L’Anticapitaliste Hebdo du NPA

Hebdo L’Anticapitaliste - 360 (24/11/2016) - Plaintes patronales et souffrances salariales

Novembre 2016, par Info santé sécu social

En 2014, la Sécurité sociale a enregistré selon les statistiques1 plus d’un million d’accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), et 898 personnes sont décédées de ces faits. Le nombre d’AT-MP augmente depuis une quinzaine d’année essentiellement dans les secteurs d’aide à la personne : assistantes maternelles, agents d’entretien, aides soignantes… Les femmes, très majoritaires dans ces métiers mal payés, sont les victimes de cette évolution.

Le coût imputé aux entreprises est de 6,5 milliards. Le patronat se plaint depuis 1898, date de la première loi obligeant les employeurs à la réparation des accidents survenus par le fait ou à l’occasion du travail. En 1946, cette disposition a été généralisée à tous les salariéEs et financée par une cotisation sociale uniquement « patronale ». Son taux est modulable en fonction de la taille et du nombre d’AT dans l’entreprise, selon le principe du pollueur-payeur.

« Accident du travail, le mal de dos fait souffrir les entreprises », titrait les Échos du 15 novembre. Il est vrai que les troubles musculo-squelettiques (TMS) explosent, et coûtent aux employeurs un milliard d’euros. Mais les lourdes charges dont ils devraient se soucier ne seraient-elles pas plutôt celles subies par les travailleurs ? Depuis 2013, la branche AT-MP de la Sécu est déclarée excédentaire, mais aucune mesure n’a été prise pour développer la prévention, améliorer les indemnités et rentes, reconnaître l’origine professionnelle d’un plus grand nombre de maladies, notamment les souffrances psychiques.

Le gouvernement préfère « sécuriser » les employeurs...

La loi travail2 réduit les prérogatives déjà insuffisantes des CHSCT dans leur rôle d’alerte et de prévention. La délégation unique du personnel (fusion CE-DP) est étendue au CHSCT et ouverte aux entreprises de 300 salariéEs (auparavant 200). Les sujets relevant du CHSCT pourront n’y être traités que quatre fois par an.

Les moyens de la médecine du travail sont diminués (6 000 médecins en 2007, 5 500 en 2016), et les visites médicales d’embauche et de suivi individuel sont réservées aux travailleurs occupant des postes présentant des risques particuliers. L’indépendance (relative) des médecins est mise en cause par des patrons qui n’hésitent pas à contester les certificats médicaux devant le conseil de l’ordre. En cas d’inaptitude à un poste, l’employeur n’est plus dans l’obligation de proposer un reclassement et peut licencier.

Les excédents de la branche AT-MP dont se vante Marisol Touraine, s’expliquent par le refus d’un nombre important d’employeurs d’effectuer la déclaration, ainsi que par la crainte des salariéEs, ou leur méconnaissance du droit dans ce cas de le faire eux-même. Les CPAM ont de moins en moins de moyens pour effectuer les enquêtes. Sur tout le territoire, seuls 296 agentEs sont affectés à cette activité. La formation des inspecteurs est réduite de 9 mois à 3,5 mois, alors qu’ils sont de plus en plus souvent confrontés lors des enquêtes dans les entreprises à des DRH formés pour les contrer et à des avocats spécialisés. La chute des effectifs est généralisée dans tous les services (gestion, prévention...), cela alors que les risques psycho-sociaux, les TMS et les suicides se développent.

Des mesures d’urgence !

La médecine du travail doit devenir un service public sans aucun lien de dépendance, notamment salariale, avec les employeurs. Elle doit retrouver toutes ses prérogatives, bénéficier d’un droit d’investigation réel dans les entreprises.

Les DP, CE, CHS-CT doivent disposer du droit de veto sur toutes les décisions des patrons qui impactent les salariéEs, en particulier leur santé.

Des moyens plus importants doivent être attribués aux services de santé au travail et aux organismes de Sécu, notamment pour le contrôle des employeurs et la prévention.

Correspondants Sécurité sociale