Le droit à la santé et à la vie

Centre d’Observation de la Société - L’espérance de vie progresse moins vite

Février 2020, par Info santé sécu social

L’espérance de vie à la naissance atteint 79,8 ans pour les hommes et 85,7 ans pour les femmes en 2019 en France métropolitaine, selon l’Insee. Au cours des 60 dernières années, les hommes ont gagné 13 ans d’espérance de vie, les femmes 12,3 années. Depuis le milieu des années 1990, les gains obtenus par les femmes sont moins rapides que ceux des hommes et l’écart entre les sexes se resserre : de huit ans et trois mois en 1992 en faveur des femmes, il est tombé à moins de six années en 2017. Il est stable depuis. Les modes de vie féminins sont de plus en plus semblables à ceux des hommes, qu’il s’agisse des durées de travail ou des types d’activité professionnelle, de consommation de tabac ou d’alcool notamment. Pour autant, l’inégalité femmes-hommes en la matière reste considérable. En 2020, l’espérance de vie des hommes est équivalente à celle que les femmes avaient au milieu des années 1980. Au rythme actuel de rapprochement, il faudrait environ 60 ans pour arriver à l’égalité entre femmes et hommes en matière d’espérance de vie.

De très nombreux facteurs contribuent à l’allongement de la vie. Sur longue période, les conditions de vie s’améliorent, le travail est moins pénible physiquement et le nombre d’heures de travail baisse. Plus qualifiés, les individus sont de plus en plus attentifs à leur santé et à leur corps en particulier (hygiène, alimentation, etc.). L’accès aux soins progresse. La qualité des soins et l’innovation en matière de santé jouent, mais pas autant qu’on le dit. On constate peu de relations parmi les pays riches entre le système de soins et l’espérance de vie. Dans les années plus récentes, les progrès qui ont le plus accru la durée de vie ont surtout été réalisés en faveur des personnes les plus âgées, autour de 80 ans pour les femmes et 70 ans pour les hommes, principalement par une amélioration des traitements des cancers et des maladies de l’appareil respiratoire.

Cette évolution va-t-elle se poursuivre ? Dans son scénario dit « central » de projection démographique, l’Insee applique aux années futures les évolutions actuelles. En 2070, dans cette hypothèse, l’espérance de vie à la naissance atteindrait 93 ans pour les femmes et 90 ans pour les hommes. Depuis le début des années 2010 cependant, les progrès semblent moins rapides. Entre 2011 et 2015 chez les femmes, et entre 2014 et 2016 chez les hommes, l’espérance de vie a stagné. On peut imaginer que l’espérance de vie finisse par plafonner, mais il est beaucoup trop tôt pour tirer des conclusions sur une possible stagnation plus durable (voir notre article). Depuis 2016, les progrès ont repris (voir nos graphiques sur la période de dix ans ci-dessous).

Demain, les progrès de la longévité dépendront de la capacité de la médecine à ralentir les effets du vieillissement et à réparer les organes dont les fonctions se détériorent. Ils résulteront aussi de l’évolution des modes de vie, notamment de la consommation de tabac et d’alcool. L’état de santé dépend pour beaucoup du poids du travail : de la quantité d’heures travaillées (durée hebdomadaire et nombre d’années) et des conditions d’exercice, notamment la pénibilité physique. L’essor d’emploi peu qualifiés pénibles qui s’exercent à l’extérieur (comme les livreurs à domicile) va jouer. Allons-nous vers des métiers qui usent moins l’organisme ou, au contraire, de nouvelles pénibilités sont-elles en train de naître ? Cette question est essentielle pour comprendre l’évolution future de l’espérance de vie.

Les bébés de 2020 vivront-ils plus de 100 ans ? Comme son nom l’indique, l’ « espérance » de vie est un calcul fictif réalisé à partir des conditions de mortalité du moment. On applique les taux de chaque âge pour construire l’« espoir » d’atteindre un certain âge. Un bébé né en 2019 ne connaîtra pas tout au long de sa vie les conditions de mortalité de 2019. A moins d’une catastrophe écologique ou d’une guerre, il vivra très probablement plus longtemps que l’espérance de vie ne l’indique aujourd’hui, si les progrès reprennent. Beaucoup auront plus de 100 ans et donc atteindront l’année 2119 !