Du centre à la droite

Egora.fr :Programme santé de Macron : interview du Dr Olivier Véran

Mai 2017, par infosecusanté

Programme santé de Macron : "On va faire du travail d’orfèvre"

Par Sandy Berrebi-Bonin le 09-05-2017

Celui qui ne se revendique "ni de droite, ni de gauche" a fait appel au Dr Olivier Véran, neurologue hospitalier au CHU de Grenoble et député socialiste de 2012 à 2015 (voir encadré), pour être son porte-parole santé. S’appuyer sur les acteurs de terrain, miser sur la prévention ou expérimenter des nouveaux modes de financement des soins font partie des ambitions du candidat En Marche pour la santé. Le Dr Olivier Véran les développe pour Egora.

Egora : Quelles sont les trois priorités d’Emmanuel Macron en matière de santé ?

Dr Olivier Véran : Nous avons justement organisé le programme santé autour de trois priorités. La première est la révolution de la prévention. La deuxième est la lutte contre les inégalités de santé et la troisième est l’amélioration de l’efficience de notre système de santé.

Concrètement, comment comptez-vous développer la prévention ?

Nous faisons déjà le constat qu’en prévention nous sommes très mauvais élèves en France. Sur 250 milliards de dépenses de santé, nous sommes à moins de 5 milliards sur la prévention. Ce chiffre classerait la France en queue de peloton européen. Pour faire de la prévention, il faut sortir de la logique du slogan et mettre des moyens. Nous allons dégager des moyens en ville et à l’hôpital. En médecine et chez les paramédicaux. Nous allons créer des modes de financement et de rémunération liés à des activités de prévention. Les consultations de prévention, notamment en médecine de ville, prennent du temps et ne sont pas suffisamment reconnues. Pour faire de la prévention en milieu hospitalier, il faut également avoir du temps et des moyens.

Il y a plein d’expérimentations qui fonctionnent dans les territoires, qui sont financées sur deux ou trois ans. Elles marchent très bien mais ne sont jamais généralisées parce qu’on n’a pas de moyens pérennes pour pouvoir le faire. Quand ça marche très bien dans un territoire, on ne le diffuse pas au niveau national et chacun fait des choses dans son coin. Il faut s’appuyer sur l’expertise des acteurs de terrain et sur les initiatives des professionnels de santé pour pouvoir généraliser et diffuser des dispositifs de prévention qui fonctionnent bien.

Avez-vous un exemple concret ?

Je peux citer le cas de l’accident de la main. Il y a un accident de la main toutes les 20 secondes en France. On considère que la pulpe du doigt est ce qui coûte le plus cher à la Sécurité sociale. Il y a un nombre très important d’arrêts maladie et d’invalidité liés à cela. Les ouvriers qui travaillent sur des machines et qui se coupent un doigt perdent en général leur travail, ce qui crée énormément de misère sociale. Or, on sait qu’une action de prévention ciblée sur les postes de travail dans les milieux à risques permet de réduire de 30 à 40% les accidents. Si on investit un euro aujourd’hui dans des actions de prévention ciblées au travail, on économise beaucoup plus demain. C’est un exemple parmi d’autres.

Nous pensons également que les soignants ne sont pas assez sensibilisés aux actions de prévention. A l’étranger, il y a des modules de formation beaucoup plus poussés. Moi j’ai fait toutes mes années de médecine à Grenoble et je ne me souviens pas que l’on m’ait appris à faire de la prévention ou de l’éducation thérapeutique. Cela a peut-être évolué depuis, mais je crois qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Nous allons donc proposer à 40 000 étudiants en santé de mener des actions de prévention dans le cadre d’un service sanitaire. Ils pourront les mener partout, dans les écoles, en lien avec la santé scolaire, sur les lieux de travail, en lien avec la santé au travail, dans les Ehpad… Cela implique d’abord que ces jeunes soient formés pour faire de la prévention. Cela leur sera utile dans leur exercice professionnel futur. Et cela nécessite aussi de s’organiser pour pourvoir l’intégrer dans leur programme de formation initiale.

Comment seront rémunérés les généralistes qui feront de la prévention ?

Les rémunérations pourront passer soit par la ROSP, soit sur l’identification d’objectifs financés sur la prévention au sein de la prochaine convention. Il y a une volonté de mettre des moyens...

Ces moyens pourront être déclinés sur tous les pans de l’exercice de la médecine libérale.

Les médecins généralistes sont très souvent débordés. Comment introduire ces consultations de prévention dans un planning déjà surchargé ?

Nous sommes contre l’idée qu’il y ait une solution uniciste pour tous les territoires et tous les acteurs de santé. Nous voulons pouvoir proposer d’accompagner les soignants dans leurs démarches professionnelles. Si un médecin dit être prêt à prendre le temps mais veut être rémunéré pour le faire, nous devons pouvoir lui répondre. Si au contraire, un autre médecin dit être débordé et obligé de parer à l’urgence et au plus pressé, dans ce cas pourquoi ne pas travailler avec lui pour qu’il puisse s’appuyer sur un autre acteur de la prévention. On sera là pour ça. Avoir une solution uniciste, c’est fini. Ça n’est pas notre façon de fonctionner. Nous préférons écouter les besoins et les initiatives des acteurs dans les territoires.

Il y aura aussi des objectifs clairs de santé publique. Je pense à la lutte contre le tabac, contre l’alcoolisme, à la politique de réduction des risques pour les usagers de drogues, sur l’alimentation, sur la pollution, sur la santé environnementale… Il y a une politique très ambitieuse sur ces objectifs. Nous voulons vraiment mettre des moyens dessus.

Sur la santé environnementale, avez-vous des engagements précis, notamment sur les perturbateurs endocriniens ?

C’est très bien de dénoncer les perturbateurs endocriniens, mais il faut pouvoir agir. J’étais rapporteur du volet prévention sur la loi de santé. Je voulais faire un gros big bang sur tout ce qui était pollution, santé environnementale… Mais je me suis aperçu qu’en réalité, cela relève moins de la loi que des moyens. Je considère qu’il faudrait que l’on passe d’une épidémiologie populationnelle à une épidémiologie de l’individu. Il faut être capable d’avoir des démarches individualisées pour des gens qui subissent potentiellement des conséquences sanitaires liées à des problèmes environnementaux. Il faut être capable d’avoir des cohortes et de faire plus de recherche publique sur ces questions. Tout cela de manière complétement indépendante des lobbies.

Emmanuel Macron veut faire "évoluer la rémunération de la médecine de ville". Comment ?

Encore une fois, nous ne proposons pas une méthode uniciste dans laquelle nous pourrions créer des services territoriaux. Non. Nous préférons nous dire qu’il y a de l’énergie et des idées dans les territoires. Ce qui manque aujourd’hui, c’est de la liberté pour agir et du temps. Il faut d’abord que nous ouvrions deux grands chantiers. Il y a aura celui du temps médical et au-delà même, du temps de soin. Se posera la question de comment faire en sorte que dans une journée de travail on réduise la part de temps professionnel qui n’est pas destiné à faire de la santé, à savoir charges administratives, complexité des normes… Il faudra sans doute simplifier un certain nombre de dispositions. Le deuxième chantier sera celui des compétences. Si on aborde la question des compétences sous l’angle très restrictif d’un petit acte technique qui ne prend pas beaucoup de temps et que l’on va prendre à un médecin pour le donner à un paramédical, ça ne marche pas. Je le vois bien et je le comprends parfaitement. La question des compétences doit être abordée dans une globalité. Comment est-ce que l’on pense l’interaction entre des médecins et des paramédicaux ? Comment est-ce que l’on pense la montée en compétence d’un certain nombre de paramédicaux intéressés pour cela ? ...

Comment est-ce que l’on pense l’interaction contractuelle entre ces différents acteurs qui pourraient être amenés à travailler ensemble ? A partir de là, on pourra envisager d’expérimenter dans les territoires, auprès de professionnels de santé volontaires, des modes de financement innovants type financement à l’épisode de soin ou au parcours.

Il ne s’agira donc au départ que d’expérimentations… Qu’en sera-t-il du développement des forfaits souhaité par de nombreux syndicats de jeunes médecins ?

Nous serons tout à fait dans cette logique. Le financement à l’épisode de soin ou au parcours va même au-delà de la question du forfait. Prenons l’exemple d’un patient qui doit être opéré pour la pose d’une prothèse totale de hanche. Aujourd’hui, il va avoir des soins avant la chirurgie, d’autres liés à la chirurgie, des soins de suite, éventuellement de la rééducation… Chaque étape est payée distinctement, à l’acte en médecine de ville, et à l’activité à l’hôpital. La question est de se dire : ne pouvons-nous pas faire confiance aux acteurs pour qu’ils puissent s’organiser et proposer des modèles qui leurs correspondraient dans les territoires ? Ne peut-on pas avoir un financement global pour cet épisode de soin qui serait réparti entre les différents professionnels ? La répartition relèverait des professionnels eux-mêmes. Ça ne serait pas un modèle imposé.

Evidement, il faudra expérimenter. On ne peut pas généraliser du jour au lendemain un modèle comme cela. Ça ne marcherait pas, on braquerait tout le monde. On rentre là dans quelque chose de totalement nouveau. C’est ce qui se passe beaucoup en Europe du Nord ou aux Etats-Unis, notamment, et ça marche très bien. On gagne en pertinence et en efficience des soins et la totalité des gains est reversée aux professionnels, au titre de la revalorisation, ou pour pouvoir investir dans l’innovation organisationnelle ou technologique. Cela répond à la demande des syndicats médicaux qui nous disent : "laissez-nous expérimenter, innover et nous organiser différemment". Nous disons "chiche on peut le faire", mais la puissance publique doit être là pour garantir la qualité et la pertinence des soins.

Sur les paiements forfaitaires, la politique conventionnelle doit être respectée. On constate effectivement qu’il y a une volonté des jeunes depuis un certain nombre d’années d’avoir des modes de rémunération qui soient différents du seul paiement à l’acte. Tout cela sera discuté et concerté avec les professionnels.

Quel est le positionnement d’Emmanuel Macron sur les dépassements d’honoraires ?

Il souhaite un meilleur remboursement des dépassements d’honoraires par les complémentaires santé. Il ne remet pas en question le secteur 2.

Vous comptez doubler le nombre de maisons de santé. Beaucoup de maisons de santé peinent à trouver des médecins, quelle sera votre solution ?

En fait, nous voulons les tripler parce que il y en a 1000 aujourd’hui et nous voulons en rajouter 2000. On ne veut pas faire des maisons de santé pour le plaisir de faire des maisons de santé...

Nous voulons accompagner toute démarche professionnelle de regroupement dans les territoires à hauteur de 2000 maisons. Nous irons même au-delà de l’accompagnement de la construction. Nous irons dans l’accompagnement du fonctionnement. Il pourra y avoir des médecins généralistes débordés qui veulent se regrouper juste pour pouvoir continuer de soigner leurs patients sans craquer. Eux, on ne leur rajoutera pas de protocoles en plus. Il y a d’autres professionnels qui vont vouloir se regrouper et monter des dispositifs de type télémédecine, télé expertise ou coopération… La puissance publique sera également là pour les accompagner et les aider. On va faire du travail d’orfèvre.

En ce qui concerne la coercition à l’installation, Emmanuel Macron s’est prononcé contre. Comment faire pour que les jeunes s’installent dans les territoires ?

Il y a la question démographique. Ça n’est pas qu’un problème de répartition. On enregistre une réduction continue du nombre d’actes de médecine de soins primaires dans notre pays depuis 10 ans. A mesure que l’on parle de virage ambulatoire, on enregistre une baisse des soins primaires. Il faut se poser la question de la réduction de l’offre de façon globale. Je constate que le numerus clausus n’est qu’un formidable instrument visant à empêcher un étudiant français d’apprendre la médecine en France. Ça n’empêche absolument pas que les jeunes Français se forment à l’étranger ou les jeunes étrangers de venir exercer la médecine en France. Il faut que l’on ait une réflexion sur l’outil de régulation démographique, le numerus clausus étant aujourd’hui dépassé en l’état.

Il faut que l’on mette en place des mesures incitatives. Quand on fait du travail d’orfèvre avec les professionnels dans les territoires, on est à leur écoute et on prêt à les accompagner au-delà de la construction des murs d’une maison de santé. On mettra les moyens et on prendra le temps nécessaire. Il faudra aussi travailler à une meilleure revalorisation des maîtres de stage, à une multiplication des terrains de stage… Il faut également s’intéresser à la question des spécialistes d’organes. On parle beaucoup des généralistes, à raison, mais on parle assez peu des spécialistes d’organes dont on a aussi vraiment besoin dans les territoires.

Comment rouvrir le numerus clausus, sachant que les facs sont surchargées et qu’il n’y pas assez de professeurs, notamment en médecine générale ?

Nous allons continuer à développer la filière de médecine générale. C’est nécessaire. Nous avons aussi des moyens de former différemment aujourd’hui. Par exemple à Grenoble, on fait une première année avec un DVD et un tutorat public. Cela a permis d’enregistrer des résultats qui sont extrêmement positifs, notamment en matière de diversification des milieux sociaux pour l’accès à la médecine. Il y a aussi l’apprentissage par simulation qui se développe beaucoup. Et enfin il y a tout un tas de terrain de stages qui n’ont pas été ouverts et de territoires entiers qui n’ont pas été conquis par les étudiants en médecine.

Moi j’ai fait tout mon externat et mon internat à Grenoble. Au moment où j’ai passé ma thèse, je n’avais jamais mis les pieds dans un cabinet de neurologue. Comment aurais-je pu avoir l’idée de ce qu’était la neurologie libérale ? Il faut vraiment travailler à cela.

Je considère que les capacités de formation sont un sujet très important. Il ne faut surtout pas baisser en gamme en termes de qualité. Mais il faut aussi considérer qu’il vaut mieux adapter les capacités de formation à la demande de soins que limiter l’offre aux capacités de formation. Notre système ne répond plus aujourd’hui à la demande et surtout il est complétement contourné. Un médecin sur quatre qui s’installe aujourd’hui est un médecin étranger. On paye des chasseurs de têtes qui vont en Roumanie chercher des médecins...

Je préfère qu’on forme davantage de médecins en France, plutôt qu’on importe des médecins français formés en Roumanie ou en Belgique.

Sur la question du tiers payant, Emmanuel Macron évoque un système "généralisable". Qu’est-ce que cela signifie ?

Il y avait à l’origine des médecins qui voulaient pouvoir faire bénéficier du tiers payant à leurs patients sans critères. Initialement, ils ne pouvaient pas le faire. La réponse politique a été de dire que du coup tous les médecins le feront pour tous les patients. On ne va pas revenir sur le débat mais le tiers payant généralisé intégral, les médecins n’en veulent pas. Pour autant, certains veulent pouvoir en faire bénéficier leurs patients et d’autres demandent qu’on puisse expérimenter un dispositif de tiers payant pour être certains que cela soit gratuit, facile et rapide.

Nous allons mettre le tiers payant à la main des professionnels. Ceux qui sont volontaires et veulent en faire bénéficier leurs patients pourront le faire et ceux qui ne veulent pas parce qu’ils attendent de voir que le dispositif peut être une aide plutôt qu’une contrainte, pourront attendre.

Quelle est la différence avec la situation antérieure à la loi de santé, où les médecins pouvaient si besoin pratiquer un tiers payant social ?

Il y avait des critères et ils ne pouvaient pas le faire auprès de tout le monde. Cela ne comprenait pas la part complémentaire. Il faut surtout que l’on travaille à un dispositif de tiers payant simple et efficace. Les médecins sont comme Saint Thomas et ils ont raison. Ils ont besoin de voir avant de croire.

Emmanuel Macron propose un remboursement à 100% du dentaire, de l’optique et de l’audioprothèse. Comment ?

Nous proposons effectivement un reste à charge 0 d’ici à 5 ans sur les soins dentaires, optiques et d’audioprothèses sans monter les prix des contrats et sans plafonner. Nous avons des définitions de contrats types pour les complémentaires avec plus de visibilité et de transparence et une mise en concurrence des différents contrats. Cela fera baisser les prix. Nous avons des montages pour cela.

La part du remboursement de la Sécurité sociale va-t-elle augmenter ?

Nous avons un engagement de reste à charge 0 sur d’ici 2022. Nous prendrons nos responsabilités pour tenir cet engagement.

A l’hôpital, les soignants dénoncent le manque de temps, la pression… Que répondez-vous face à cette souffrance ?

Evidemment, il y a une souffrance. Cette souffrance a plusieurs origines. L’une d’elles est qu’il y a une augmentation de l’activité qui est importante et la rémunération de l’hôpital n’augmente pas en fonction de l’activité puisqu’il y a une enveloppe qui est contrainte. Du coup, cela demande plus d’efforts aux professionnels et c’est assez frustrant pour tout le monde de voir qu’il n’y a pas la création de postes suffisants. Quand il y a +4% d’activité dans un hôpital et qu’à la fin la valorisation n’augmente que de 1%, cela créé un décalage progressif.

Nous allons donner de la lisibilité sur le plan budgétaire, ce qui n’a jamais été fait, avec un ONDAM pluriannuel. On s’engage à augmenter les dépenses de 2,3% par an pendant 5 ans. Cela veut dire que l’on sait à combien sera le budget hospitalier d’ici 5 ans et cela permet d’engager des réformes de structure et de sortir d’une logique de politique du rabot.

Il y a un travail qui devra être fait sur l’attractivité des carrières, en ville comme à l’hôpital.

Les tensions dans le secteur hospitaliers sont réelles. Moi j’exerce à l’hôpital, je vois qu’il y a de la souffrance au travail à l’hôpital, alors qu’il y a un très fort attachement de ceux qui y sont employés au service public hospitalier. Nous avons entendu le message et nous ne le traiterons pas avec le mépris avec lequel Fillon a pu répondre aux aides-soignantes. D’autant que mon premier boulot a été aide-soignant

en psycho-gériatrie pendant deux ans, de nuit. C’est un travail très difficile et pas très bien payé.

En ce qui concerne le financement des hôpitaux, comment voulez-vous le revoir ?

Il y aura une réduction de la part de T2A. Cela a été commencé par le gouvernement actuel. La T2A fait sens pour les actes techniques ou reproductibles mais pour un malade de 80 ans, insuffisant cardiaque, diabétique qui vient pour une pneumonie, elle ne veut rien dire. Il vaut mieux diversifier avec des financements au parcours ou à l’épisode de soin.

Vous proposez la vente de médicament à l’unité. Les pharmaciens n’y sont pas favorables. Que leur répondez-vous ?

Beaucoup de Français sont pour. Ils ne comprennent pas pourquoi il y a un tel gaspillage de médicaments. Cela représente 7 milliards d’euros. Oui cela va sûrement coûter de l’argent de passer d’une distribution par boîte à une distribution à l’unité, mais cela va aussi en faire économiser. Sans compter l’impact très fort en termes d’iatrogénie, l’impact environnemental lié au fait que les médicaments se retrouvent dans les eaux usées.

Il y a beaucoup d’avantages liés à la vente à l’unité. Nous allons concerter les professionnels pour voir ce que cela va représenter dans l’exercice au quotidien des pharmaciens et comment nous, puissance publique, nous allons pouvoir les accompagner dans cette démarche.

Comment jugez-vous le bilan de Marisol Touraine ?

Je ne peux pas juger un bilan. J’ai été député de la majorité, j’ai été rapporteur d’un budget de la sécu. J’ai fait partie de la loi de santé. Moi je constate que le déficit de la Sécurité sociale s’est réduit. Je pense que Marisol Touraine, quand elle est arrivée, avait une commande budgétaire qui n’était pas facile. Il y avait un trou de 20 milliards et il fallait être capable d’améliorer notre système pour pouvoir le pérenniser. Quand on mène une politique de santé avec un objectif budgétaire aussi contraint, ça n’est pas évident et on ne peut pas faire tout ce que l’on veut. De ce point de vue-là, je pense qu’elle a eu une action forte. Et je retiendrai surtout son engagement pour la santé publique. Je l’ai vu à travers la loi santé. Elle a porté des choses qui n’étaient pas faciles, comme le paquet neutre ou l’information nutritionnelle. Ça n’était pas facile à porter face aux lobbies. Elle a su imposer les salles de consommation à moindre risque, dont les retours sont positifs. Elle a renforcé l’accès à l’IVG. Je retiens cette image d’une ministre engagée pour la santé publique, qui a été capable de rendre une copie budgétaire que peu de gens peuvent critiquer.

Y-a-t-il des domaines sur lesquels vous auriez agi différemment ?

Il y a beaucoup de choses sur lesquelles nous agirons différemment si Emmanuel Macron est élu président de la République...

A trop vouloir réformer par le haut on perd du temps et on n’emmène pas les professionnels. Je pense qu’il faut réformer à partir des professionnels et à partir des territoires. Expérimenter les parcours de soins, donner plus de liberté aux professionnels pour qu’ils proposent eux mêmes l’organisation qui correspond à leur réalité me semble nécessaire. Je ne dis pas que c’est facile, ni que les administrations sont ravies à cette idée.

Qui est le Dr Olivier Véran ?
Agé de 36 ans, le Dr Olivier Véran est neurologue au CHU de Grenoble-La Tronche. Député de 2012 à 2015 (en tant que suppléant de la ministre Geneviève Fioraso), il a siégé à la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, où il a suivi particulièrement les dossiers santé. Il a notamment été rapporteur du volet prévention de la loi de santé, dans lequel il s’est particulièrement mobilisé contre l’anorexie. Il a également été rapporteur du projet de financement pour la Sécurité sociale de 2015. Il y a défendu notamment la création des hôtels hospitaliers, ainsi que la suppression des franchises médicales pour les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé.
À l’instar de plusieurs députés, il a publié l’utilisation de sa réserve parlementaire et s’est engagé pour le non cumul des mandats. Il est candidat pour les prochaines élections législatives