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JIM - Souffrance des médecins hospitaliers : des chiffres et une tragique illustration

Février 2021, par Info santé sécu social

Paris, le mardi 23 février 2021

Alors que l’Observatoire de la souffrance au Travail (OSAT) d’APH (Action praticiens Hôpital) publie ses dernières données sur la souffrance au travail des médecins hospitaliers, ce phénomène est tragiquement illustré par le quatrième suicide d’un interne recensé depuis le début de l’année.

Sur la plateforme en ligne du syndicat, 57 « fiches de souffrance » ont été collectées en 2020 (37% de CHU, 61% de CH, 2% d’EPSM).

On compte presque deux fois plus d’hommes que de femmes (63% vs 37%) d’un âge médian de 53 ans (84% de praticien hospitalier temps plein, temps de travail médian de 48 h).

Les chefs de service pas épargnés
Les déclarants exerçaient dans 25 spécialités différentes et dans 32 % des cas une fonction de chef de service ou de chef de pôle. Les spécialités les plus impactées sont l’anesthésie-réanimation, la médecine d’urgence, la biologie et la gynécologie-obstétrique.

Les difficultés éprouvées par ces praticiens ayant fait la démarche de signaler leur souffrance se manifestaient par des troubles du sommeil chez 86% des médecins, des troubles anxio-dépressifs évoqués dans 66% des déclarations (avec nécessité d’un traitement anxiolytique ou anti-dépresseur dans 30% des cas) et des troubles alimentaires (37%). Un tiers de ces situations ont entrainé un arrêt de travail de plus de deux semaines. Des idées suicidaires sont présentes chez 7% des sujets et une addiction chez 9% (60% à l’alcool, 20% au tranquillisants, 20% aux antalgiques).

L’arbitraire hospitalier en cause
Les principales causes identifiées par les déclarants sont un « arbitraire flagrant lié à la gouvernance dans l’établissement et une présomption de harcèlement moral au travail » (51% des déclarations), « une désorganisation grave et chronique du service » (46%), « des déficits en personnels médicaux » (44%). En outre, notons que 26% déclarent souffrir de la désorganisation liée à la crise sanitaire et 16% d’une insuffisance de moyens de protection individuels.

Le mépris
Cette nouvelle enquête fait un focus sur les mécanismes de harcèlement moral dans les établissements de santé marqué par des attitudes de mépris dans 83% des cas, des dévalorisations implicites et sournoises (79%), des déconsidérations en public (72%), une dévalorisation explicite du travail (55%), un isolement et une mise à l’écart du groupe (55%), des menaces verbales (48%), un refus de toute communication (38%), des insultes en public (21%), des menaces physiques (7%) et des agressions physiques (3%).

Signe qu’il reste encore beaucoup à faire pour informer les praticiens des recours existant : seuls 9% ont utilisé les plateformes téléphoniques disponibles pour faire part de leur souffrance, alors qu’il s’agit de praticiens pourtant sensibles à la nécessité de signaler leurs difficultés, comme en témoigne leur recours à l’Observatoire.

Tragique illustration
Comme nous l’évoquions, ces différentes données ont été tragiquement illustrées par le suicide, à Reims, d’un interne en médecine générale. Il s’agit du quatrième suicide d’un interne depuis le début de l’année.

Sur les réseaux sociaux, sa sœur pointe du doigt son état de détresse, lié aux pressions subies dans le cadre de ses études.

L’InterSyndicale Nationale Autonome Représentative des Internes de Médecine Générale (ISNAR-IMG) s’interroge : « Combien de drames faudra-t-il encore » et demande à être reçue en urgence par les ministres de la santé et de l’enseignement supérieur.

F.H.