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Infirmier.com - Des étudiants en soins infirmiers trop nombreux ?

Novembre 2016, par Info santé sécu social

03.11.16 par Aurélie TRENTESSE.

En 2014, 31 300 étudiants étaient inscrits en première année de formation en soins infirmiers, alors qu’ils étaient 28 500 en 2004, selon un document publié par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) le 3 novembre 2016. De tels quotas sont-ils raisonnables alors que certaines régions envisagent de fermer des établissements en raison d’un trop grand nombre de soignants sans emploi ?

Dans son dernier rapport publié le 3 novembre 2016, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) indique que 31 300 personnes sont inscrites en première année d’étude en soins infirmiers en 2014, soit 2 800 de plus qu’en 2004. Les quotas sont relativement stables depuis 2012 et avoisinent les 31 000 places offertes alors que de nombreux infirmiers rencontrent des difficultés à trouver un emploi et qu’un Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) et plusieurs Institut de formation d’aides-soignants (IFAS) de la région Normandie pourraient fermer en raison notamment d’un nombre de soignants au chômage trop conséquent.

Vers la fermeture de l’IFSI de Vire et de huit IFAS ?

Le projet de fermeture de plusieurs établissements de formation de la Région Normandie a été annoncé le 24 octobre 2016 par David Margueritte (LR), vice-président en charge de la formation et du développement des compétences. Sont ainsi concernés l’IFSI de Vire, et huit IFAS situés à Alençon Mamers, Argentan, Bernay, Caen EPSM, Honfleur, Le Havre Coty, Coutances et Saint-Martin-des-Champs. La Région Normandie a en effet vu son quota d’étudiants en soins infirmiers diminuer de 122 places. “Une école devra fermer sur les 17 que compte la Normandie”, indique David Margueritte. La formation des infirmiers serait ainsi maintenue à Flers. Une décision que contestent les étudiants infirmiers de Vire estimant que leur “institut de formation en soins infirmiers est menacé. Mais pas seulement, l’hôpital de Vire également”. “Nous sommes en colère face à cette annonce. Nous avons fait le choix d’intégrer cette école et chacun de nous va se battre pour la conserver. L’école de Vire c’est tout d’abord une petite école, trois promotions d’étudiants : 120 ESI au total et 30 élèves aides-soignants. Alors oui, c’est une petite école, mais c’est une école de qualité”, soulignent les ESI. De son côté, la Fédération nationale des Étudiants en Soins infirmiers (Fnesi) déplore qu’aucune concertation n’ait été menée sur cette question auprès des acteurs concernés. Elle dénonce“ l’absence totale de dialogue social pour une décision dont les étudiants sont les premiers tributaires”. L’organisation est prête à discuter avec le nouveau Président de la Région, Hervé Morin, afin de “trouver une issue favorable correspondant aux enjeux d’intégration universitaire de la formation et de professionnalisation des étudiants”. Cette fermeture serait également la conséquence d’un nombre d’infirmiers sans emploi en progression. La région signale ainsi que 850 infirmiers seraient au chômage. “Il est de notre responsabilité de ne pas former des infirmiers qui seront au chômage demain”, explique David Margueritte. En ce qui concerne le projet de fermeture des instituts de formation d’aides-soignants, il précise que la Région ne peut plus“ assurer financièrement un tel maillage territorial”.

“Selon les chiffres de la région Normandie, le chômage dans la profession infirmière a progressé de 92 % au cours des six dernières années.

Une décision qui ne surprend pas les infirmiers

Sur le forum d’Infirmiers.com, la décision de la région Normandie ne semble guère surprendre la communauté. Ainsi, Jo_Bis, cadre de santé, estime que “c’était prévisible” et pense qu’il s’agit du “début d’une longue liste”. “Trop d’IDE se retrouvent au chômage après le DE, voire bien après”, constate-t-elle. “Et surtout, les conseils régionaux dont les finances sont au plus bas ne veulent plus financer les études de futurs chômeurs”. Pour Lenalan, infirmière diplômé d’État, “c’est la seule solution à notre problème de chômage, et revenir à un nombre plus raisonnable de places dans les établissements qui ne ferment pas, c’est-à-dire réduire considérablement les effectifs.... On est beaucoup trop à sortir diplômés tous les ans”. Patt, étudiante en soins infirmiers, est du même avis. “Il n’y a plus qu’à faire la même chose dans les régions voisines/la France. Même sans fermer un IFSI entier, réduire les promotions serait déjà pas mal”, considère-t-elle. Et d’ajouter “sans parler chômage, on est tellement d’ESI qu’on a un choix de stage vraiment moyen dans certains IFSI. Des personnes de ma promotion ont fait trois stages sur sept en EHPAD. Autant vous dire qu’on ne se sent pas du tout apte à prendre un poste à la fin de l’année au vu de nos maigres expériences !”

Pour Nathalie Depoire, présidente de la Coordination nationale infirmière (CNI), la fermeture des établissements n’est pas la solution la plus pertinente à envisager. “La situation est mouvante”, assure-t-elle. “Il n’y a pas si longtemps, il y a eu une pénurie. Et il va y avoir, dans les prochaines années, beaucoup de départs à la retraite”. D’autant que bien que certains infirmiers soient au chômage, paradoxalement, les conditions de travail ne cessent de se détériorer en raison d’une charge de travail accrue au sein des établissements de santé. Ainsi, le problème ne se situerait-il pas à un autre niveau ?

En 2014, des étudiants infirmiers mobiles aux profils diversifiés
• 328 établissements dispensent une formation en soins infirmiers ;
• 19 à 258 personnes étudient en première année de soins infirmiers par promotion, soit une moyenne de 96 ESI ;
• 22 % des nouveaux étudiants ont changé de région pour suivre leurs études d’infirmiers, contre 17 % en 2004 ;
• 37 % des ESI de Poitou-Charentes et 35 % de ceux du Limousin sont issus d’autres régions ;
• 83 % des étudiants infirmiers sont des femmes ;
• 15,6% des ESI de première année travaillaient auparavant dans le secteur sanitaire ou médico-social ;
• 32 % des ESI ont suivi une formation préparatoire avant leur entrée en formation ;
• les bacheliers nouveaux entrants de première année sont principalement titulaires du baccalauréat scientifique (33%), suivis des titulaires du baccalauréat sciences et technologies de la santé et du social (26%), économique et social (18%), littéraire (7%) et sciences et technologies du management et de la gestion (7%) ;
• 27 213 étudiants en soins infirmiers ont présenté le diplôme, et 25 539 l’ont obtenu, soit un taux de réussite de 94 % ;
• le taux d’abandon est estimé à 1 241 entre la première et la deuxième année d’études, et 930 entre la deuxième et la troisième année d’études.

Pour en savoir plus  : drees.social-sante.gouv.fr

Aurélie TRENTESSE