Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

L’Humanité - Pourquoi un couvre-feu serait hypocrite et contre-productif

Octobre 2020, par Info santé sécu social

Mise en place en Guyane, mais aussi dans plusieurs grandes villes allemandes, la mesure pourrait être annoncée par le président, ce soir, notamment en Île-de-France.

Emmanuel Macron va-t-il décréter un « couvre-feu Covid », ce mercredi soir  ? Interrogé en amont de l’allocution présidentielle, le gouvernement bafouille : « Tout est envisageable, très honnêtement, tout est sur la table, rien n’est à exclure »,esquive par exemple Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté. Toujours est-il que, au sommet de l’État, l’idée est sur la table, notamment dans les zones les plus contaminées comme en Île-de-France. Paris pourrait donc imiter Berlin, Francfort et Cologne. Les trois villes allemandes ont instauré un couvre-feu le 10 octobre, qui doit se maintenir au moins jusqu’au 31. Entre 22 heures et 6 heures, tous les établissements doivent fermer, à l’exception des pharmacies et des stations-service. Objectif : désinciter aux rassemblements et déambulations nocturnes.

En France, une telle mesure est déjà en vigueur hors métropole. En Guyane, un couvre-feu avait été imposé dès le 25 mars, puis renforcé à partir du mois de juillet. Le dispositif avait été ainsi étendu au week-end, avec un couvre-feu en journée pour certaines communes comme Cayenne (claquemurée du samedi midi au lundi matin, jusqu’à la fin août).

Bref, un confinement qui ne dit pas son nom. Et surtout, réellement peu efficace, voire contre-productif. Si le préfet argue que « cela évite des contacts sociaux quelquefois alcoolisés, une possibilité de clusters »,selon plusieurs sources sur place, le couvre-feu, surtout lorsqu’il était le plus contraignant, s’est traduit par une concentration de la population sur des plages horaires réduites. À Cayenne, par exemple, on observait des queues impressionnantes à l’entrée des commerces, en fin d’après-midi et en début de week-end. De plus, instaurer un couvre-feu participe de l’idée fausse selon laquelle les contaminations se font d’abord dans les lieux de sociabilité – bars, restaurants – et en soirée. Or, selon les données de Santé publique France, les principaux foyers de contamination demeurent les entreprises privées ou publiques (25 % des clusters identifiés au 8 octobre), suivies des écoles et des universités (21 %) et, enfin, le milieu familial élargi et les rassemblements privés (17 %).

Une hypocrisie qui n’a pas échappé aux députés de l’opposition. « Qui comprendrait l’efficacité d’une mesure qui dirait aux gens “vous rentrez chez vous tous les soirs à telle heure mais, dès le lendemain matin, vous pouvez continuer à vous entasser dans les transports en commun pour aller au travail  ? ” » interroge l’insoumis Adrien Quatennens depuis l’Assemblée.

par Cyprien Caddeo , Florent Le Du ,