L’Anticapitaliste Hebdo du NPA

L’Anticapitaliste Hebdo : Vaccin anti-paludisme : historique ?

Octobre 2021, par infosecusanté

L’Anticapitaliste Hebdo : Vaccin anti-paludisme : historique ?

Frank Prouhet

Hebdo L’Anticapitaliste - 586 (14/10/2021)

Le Mosquirix de la multinationale GSK est le premier vaccin contre le paludisme. Un progrès historique, selon l’OMS, contre une des maladies les plus mortelles de l’histoire de l’humanité. Pas si simple !

Dans les années 1990, le paludisme faisait près de 2 millions de morts chaque année. Aujourd’hui on parle d’environ 400 000 morts, essentiellement en Afrique sub­saharienne. Les femmes enceintes, mais surtout les enfants de moins de cinq ans paient le plus lourd tribu. Un enfant meurt du palu toutes les deux minutes !

« À la croisée des chemins » ?
Pourtant « la lutte contre le paludisme est à la croisée des chemins », selon les propres termes de l’OMS. Depuis 2015, plus de réelle avancée. Pire, en 2018, 3,5 millions de cas supplémentaires ont été enregistrés. Les causes sont connues. D’abord le manque de financement. Selon l’OMS, « il s’est élevé à 3 milliards de dollars en 2019, bien en-deçà de l’objectif des 5,6 milliards ». Si l’on y ajoute l’apparition de résistances, pour des traitements de troisième génération déjà cinq fois plus chers, la diffusion de nouvelles espèces de moustiques, plus adaptés aux milieux urbains, et le réchauffement climatique qui favorise le paludisme avec la hausse des températures et des précipitations, la lutte contre le paludisme est bien à la croisée des chemins ! Et le Covid-19 a aggravé la situation. Les bailleurs internationaux ont détourné une partie du fonds de lutte contre la tuberculose, le VIH et le paludisme pour financer la lutte anti-covid. Les centres de santé sont moins fréquentés, les budgets en baisse.

Alors le vaccin permettra-il un progrès historique ? Historique, l’efficacité ne l’est certainement pas. Avec seulement 29 % de réduction des formes graves pour quatre doses, dans l’essai Ghana, Kenya et Malawi, elle est très inférieure aux objectifs fixés par l’OMS. Même si une étude de la London School of Hygiene and Tropical Medicine montre une réduction de 70 % des hospitalisations et des morts en association avec des traitements de dernière génération. Si l’OMS a validé le vaccin avant la fin des essais cliniques en population réelle, prévue pour 2023, c’est pour limiter la remontée du paludisme, pas pour sonner sa fin, un objectif affirmé… depuis 1969. Et GSK n’a pas envie de se faire doubler par le vaccin d’Oxford Université, encore en phase II, mais qui affiche un taux d’efficacité de 70 %…

Six mois pour le covid, un demi-siècle pour le palu ?
Pourquoi la découverte d’un vaccin anti-paludisme prend-elle autant de temps ? La première raison tient aux difficultés à trouver un modèle vaccinal contre des parasites à l’extrême variabilité, selon les stades, les organes infectés. Mais pas seulement. Le Mosquirix est bien le premier vaccin anti­parasitaire validé pour les humains, mais il en existe déjà pour les animaux ! L’agro­business et ses élevages industriels, c’est un marché solvable… Pas le paludisme, maladie de pauvres, dans les pays pauvres. Il suffit de voir les dizaines de milliards de dollars d’argent public qui ont coulé à flot dans les caisses des Pfizer, Moderna, AstraZeneca pour financer les vaccins anti-covid, comparés avec les pauvres 200 millions de dollars que la fondation Bill et Mélinda Gates a investis, en 20 ans, dans le programme Malaria Vaccine Initiative, dont elle est un des principaux bailleurs. Reste qu’il faudra financer le programme de vaccination, et que pour le déployer, il faut un système de santé qui, en Afrique, est défaillant. Un monde à changer !