Environnement et facteurs dégradant la santé

JIM - Des personnes s’estimant victimes de la pollution atmosphérique attaquent l’Etat en justice

Mai 2019, par Info santé sécu social

Paris, le mercredi 29 mai 2019 -

Le tribunal administratif de Montreuil a examiné ce mardi la plainte d’une mère et de sa fille qui attaquent l’État en justice pour n’avoir pas pris les mesures nécessaires pour lutter contre la pollution atmosphérique. Une première en France.

Selon différentes estimations, qui présentent cependant des limites épidémiologiques et statistiques, la pollution serait responsable de près de 48 000 morts prématurées par an en France. Si la situation s’est significativement améliorée ces 15 dernières années, des pics de pollution et des dépassements des seuils sanitaires d’expositions aux polluants fixés par l’Union Européenne sont encore régulièrement constatés dans les grandes villes. Certains considèrent que l’État ne fait pas assez pour réguler ce problème majeur de santé publique. Des personnes victimes de maladies respiratoires supposément en lien avec la pollution atmosphérique ont donc décidé d’assigner l’État en carence fautive.

Ce mardi, le tribunal administratif de Montreuil entendait la plainte de deux d’entre elles, une mère et sa fille de 16 ans qui habitaient à Saint-Ouen près du périphérique parisien. Souffrant de problèmes respiratoires depuis de nombreuses années (une bronchite chronique pour la mère, des crises d’asthme pour la fille), elles ont choisi de déménager à Orléans, après différentes recommandations médicales. Aujourd’hui, elles accusent l’État de n’avoir pas fait assez pour limiter l’ampleur du pic de pollution de l’hiver 2016, le pic le plus long et intense en France depuis 10 ans. Selon les plaignantes, l’État aurait dû adopter une « réglementation plus protectrice de sa population ». Elles estiment également que les autorités n’ont pas pris toutes les mesures à leur disposition (et ont notamment trop tardé à mettre en place la circulation alternée) tandis que les mesures prises étaient inappliquées ou inefficientes.

Le rapporteur enclin à condamner l’État
Si une cinquantaine de personnes mèneraient actuellement des recours similaires contre l’État, c’est la première fois qu’une telle action est entendue par un tribunal. Sébastien Vray, fondateur et porte-parole de l’association Respire, qui lutte depuis 8 ans contre la pollution atmosphérique et accompagne les requérants, s’est félicité de cette première.

Les plaignants et leurs soutiens ont de quoi être optimistes, puisqu’à l’audience, le rapporteur public a demandé au tribunal de retenir la responsabilité de l’État, estimant que le plan de protection de l’atmosphère (PPA) mis en place n’avait pas permis que « la période de dépassement des valeurs limites » des principaux polluants « soit la plus courte possible ». Le rapporteur a cependant également demandé une expertise médicale pour s’assurer que les troubles respiratoires des plaignants étaient bien liés à la pollution atmosphérique. La décision a été mise en délibéré au 18 juin.

Ce n’est pas la première fois que l’État français est épinglé pour son inaction face à la pollution de l’air. En 2017, le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative, avait enjoint l’État de prendre des mesures plus efficaces de lutte contre la pollution. Et l’an dernier, la Commission Européenne avait assigné devant la justice de l’UE 6 États, dont la France, pour non-respect des normes de qualité de l’air.

Quentin Haroche