Politique santé sécu social de l’exécutif

« CHEZ POL » Libération - Glyphosate : le gouvernement recule encore pour mieux reculer

Juillet 2020, par Info santé sécu social

Par Sylvain Chazot — 30 juin 2020

Elisabeth Borne indique ce mardi matin que la France interdira le glyphosate dans « ses principaux usages » avant « la fin du quinquennat ».

Il n’y a pas d’amour mais uniquement des preuves d’amour. Au lendemain de municipales acquises à la cause verte, l’exécutif entend montrer qu’il s’enquiert de l’urgence écologique. Emmanuel Macron s’est ainsi attelé, lundi, à répondre favorablement à la plupart des propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Ce mardi matin, Elisabeth Borne repasse une couche d’émeraude, expliquant dans le Parisien que le gouvernement compte agir. Un sujet parmi d’autres est évoqué : la sortie du glyphosate, l’herbicide controversé. La ministre de la Transition écologique l’assure : cette sortie est toujours d’actualité. « Nous étudions actuellement des alternatives qui pourraient permettre d’en sortir rapidement. […] Mais je peux vous assurer que cette interdiction sur les principaux usages sera mise en œuvre avant la fin du quinquennat. L’engagement sera tenu. »

Mais de quel « engagement » parle Borne ? Car en expliquant que la sortie sera « mise en œuvre avant la fin du quinquennat », c’est-à-dire avant mai 2022, la ministre confirme un report de cette sortie. Et ajoute une pierre à l’édifice des tergiversations du pouvoir sur le sujet.

2017 : au plus tard dans trois ans
Tout a commencé lorsque, le 27 novembre 2017, Macron promettait l’interdiction de l’utilisation du glyphosate en France « dès que des alternatives auront été trouvées, et au plus tard dans trois ans ». Donc d’ici 2021. Mais cette promesse a été progressivement enterrée. D’abord par l’Assemblée, qui a rejeté en 2018 les amendements visant à inscrire la sortie du glyphosate en 2021 dans la loi Egalim. « Il n’est pas nécessaire que ce soit dans la loi dès lors que nous prenons des engagements, dès lors où nous avons un plan sur les produits phytopharmaceutiques qui est en place. La position du gouvernement est claire », assurait sur France Info le ministre de l’Agriculture d’alors, Stéphane Travert.

En février 2018, le chef de l’Etat maintenait sa volonté, comparant l’herbicide à l’amiante. « Il y en a qui disent que c’est très dangereux, d’autres que c’est moyennement dangereux. Moi, j’aurai à répondre de ce que je fais, demain, après-demain », assurait-il à un agriculteur dans un échange houleux au Salon de l’agriculture.

2020 : 2021 n’est pas tenable
Puis Macron a lui-même renié son propre engagement. « Est-ce que l’on peut dire qu’il n’y aura plus du tout de glyphosate dans trois ans ? Impossible ! […] Si je vous disais ça, c’est simple, je tue complètement certaines filières », affirmait-il en janvier 2019 lors d’une rencontre à Bourg-de-Péage (Drôme) organisée dans le cadre de son grand débat.

Mais l’objectif de 2021 n’était pas totalement abandonné. La promesse du Président sera tenue, assurait en novembre dernier dans Ouest-France, la députée LREM d’Ille-et-Vilaine Laurence Maillart-Méhaignerie, membre de la mission d’information sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate.

Et puis patatras. Fin février, juste avant l’ouverture du Salon de l’agriculture, le Président tenait à rassurer la filière. « Sur la base des travaux déjà réalisés, il est possible d’envisager une réduction très importante des quantités utilisables en viticulture ou en arboriculture. Nous aurons prochainement les éléments pour les grandes cultures, assurait-il dans la Montagne. […] L’objectif de 2021 ne sera pas tenable dans toutes les exploitations. » C’est confirmé. Et puisque l’objectif est désormais fixé à 2022, on verra s’il est plus tenable.