Politique santé sécu social de l’exécutif

JIM - Réponse du gouvernement à la crise pédiatrique : des efforts …mais peut mieux faire

Novembre 2022, par Info santé sécu social

Paris, le jeudi 3 novembre 2022

La forme et le fond.

Face à la crise que traverse la pédiatrie hospitalière française, qui se voit submergée depuis plus de quinze jours par une épidémie de bronchiolite (habituelle, prévisible et prévue), les soignants attendaient du gouvernement qu’il soigne sa réponse tant sur la forme que sur le fond. La journée d’hier a été en la matière si ce n’est décisive, en tout cas une étape importante.

Reconnaissance de la problématique… mais pas de sa responsabilité

Sur la forme, les discours tendant à minimiser la situation et à en appeler à la responsabilité des Français avaient quelque peu exaspéré le Collectif pédiatrie, à l’origine d’une tribune parue dans le Parisien le 21 octobre et qui a été signée par 7000 professionnels de santé. Hier, le ton a changé et la délégation qui a été reçue par François Braun a su apprécier : « Le ministre semble reconnaître la problématique actuelle de la pédiatrie ».

Cependant les médecins et infirmiers qui doivent chaque jour faire face aux transferts de nourrissons parfois à des centaines de kilomètres de chez eux, hospitaliser dans des conditions indignes de notre pays des enfants dans des box d’urgence attendent plus : une véritable reconnaissance de la part du gouvernement de sa responsabilité.

400 millions d’euros : pour qui et quand ?

Sur le fond, c’est-à-dire les réformes et les aides budgétaires, les 150 millions d’euros annoncés la semaine dernière pour l’hôpital en général avaient quasiment été perçus comme une insulte face à l’ampleur des besoins. La copie d’hier a été observée avec un peu plus d’indulgence, même si les propositions du gouvernement sont considérées par les protestataires comme encore très insuffisantes.

François Braun a ainsi promis le déblocage d’une enveloppe de 400 millions d’euros (incluant les 150 millions déjà avancés), mais une fois encore, rien n’a été précisé quant à la destination de cette manne supplémentaire. Le Collectif interroge et commente : « Concerne-t-elle l’ensemble des services hospitaliers ou la pédiatrie en particulier ? Quelle est son orientation ? Dans quels délais et sur quelle période serait-elle déployée ? Dans tous les cas, il s’agit d’une enveloppe ponctuelle qui ne permet pas un engagement pérenne des soignants et elle est totalement insuffisante pour mettre en place des ratios soignants/patients qui est aujourd’hui la seule solution pour arrêter la fuite du personnel soignant ».

Primes et majoration des heures de nuit : des rustines qui ne peuvent palier les vrais enjeux

Le ministre de la Santé a également annoncé le versement de la prime de soins critiques à tous les soignants exerçant en réanimation et unités de surveillance continue pédiatriques, ce qui constituait une attente forte des professionnels concernés. Cependant, le Collectif insiste sur le fait qu’elle ne peut être qu’une première étape et que le véritable enjeu est une augmentation des salaires : il attend donc que se concrétise l’affirmation du ministre des Finances Bruno Le Maire qui a assuré hier être tout à fait en accord avec une revalorisation des rémunérations des personnels paramédicaux dans les services de pédiatrie.

De même, concernant le doublement de la rémunération des heures de nuit jusqu’au 31 mars promise par François Braun, le collectif met en garde : « Il s’agit d’une mesure d’urgence, probablement nécessaire dans la situation actuelle mais qui contribuera à augmenter la charge pesant sur les soignants, contribuant à court terme à leur épuisement et à leur départ de l’Hôpital public ».

Un nouveau-né à plus de 200 kilomètres de ses parents pour être soigné

D’une manière générale, le Collectif regrette que le ministre ne se soit pas montré plus précis en ce qui concerne les mesures structurelles à prendre. « Si la porte est entrouverte, ces mesures ne sont en aucun cas de taille à permettre la survie de la pédiatrie et l’arrêt des soins dégradés à nos enfants tels que nous les vivons tous les jours », conclut le groupe de praticiens.

Les médecins continuent en effet à témoigner tous les jours des difficultés qu’ils rencontrent. A l’hôpital Antoine Béclère (AP-HP), le Dr Jérémy Do Cao raconte par exemple sur Twitter : « On a envoyé un nouveau-né de 11 jours prendre l’hélicoptère sans ses parents pour aller à Caen avoir des soins adaptés », ou encore : « Les équipes des urgences pediatriques craquent, hospitalisation sur des fauteuils, 10 sur 6 lits d’UHCD cette nuit dont 5 enfants en oxygène à haut débit aux urgences ».

Catastrophe aux Etats-Unis

Cette situation ne concerne pas seulement la France. De l’autre côté de l’Atlantique, les services de pédiatrie sont également submergés, confrontés à une importante épidémie de bronchiolite : ainsi près d’un nourrisson de moins de six mois sur 500 a été hospitalisé pour une infection à VRS depuis début octobre, selon les Centres de contrôle des épidémies.

Aurélie Haroche