Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

JIM - Coronavirus : panique à bord ?

Février 2020, par Info santé sécu social

Genève, le mardi 18 février 2020

Bien que l’épidémie de coronavirus suscitât depuis déjà plusieurs semaines l’extrême vigilance des autorités médicales du monde entier, le paquebot de croisière Westerdam a entamé sa traversée le 1er février en partant de Hong Kong. Il a recensé depuis 60 infections et un décès.

Malgré le contexte sanitaire, les passagers ne se doutaient probablement pas que leur voyage allait se heurter à de si nombreux obstacles. Aucune des escales prévues n’a en effet pu avoir lieu en raison des refus successifs des pays concernés, craignant tous une potentielle contagion : le Japon, Taïwan, les Philippines, l’île américaine de Guam et la Thaïlande ont tour à tour empêché le bateau d’accoster. Le Cambodge a finalement fait exception jeudi dernier. Se réjouissant de cette autorisation presque inespérée, les responsables du navire encouragés par les autorités cambodgiennes ont fait preuve d’une légèreté impensable lors du débarquement. Si des examens médicaux ont été réalisés, ils n’ont pas concerné tous les passagers. Pire les 1 200 touristes ont été encouragés par le Premier ministre Hun Sen, se moquant « de la maladie de la peur », à découvrir les charmes des plages cambodgiennes et les mystères de sa capitale.

Une quarantaine et des restrictions de voyage tardives
Cependant la promenade a tourné court quand samedi, une passagère américaine de 83 ans a été diagnostiquée positive à Kuala Lumpur (Malaisie). Cette annoncé a été le coup d’envoi d’une enquête dantesque, employant des méthodes policières, pour retrouver les 1 200 passagers débarqués et retracer leur parcours complexe, tandis que les 233 passagers et 747 membres d’équipage encore à bord sont désormais l’objet d’une quarantaine stricte et de contrôles médicaux.

Immédiatement, après la confirmation de la contamination de la touriste américaine, la Thaïlande a annoncé refuser l’entrée sur son territoire aux croisiéristes. L’annonce est cependant tardive puisque le royaume a probablement déjà été traversé par des voyageurs. De son côté Singapour a placé en quarantaine deux de ses ressortissants qui se trouvaient à bord et a prévenu qu’elle interdisait aux personnes présentes sur le bateau de transiter par son territoire. L’ensemble des pays voisins aiguisent aujourd’hui leur vigilance.

Quatorze cas positifs parmi les 300 rapatriés américains du Diamond Princess
Cette très inquiétante dissémination potentielle du virus fait écho au sort des passagers du Diamond Princess. Alors que la quarantaine se poursuit sur le bateau, les contaminations continuent également à être recensées. Ainsi, alors que les autorités américaines organisaient le rapatriement de 300 de leurs ressortissants présents à bord le 16 février, elles ont été informées que quatorze d’entre elles, alors asymptomatiques, avaient été testées positives deux ou trois jours auparavant. Des mesures d’isolement immédiates ont été prises, mais le rapatriement a été mené à bien, avant la mise en quarantaine des passagers infectés dont certains ont développé des symptômes pendant le transfert. Parallèlement, on annonçait qu’un deuxième cas positif été identifié parmi les quatre passagers français du paquebot.

L’OMS menée en bateau ?
La situation de ces bateaux interroge d’abord sur la question de la durée de la quarantaine ; différents signaux suggèrent en effet de possibles incubations plus longues que 14 jours. Au-delà, le nombre de personnes transportées par ces paquebots et la multiplicité des pays d’origine de ces touristes soulèvent légitimement, notamment après l’affaire du Westerdam, la question de la suspension de ce type de croisières. Pourtant, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) s’y montre aujourd’hui hostile. « Les mesures doivent être proportionnées à la situation, prises sur la base de preuves et d’éléments de santé publique » a déclaré hier le directeur de l’OMS, Tedros Adhanom Ghevreyesus interrogé sur l’opportunité d’interdire les croisières.

La piste de la plasmaphérèse
L’optimisme de l’OMS pourrait être lié à son observation de l’évolution de la situation en Chine où le nombre de nouvelles contaminations (1 886) et de décès (98) est au plus bas depuis le début du mois de février pour atteindre au total près de 72 300 cas et 1 900 morts. En outre, les nouveaux décès concernent essentiellement la province du Hubei (93) où les mesures d’isolement se sont encore durcies ces derniers jours. Ces conditions drastiques ont un prix : l’économie chinoise souffre de plus en plus et les entreprises étrangères se montrent très pessimistes.

Parallèlement, le secteur de la santé et des technologies médicales connaît pour sa part une activité exponentielle. Selon Nature, quelques 80 essais cliniques ont en effet été lancés. Les plus prometteurs concerneraient ceux évaluant l’efficacité de la technique classique de la perfusion de plasma. D’ailleurs, un appel a été lancé en Chine aux patients guéris pour qu’ils donnent leur sang avec pour objectif « d’en extraire le plasma pour soigner les malades qui sont encore dans un état grave ». Cette piste est étudiée avec intérêt non seulement en Chine mais également dans le reste du monde. Ainsi, le directeur des programmes d’urgence de l’OMS, Michael Ryyan, est tout à la fois enthousiaste et vigilant. « Nous allons devoir examiner comment le plasma est utilisé, quels sont les patients les plus susceptibles de bénéficier de son utilisation et à quel moment de la maladie cette pratique apporte un bénéfice » a-t-il signalé hier.

Aurélie Haroche