Les retraites

Le Figaro - La Cour des Comptes veut remettre à plat la retraite des fonctionnaires

Octobre 2016, par Info santé sécu social

Les efforts engagés depuis 2003 pour faire converger les retraites du public et du privé sont largement insuffisants. Une série d’avantages dont bénéficient toujours les fonctionnaires rend l’équilibre du régime de retraite fragile et non pérenne. La Cour présente différents scénarii, dont un qualifié de « Big Bang ».

Dans un rapport volontariste sur le régime de retraite des fonctionnaires, dix ans après le précédent, la Cour des comptes juge que les réformes engagées depuis 2003 restent insuffisantes. Elle reconnaît que les efforts pour faire converger les régimes de retraite du public avec le privé sont réels, notamment sur les âges de départ et le taux de remplacement des pensions par rapport aux rémunérations d’activité. Mais la Cour juge cette convergence « partielle et fragile ». Résultat, les sages de la rue Cambon estiment qu’en termes de soutenabilité financière des régimes, « le point d’équilibre apparent n’est pas durable ». Dit autrement, il sera difficile de payer les pensions publiques dans le futur sans réaliser de nouvelles réformes.

Plusieurs différences majeures subsistent. Primo, les cotisations ne sont toujours pas assises sur la même base. Alors que les salariés du privé cotisent sur la totalité de leur salaire, les fonctionnaires continuent à ne cotiser que sur leur traitement indiciaire, c’est-à-dire sans englober toutes les primes. Un dispositif qui avantage fortement les hauts fonctionnaires pour qui les primes constituent 55% à 60% de la rémunération... mais très peu les enseignants (pour qui les primes ne dépassent pas 11%) ou les professeurs des écoles (5% à 6%).

Le retour à l’équilibre financier n’est pas durable

Secundo, les retraites des fonctionnaires restent calculées sur les six derniers mois de traitement alors que celles des salariés le sont sur les 25 meilleures années. Si cette règle n’implique pas aujourd’hui des taux de remplacement substantiellement différents, elle pourrait contribuer à creuser l’écart dans les années à venir, alerte la Cour. Concernant les avantages familiaux, si certains sont favorables aux fonctionnaires, d’autres non. Tout ne va pas toujours dans le même sens, note la Cour. Enfin, si on entend souvent que le taux maximum de liquidation est de 75% pour les fonctionnaires contre seulement 50% dans le privé, en réalité le différentiel n’est pas de 25% mais beaucoup plus réduit, précise la Cour.

En fait, la vraie différence public/privé se joue surtout avec une catégorie bien particulière de fonctionnaires, la « catégorie active », au nombre de 700.000, qui bénéficient d’avantages spécifiques (policiers, pompiers...). Par exemple, ils partent en moyenne en retraite 4 ans plus tôt.

Du fait de ces avantages spécifiques à certaines catégories et de l’évolution démographique, les régimes de retraite des fonctionnaires vont continuer à peser sur les finances publiques. Le retour à l’équilibre du régime des fonctionnaires de l’État n’est envisageable qu’au prix du maintien d’un taux de contribution élevé, pesant sur les dépenses de l’État. Pour la Fonction publique hospitalière et la Territoriale, il faudra impérativement relever les taux de cotisations, à règles inchangées, pour rester à l’équilibre, prévient la Cour.

Scénario socialement difficilement acceptable

Pour prévenir ces risques, la Cour a envisagé différents scénarii dont le plus radical alignerait le régime des fonctionnaires sur celui des salariés du privé, non seulement pour les nouveaux agents mais également pour les agents en poste. Un vrai Big Bang qui serait, reconnait la Cour, socialement difficilement acceptable, techniquement difficile à mettre en œuvre et ne deviendrait rentable qu’au bout de... 17 ans !

Du coup, la Cour a examiné d’autres évolutions possibles, plus aisées à mettre en œuvre, sans remettre en cause l’existence même des régimes de la fonction publique. Elle identifie ainsi sept leviers en vue d’ajuster progressivement certains paramètres de calcul des pensions des fonctionnaires, comme l’allongement de 5 à 10 ans de la période de référence -ce que François Fillon voulait faire dans la réforme de 2003-, l’élargissement de l’assiette des cotisations et de calcul des pensions par l’intégration d’une partie des primes -ce qui a commencé à être fait dans la réforme de 2003-, la suppression de certaines bonifications, l’évolution de différentes règles relatives aux catégories actives, l’harmonisation progressive des droits familiaux et conjugaux. Enfin, la Cour formule différentes recommandations afin de renforcer la gouvernance des régimes et leur pilotage financier.