L’Anticapitaliste Hebdo du NPA

La tirelire du système de retraite est archi pleine

Octobre 2022, par infosecusanté

La tirelire du système de retraite est archi pleine

Commission santé sécu social du NPA

Hebdo L’Anticapitaliste - 631 (06/10/2022)

Le rapport du COR de 2022 indique que si l’on tient compte de l’ensemble des réserves et dettes existantes dans les différents régimes, et dans le fonds de réserve des retraites (FRR) « qui a pour mission d’investir et d’optimiser le rendement des sommes que lui confient les pouvoirs publics en vue de participer au financement des retraites », il y a 127,4 milliards d’euros de réserves nettes dans le système (déficits déduits). En termes diplomatiques, la Cour des comptes regrette que « les caisses de retraite n’aient pas utilisé leurs réserves de façon optimale pendant la première vague du Covid 19 au printemps 2020 […] alors que les caisses manquaient de ressources ». Le déficit était de 10 milliards et le fonds de réserve se montait en fin d’année à 164,3 milliards ! Le Premier ministre Édouard Philippe s’attelait à instaurer la retraite par points « afin de réformer en profondeur le système ». Jusqu’à présent « la politique d’investissement doit viser à optimiser le rendement des placements […] et, à compter de 2025, le FRR versera chaque année à la CADES (Caisse d’amortissement de la dette sociale) 1,45 milliard d’euros au titre du financement de l’amortissement de cette dette. »
Le CSR à la botte du pouvoir

Commission santé sécu social du NPA
Hebdo L’Anticapitaliste - 631 (06/10/2022)
Deux organismes officiels se penchent sur les retraites, le COR et le CSR (Comité de suivi des retraites). Le CSR est composé de deux femmes et deux hommes, « aux compétences reconnues en matière de retraites », et d’un président, nommé en Conseil des ministres. Le CSR est chargé de rendre chaque année « un avis public portant sur les objectifs financiers et sur les objectifs d’équité assignés à notre système de retraites ». Il s’appuie sur les projections du COR. Ainsi il invite le gouvernement à « ramener le système sur une trajectoire d’équilibre » en préconisant la « sous-­indexation des pensions qui permettrait des économies assez rapides » et « le recul de l’âge de départ à la retraite qui pourrait se "justifier" par l’allongement de l’espérance de vie », ce qui ne l’empêche pas d’affirmer que son rôle n’est pas « d’empiéter sur le choix politique » !

Le CSR a aussi pour fonction « d’analyser la situation comparée des femmes et des hommes au regard de l’assurance vieillesse, et de l’évolution du pouvoir d’achat des retraités, avec une attention prioritaire à ceux dont les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté » mais aucune mesure n’est actuellement proposée au gouvernement sur ces sujets.

Dans un avis publié le 22 septembre 2022, le CSR a annoncé le retour « rapide et durable des déficits » et a prédit à son tour « un risque de déséquilibre résiduel à court et moyen terme ». Il a refusé de faire un choix entre plusieurs solutions : « hausse de l’âge légal, durée de cotisation, sous-revalorisation des pensions assortie de mesures de protection pour les bas salaires ». Mais il a néanmoins annoncé « [qu’]aucun scénario ne peut être indolore pour l’ensemble de la population » et précisé que l’option de la hausse de l’âge légal ou de la durée de la cotisation pourrait être justifiée car ce serait « le prix à payer pour ne pas augmenter les cotisations, ce qui réduirait le niveau de vie des retraitéEs ».
Les caisses de la sécu asséchées au profit des capitalistes

Commission santé sécu social du NPA
Hebdo L’Anticapitaliste - 631 (06/10/2022)
Fin août 2022, le gouvernement a instauré avec effet rétroactif au 1er juillet « une mesure d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat » en instaurant la prime de partage de la valeur (la PPV) qui peut se monter jusqu’à 3 000 ou 6 000 euros selon les cas. Cette prime reste facultative et est à la discrétion de l’employeur. Elle concerne toutes les entreprises, quels que soient leur effectif et leur statut (artisan-commerçant, profession libérale, association, fondation, syndicat, mutuelle...), les établissements publics à caractère industriel et commercial et les établissements publics administratifs employant du personnel de droit privé. TouTEs les salariéEs peuvent en bénéficier quel que soit leur statut : CDI, CDD, à temps plein ou à temps partiel, intérimaires, en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Pour les salariéEs dont la rémunération annuelle est inférieure à trois fois le SMIC annuel au cours des 12 mois précédant son versement, la prime versée est exonérée de toutes les cotisations et contributions sociales patronales et salariales, dont la CSG et la CRDS. La prime est également exonérée d’impôt sur le revenu pour le ou la salariéE.

À partir du 1er janvier 2024, le régime d’exonération renforcé disparaîtra. TouTEs les salariéEs, quelle que soit leur rémunération, seront exonérés uniquement de cotisations sociales. La PPV sera soumise à la CSG/CRDS, à l’impôt sur le revenu (et au forfait social de 20 % pour les entreprises de plus de 250 salariéEs).

À ce dispositif s’ajoute, depuis le début des années 1990, des « niches sociales » constituées de l’ensemble des exonérations des cotisations sociales. Elles concernent toutes les branches de la sécurité sociale, notamment la « branche retraite ». Le PLFSS de 2019 note que 90 dispositifs s’appliquent aux recettes des régimes de base de la sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse (qui finance le minimum vieillesse). Le coût de ces « niches » atteint 66,4 milliards d’euros dont 52 pour les exonérations patronales, mais selon la Cour des comptes ce montant serait de 90 milliards d’euros. De plus le CICE qui était une « niche fiscale » a été pérennisé en « niche sociale » en transformant l’allégement de l’impôt patronal en exonération de la part patronale des cotisations sociales. Le comité de suivi des aides publiques aux entreprises indique que « l’on ne dispose d’aucune évaluation des effets sur l’emploi de cette politique sur l’ensemble des 25 dernières années ». Ce dispositifs présentent en outre des effets pervers, ils peuvent inciter des employeurs à maintenir les salaires en dessous des seuils d’exonération, créant ainsi des trappes à bas salaire. 1

1.Source : Observatoire de la justice fiscale, à l’initiative d’Attac France.

Retraites : une contre-réforme majeure

Correspondant.e.s santé
Hebdo L’Anticapitaliste - 631 (06/10/2022)
Le gouvernement a décidé, lors d’une réunion le soir du 28 septembre, de reprendre « un nouveau cycle de concertations avec les partenaires sociaux et forces politiques ». Un projet de loi sera soumis au vote du Parlement « avant la fin de l’hiver » et la réforme entrerait en vigueur à l’été 2023, pendant la période des vacances, le gouvernement estimant sans doute que c’est une période qui n’est pas propice à des mobilisations d’ampleur.

parmi celles qui avaient été annoncées, ce sont les mesures les plus dures qui ont été retenues lors cette réunion : l’âge légal de départ à la retraite, actuellement à 62 ans, reculerait dès 2023 de quatre mois par an, pour atteindre les 65 ans en 2032. Les 42 régimes spéciaux (régimes spécifiques à des professions SNCF, RATP,EDF-GDF...) seraient supprimés. Cette réforme avait déjà été tentée par Juppé en 1995 et, mise en échec par la mobilisation. C’est à rappeler à touTEs celles et ceux qui ne croient pas à la possibilité de faire céder le gouvernement !

Des reculs d’ampleur…
Dussopt, le ministre du Travail, a pour mission de supprimer les critères de pénibilité au travail qui permettent de partir en retraite avant 62 ans, l’âge légal actuel. Si la loi Dussopt-Macron devait être appliquée, les travailleurEs qui souffrent des conditions définies par le Code du travail — contraintes physiques (postures pénibles, vibrations mécaniques, manutentions de charges), rythmes de travail pénibles (travail de nuit, travail répétitif caractérisé par la répétition d’un geste précis sur un cycle défini, du travail en équipes successives alternantes) ou environnements physiques agressifs (agents chimiques dangereux, bruit, températures extrêmes, milieu hyperbare) — devraient travailler jusqu’à 65 ans. En 2017, quatre des dix facteurs de pénibilité — postures pénibles, vibrations mécaniques, manutention manuelle des charges, exposition à des agents chimiques dangereux notamment les poussières et les fumées — avaient déjà été supprimées. C’était déjà une attaque gouvernementale contre les travailleurEs. Si on les laisse faire, il est à craindre que tous les critères autorisant les départs anticipés à la retraite soient à terme supprimés et que les conditions qui permettent aux handicapéEs de bénéficier d’un départ en retraite anticipé soient aussi modifiées à leur détriment.

Macron voudrait faire voter sa réforme cet hiver via un projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale (PLFRSS), sans exclure l’application de l’article 49-3 de la Constitution pour éviter un vote du Parlement où il serait perdant.

Les syndicats s’affirment opposés à ce qu’une réforme soit imposée de cette manière autoritaire mais la plupart d’entre eux continue de croire à la « concertation ». Toutes les contre-réformes depuis 1993 montrent que le seul moyen efficace pour ne pas subir un allongement de la durée de cotisations, un recul de l’âge de départ à la retraite, la baisse des pensions reste la grève générale reconductible et le blocage de l’économie.

… et des promesses
La Première ministre Élisabeth Borne a annoncé que le gouvernement reprendrait dès le 3 octobre « un nouveau cycle de concertations avec les partenaires sociaux et forces politiques (...) sur la base d’un départ à 65 ans ». À l’ordre du jour : le dispositif carrières longues, la pénibilité et la prévention de l’usure au travail, l’emploi des seniors, les aménagements de fin de carrière, la suppression des régimes spéciaux, le minimum de pension de retraite, l’adaptation des paramètres pour assurer l’équilibre financier du système de retraite.

Philippe Martinez a déclaré qu’il ferait des propositions sur le financement de la caisse de retraite vieillesse de la Sécu et a affirmé que « si c’est pour nous expliquer qu’il faut travailler plus longtemps, la concertation ne va pas durer longtemps » ; la CFDT « a pris acte d’une inflexion qu’elle réclamait » et a rappelé « son refus d’un report de l’âge légal ».

Macron renouvelle sa promesse annoncée pendant la campagne électorale pour les présidentielles : une pension minimale à 1 100 euros mensuels pour une carrière pleine alors que le minimum garanti aux fonctionnaires retraitéEs est de 1 248,33 euros par mois. Il prétend prendre en compte la pénibilité au travail alors qu’il a supprimé en 2017 quatre des dix critères de pénibilité instaurés par la loi de 2010. Il promet « d’indexer les retraites sur l’inflation dès cet été », promesse déjà annoncée auparavant à plusieurs reprises et restée sans suite !

Le COR et ses chiffrages aléatoires
Pour justifier son projet, le gouvernement s’appuie sur les projections hypothétiques du Conseil d’orientation des retraites (COR) qui annonce un déficit des retraites de 16 milliards en 2032.

Les projections démographiques et économiques du COR ont permis aux gouvernements successifs d’élaborer des contre-réformes prétendument inéluctables. Ces projections ne sont pas fiables. Exemple, la situation sanitaire a bouleversé les indicateurs qui annonçaient en juin 2020 un déficit du système de retraite de 30 milliards d’euros, incitant les commentateurs à annoncer dans les médias l’inéluctabilité des réformes du système de retraite. Mais la surmortalité causée par le Covid-19 a réduit les dépenses de retraites de 25 milliards fin novembre 2019 à 18 milliards en 2020. Autre facteur du peu de crédibilité des prévisions : le COR utilise trois conventions comptables différentes et établit quatre scénarios de croissance différents. Il a pu indiquer en 2020 que « le solde du système de retraite varierait entre + 2,1 % et 0,7 % du PIB en 2070 » une prévision qui varie du simple à presque le quadruple... pour 50 ans plus tard !

Avec son extraordinaire ­prescience, le COR pronostique un taux de chômage qui évoluerait de 5 % en 2027 à 7 % en 2032, ce qui aurait pour conséquence un ralentissement de la croissance économique entre 2028 et 2032. Le ratio retraitéEs/cotisantEs évoluerait de 0,583 en 2021 à 0,747 en 2050, soit une hausse de 28 %.

Les projections à court terme s’avèrent aussi pour la plupart souvent erronées. En 2021, le système de retraite a été excédentaire de près de 900 millions alors qu’un déficit était annoncé. En 2022, selon le COR, « l’excédent devrait s’élever à 3,2 milliards d’euros mais le système reviendra dans le rouge dès 2023 et le déficit devrait s’accentuer de 0,5 et 0,8 point de PIB d’ici à 2032 ». Le retour à l’équilibre est prévu « vers le milieu des années 2030 dans le meilleur des scénarios », prévision qui permet de dire au gouvernement que « ça justifie une réforme »1.

1.Les Échos.

De nouvelles menaces contre les acquis sociaux et la continuité du salaire

Commission santé sécu social du NPA
Hebdo L’Anticapitaliste - 631 (06/10/2022)
Les gouvernements ont imposé aux régimes spéciaux (des organismes propres à une profession : régimes des marins, des militaires, des cultes…) ou à une entreprise (régimes de l’Opéra de Paris, de la SNCF, de la RATP, etc., maintenus à la création de la Sécu), des dispositions déjà appliquées aux caisses de retraite de la fonction publique :

• En 2008, l’allongement de la durée de cotisation exigée pour bénéficier de la retraite à taux plein ;

• En 2010, la décote lorsque le ou la retraitéE n’a pas cotisé le nombre de trimestres suffisants pour bénéficier de la retraite à taux plein ;

• En 2017, l’âge légal de départ à la la retraite des fonctionnaires est repoussé de 60 à 62 ans. Macron annonce son intention de liquider le régime de retraite de la SNCF ; son Premier ministre Édouard Philippe déclare qu’en 2020 « il n’y aura plus de recrutement au statut » et il qu’il sera mis en place un régime par points. Pendant les périodes de travail professionnel les cotisations pour la retraite sont converties en points et lorsque l’on fait valoir ses droits à la retraites les points sont convertis en pension. La valeur des points est variable et il n’est pas possible de connaître auparavant le montant de la pension. L’enjeu de cette réforme est de baisser le montant de la retraite. En calculant le montant des retraites sur des points accumulés durant 25 ans et non plus sur les six derniers mois toujours mieux rémunérés, on réduit de beaucoup le montant de la pension. C’est pourquoi Macron ne veut pas de la retraite conçue comme le salaire continué. Les cheminotEs ont été les premiers à bénéficier du salaire continué et ont été à l’avant-garde des mobilisations mais ils et elles ne sont pas les seuls à bénéficier du salaire continué, cela concerne aussi les salariéEs de la RATP, de la CNIEG (Caisse nationale de retraite des industries électriques et gazières) parmi les plus menacés dans une période proche), sans oublier les fonctionnaires qui reçoivent des pensions calculées à l’identique de celles des régimes spéciaux.

Retraites : les revendications du NPA

Commission santé sécu social du NPA
Hebdo L’Anticapitaliste - 631 (06/10/2022)
• Non aux contre-réformes de Macron : elles sont non seulement nocives pour les retraitéEs mais aussi absurdes : un rapport officiel indique que parmi celles et ceux qui n’ont pas pris leur retraite à 60 ans suite à la réforme Fillon, un tiers ne travaillaient pas car en invalidité et en maladie et près de 20 % étaient au chômage ;

• Les reculs sociaux ne sont ni négociables ni amendables, les avancées sociales sont gagnées souvent par la lutte, refusons toute forme de concertation ;

• La retraite à 60 ans, et 55 ans pour les travaux pénibles, ce qui permet, comme la réduction du temps de travail hebdomadaire, de donner du travail au chômeurEs ;

• La continuité du salaire pendant toute la vie : aucune pension en dessous du SMIC revalorisé (1 800 euros), le minimum pour que les salariéEs vivent décemment doit l’être aussi pour les retraitéEs. Dans le privé comme dans le public, le calcul des retraites sur les six derniers mois de salaire ;

• L’égalité hommes-femmes car la retraite amplifie les inégalités : les femmes perçoivent en moyenne une pension de retraite inférieure de 41 % à celle des hommes en raison des inégalités durant les carrières professionnelles. Des mécanismes de compensation doivent en finir avec ces injustices ;

• Le rétablissement et l’extension de tous les critères de pénibilité au travail qui justifient les départs anticipés à la retraite ;

• Le financement des retraites par la cotisation sociale, c’est une part de nos salaires mise dans un pot commun, et versée à la Sécurité sociale ;

• Un seul modèle : la retraite par répartition, donc non au système par points et à la capitalisation ;

• La gestion de la sécurité sociale aux seuls représentantEs des salariéEs. Ils et elles gèrent la part socialisée de nos salaires, ils et elles doivent être élus et révocables, et avec tous les pouvoirs de gestion, sans tutelle de l’État et sans patrons.

• Stop au pillage de la Sécu par les exonérations des cotisations sociales et les réductions d’assiettes (la base sur laquelle sont appliqués les taux de cotisations) ;

• L’augmentation des salaires, la réduction du temps de travail et l’embauche des chômeurs, c’est plus de cotisations pour la Sécu ;

• L’indexation des pensions sur les salaires, le rattrapage des pertes de pouvoir d’achat depuis au moins 10 ans ;

• Un service public du 3e âge pour la gestion de tous les Ehpad et des services d’aide à domicile, dotés de tous les moyens humains et budgétaires dont ils ont besoin et sous le contrôle des retraitéEs et de leurs familles ;

• La création d’un véritable service public de l’autonomie pour les personnes âgées, engagement pris par Macron en 2018 et 2020 tombé dans les oubliettes ;

• Un service public de qualité, au domicile ou en institution, pour la compensation de la perte d’autonomie avec du personnel formé, qualifié et bien mieux rémunéré ;

• Les EHPAD privés doivent être expropriés et intégrés dans le service public afin d’offrir partout des prestations et services de qualité. Il faut en finir avec les scandales et privilèges. Toutes les personnes âgées qui le souhaitent doivent pouvoir accéder à ces établissements.