, de mission d’intérim qui représente encore plus de 30 % des inscriptions.Pourtant Macron ne méconnaît pas l’importance de la précarisation quand il note que « 90 % des gens qui rentrent sur le marché de l’emploi passent par des CDD ou de l’intérim de manière durable. », pourtant il ne voit pas que plus de la moitié des chômeur-euse-s sont aussi des travailleur-euse-s précaires ou en sous emploi. Les chômeur-euse-s de longue durée de plus d’un an ne sont qu’une minorité certes en croissance et surtout quand on cumule avec les chômeurs de + de 50 ans. Ce sont des catégories qui sont et seront encore plus les premières victimes des plans de licenciement avec toutes les catégories les plus fragiles (malades, sous qualifiés, détenteurs de qualification obsolètes. Il est bien peu probable que ce soit ces catégories qui puissent avoir accès au « paradis macronien » d’un nouveau CDI plus flexible. Car toutes ces personnes fragilisées ne supportent pas les aléas de la la précarisation et s’enfoncent dans le chômage de longue durée. A contrario, pour le MEDEF aujourd’hui la précarité est un élément essentiel de sa gestion de la main-d’oeuvre et c’est ce que la loi va précisément renforcer « Ce que nous proposons, c’est de permettre à une entreprise d’agir pour sauvegarder sa compétitivité, comme la Cour de cassation l’autorise  : quand cela commence à aller mal, et que le chef d’entreprise considère qu’il faut agir pour assurer la pérennité, il faut qu’il puisse anticiper. » c’est à dire de rendre plus facile les licenciements. » Qui jugera que ça va mal ? Le chef d’entreprise qui considère qu’il faut agir : cette appréciation du seul patron pour « anticiper » avant tout élément précis et concret (il suffit du pif patronal - le meilleur outil pour répondre à la main invisible du marché). Macron propose de rétablir le pouvoir sans contrôle du patron sur les licenciements, il n’y a plus – de fait- besoin de cause réelle et sérieuse. Et voilà ce qui est appelé par Macron combattre « l’injustice qu’il y a entre le CDD et le CDI ».
Au bout du compte, loin de lutter contre le chômage de masse dans lequel la précarisation des contrats tient une place centrale, la loi travail ne fera qu’accroître la précarisation à certains CDI qui auront encore moins de garanties que les CDD. « Nous sommes l’un des rares pays européens où le chômage ne baisse pas. » dit Macron. Avec les dispositions de la loi El Khomri les chiffres de chômeurs pourraient peut être baisser, mais en catégorie A (la plus restrictive) :un plus grand nombre de salariés risquent de se retrouver dans un chômage à temps partiel, dans une alternance chômage- emploi précaire. Dès lors où est l’amélioration « dans un système qui est ainsi fait que quand vous êtes en situation de précarité, vous ne pouvez pas construire votre vie, car vous n’avez pas accès au crédit, vous ne pouvez pas vous projeter dans l’avenir. ». Faute de lutte réelle contre la précarisation des emplois, faute de dispositions concrètes dans ce sens on ne voit pas ce que les chômeurs et les salariés les plus fragiles peuvent attendre de ces dirigeants qui se contentent d’ânonner le discours du MEDEF en pensant que c’est de la science. Macron balaye sans argumenter des propositions syndicales : « On a majoré le coût du CDD et malgré cela, à peine 10 % des nouvelles embauches se font en CDI » : il oublie que la majoration ne touche que les contrats très courts, que l’intérim en est dispensé et que le montant de la majoration est sans doute trop faible pour être dissuasif.

« faire confiance aux acteurs de terrain » pour combattre « l’égoïsme des insiders » !!!

On se rappelle le chevalier Blanc Macron en pourfendeur des égoïsmes qui, au sein même du salariat, sacrifie les chômeurs. Ce sont les salariés en emploi – donc déjà – privilégiés qui défendent le code du travail contre celles et ceux qui sont dehors. Comme le LR Reynié, le nouvel ami du gouvernement, le dit dans sa pétition « Ceux qui protestent aujourd’hui ont été bien silencieux pendant les mois et les années précédents, alors que le chômage ne cessait de croître. On ne se souvient pas d’une mobilisation de leur part contre le chômage comparable à celle qu’ils mettent en œuvre aujourd’hui pour empêcher l’adoption d’une loi espérant juguler ce fléau national ! ».
Il faudrait donc une législation qui ne soit pas portée par les salariés qui ont un emploi et qui défendent leur privilège, puisqu’il sont responsables des méfaits du code du travail d’aujourd’hui.
Or que nous propose Macron ? « Dans un environnement de compétition économique ouvert,[...]Redonner de la souplesse aux acteurs de terrain, c’est leur dire qu’ils peuvent définir de nouvelles règles du jeu par accord d’entreprise majoritaire ou par consultation, si des syndicats représentant plus de 30 % des voix aux élections le demandent pour sortir de situations de blocage. La consultation des salariés peut être utile dans certaines situations spécifiques. » Il nous propose de faire faire la loi – non plus par le législateur dans le cadre d’un débat politique public- mais par ceux là mêmes qui aujourd’hui empêcheraient l’entrée des entreprise aux chômeur-euse-s ! Macron ne nous explique pas par seul miracle la négociation des accords d’entreprise transformerait totalement le rapport entre salariés en emploi et chômeur-euse-s ?

Macron compte sans doute sur sa pédagogie pour faire changer les comportements en expliquant que le nouveau monde est celui de l’insécurité généralisée : « Protéger les gens, ce n’est pas leur promettre une société qui n’existe plus, un modèle qui est fragilisé. Ce n’est pas de mettre des digues face à la mer. […] La responsabilité d’un homme politique, c’est de donner aux individus la possibilité de réussir, dans un environnement où le modèle ne sera plus un CDI toute la vie dans la même entreprise, modèle sur lequel est fondé notre droit du travail depuis 1945. Ce sera de plus en plus une exception... » Mais est ce une raison pour détruire tout de suite les garanties existantes pour la majorité des salarié-e-s d’aujourd’hui ? Il reconnaît lui même : « Parmi les gens qui ont un travail, 80 % sont en CDI, c’est bien. » Mais si c’est bien pour quoi remettre en cause ce CDI protecteur ? Pourquoi commencer par supprimer l’idée même de sécurité ou de sécurisation des parcours professionnels ? Pourquoi ne rien proposer pour trouver de nouvelles garanties adaptées au évolutions du salariat, quand on se prétend aussi soucieux de regarder vers l’avenir et les recompositions des métiers ou apparition de nouveaux métiers ? Pourquoi réduire le choix entre salarié enfermé dans sa subordination et auto-entreprenariat ? en disant « parce qu’à certains moments de la vie, le contrat du salariat, protection contre subordination, devient insupportable, beaucoup veulent s’installer à leur compte. » Macron signe la fin de la social démocratie ancienne qui partageait les fruits de la croissance et assurait un minimum de sécurité, il propose une vision où la gauche ce serait « reconnaître la multiplicité des choix possibles dans une société. Il ne faut pas réduire les opportunités, mais les multiplier. » et pour cela « aider ces jeunes entreprises à croître plus vite, en simplifiant les règles fiscales et juridiques, par exemple quand vous embauchez votre premier salarié. Il faut que cela soit beaucoup souple et plus fluide. » En attendant de faire de ces entrepreneurs nouveaux la base sociale de la gauche, Macron sert la soupe au MEDEF.

L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux mêmes

Il ne veut pas entendre les appels au respect de la dignité qui déferlent sur les réseaux sociaux des jeunes en particulier qui affirment « on vaut mieux que ça ! ». Comme ses amis de Terra Nova qui voient dans les ouvriers la base du FN, Macron ne sait pas ce qu’est la condition des ouvriers, des précaires, des salariées des entreprises de nettoyage ou des services à la personne.
Enfermé qu’il est dans le capitalisme, il ne s’occupe pas, d’une voie, celle de la coopération, qu’empruntent aujourd’hui un nombre croissant de salariés pour échapper au « despotisme de fabrique » et se garantir un travail « où ils aient la satisfaction de donner toute la mesure de leur habileté et de leurs connaissances et de contribuer le mieux au bien-être commun » (déclaration de l’organisation internationale du travail 1944) ». Non seulement il faut défendre le code du travail et ce que des générations de travailleurs dans la lutte ont construit de protecteur contre les exigences du profit, mais il faut rouvrir l’espoir de l’émancipation par d’appropriation collective des entreprises comme moyen d’éviter radicalement que certains se tuent au travail quand d’autres crèvent au chômage, tous regardant la planète brûler.