Environnement et facteurs dégradant la santé

L’Humanité - Derrière la santé environnementale, la logique du profit

Avril 2018, par Info santé sécu social

Les études sur la santé et l’environnement se multiplient, témoignant d’une préoccupation grandissante à l’égard des liens entre pollutions environnementales et maladies. Mais des freins économiques et politiques persistent.

Situé entre la mer Méditerranée et l’Etang de Berre, proche d’une des plus grandes zones industrialo-portuaires, Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) est l’un des territoires les plus pollués de France. C’est de là, et pour cette raison, que s’élancera demain, mardi 1er mai, la marche « Vérité et justice » pour la santé environnementale, organisée par une trentaine d’ONG pour inciter l’État à agir plus fortement sur les questions de santé environnementale. Baptisée « Les cobayes lancent l’alerte », elle reliera Fos-sur-Mer à Paris (le 30 juin), puis Bruxelles (le 1er juillet), au gré d’étapes qui déclineront différentes problématiques : pollution des sols des sites industriels à Marseille, malbouffe aux Abrets, nucléaire à Saint-Vulbas, pollution de l’air à Chambéry, perturbateurs endocriniens à Clermont-Ferrand…

Les sources de pollution sont aujourd’hui connues, c’est d’ailleurs pourquoi les risques représentés par les moteurs diesel, les pesticides, les organismes génétiquement modifiés, les antennes relais, les substances chimiques, etc. trouvent de plus en plus d’écho au sein de la société civile. Et pour cause : alors que les maladies infectieuses ont largement baissé au XXe siècle, les maladies chroniques, elles, explosent littéralement. Cancers, allergies, autisme, maladies auto-immunes, infertilité, perturbations hormonales… A l’instar de certains cancers, certains effets liés à ces pollutions sont différés. Mais certains problèmes de santé n’apparaissent qu’après un certain temps d’exposition alors que d’autres effets sont possibles à de très faibles doses (comme c’est le cas pour les perturbateurs endocriniens). D’où la complexité du problème !

Les scandales de l’amiante ou des victimes des pesticides (affaires Triskalia) ont sans nul doute activé cette prise de conscience. Et si ces questions de santé environnementale commencent à faire l’objet d’une prise en charge publique au sein de nouveaux dispositifs consacrés à la gestion des risques (Plan national santé environnement, études de l’Inserm et de l’Anses…), les freins notamment économiques demeurent réels. Le poids des lobbies agroalimentaires, chimiques, pharmaceutiques, qui ne répondent qu’à la seule logique du profit à tout prix, fait primer, en matière de santé publique, les intérêt de l’industrie sur l’intérêt général. Pire, le lien entre climat et santé est encore aujourd’hui contesté par ceux qui tirent des revenus substantiels des énergies fossiles et qui ne veulent pas que ce lien soit établi…

Le fait qu’il y ait de la pollution et qu’elle ait des effets sur leur santeì ne fait plus guère de doute. La lutte pour la santé environnementale, à ce stade, doit donc passer par une connaissance plus fine des facteurs et des enjeux environnementaux à l’origine des impacts sur la santé et l’environnement par le biais d’études indépendantes. Pour savoir quel est le niveau de pollution à tel endroit, quels sont les risques réels, ce que pourrait-on mettre en place pour limiter ces pollutions…. Et reconnaitre enfin les responsabilités des pollueurs… Sauf que les services de l’Etat ne sont pas toujours disposés, ni même en mesure de donner des réponses. Même s’il a forcé l’état à prendre en compte les victimes, le scandale de l’amiante, ainsi, n’a pas suffi à rendre transparente l’activité des usines et les risques qu’elle implique pour les riverains. Partout, des citoyens luttent pour accéder à l’information et avoir leur mot à dire dans la gestion de la pollution pendant, mais aussi après l’activité. Ajoutez à cela un gouvernement qui, cerise sur le gâteau, a supprimé les CHSCT, ces instances d’alerte concernant la santé et l’exposition aux risques dans l’entreprise…

Las d’être empoisonnés par leur travail, asphyxiés par l’air, intoxiqués par ce qu’ils mangent, les « marcheurs » pour la santé environnementale entameront cependant leur croisade avec une bonne nouvelle : vendredi, l’Union européenne a décidé de bannir trois néonicotinoïdes (pesticides) jugés dangereux pour les abeilles au nom de la défense de la biodiversité et de l’environnement.

Alexandra Chaignon
Rubrique Une planète et des hommes