Luttes et mobilisations

Le Figaro.fr Grève dans les Ehpad : quelles sont les revendications du personnel soignant ?

Juillet 2019, par infosecusanté

Grève dans les Ehpad : quelles sont les revendications du personnel soignant ?

Le figaro.fr

1er Juillet 2019

Créations de postes, meilleur taux d’encadrement, hausses de salaires... Les revendications du personnel des Ehpad sont multiples.
Les personnels des maisons de retraite et des services d’aide à domicile battent de nouveau le pavé ce lundi. Un an et demi après une grève inédite dans les maisons de retraite, ils se sont rassemblés devant le ministère de la Santé, à Paris, et devant les agences régionales de santé (ARS). L’AD-PA et l’intersyndicale (CGT, FO, Solidaires, CFE-CGC, CFDT, FSU, CFTC, FA, Unsa, Ufas) qui ont appelé à cette journée de mobilisation, dénoncent un manque de moyens et des « sous-effectifs » au sein des Ehpad ainsi que des services d’aide à domicile. Ils réclament la création immédiate de 40.000 postes, pour moitié à domicile. Le Figaro fait le point sur les revendications du personnel soignant.

• Des créations de postes pour répondre au vieillissement de la population
C’est leur principale revendication : depuis plusieurs mois, les personnels réclament la création de milliers de postes. Dans une interview accordée au Parisien, Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées, explique : « On est au maximum des dysfonctionnements possibles, alors que la demande d’accueil ne cesse d’augmenter. Le rapport Libault, remis en mars dernier, préconise la création de 80.000 emplois dans notre secteur (d’ici 2024, NDLR). Les personnels sont à bout. Les burn-out se multiplient ». Avant de poursuivre : « Il nous faut deux emplois par structure, soit 20.000 emplois pour les 10.000 établissements d’accueil et 20.000 emplois pour les 10.000 services à domicile, dont le modèle est devenu insoutenable. Aujourd’hui le personnel fait le maximum, mais au détriment de sa santé ». « On supprime de plus en plus de postes et on nous demande de prendre de plus en plus de personnes en charge », expliquait une infirmière de Saint-Ouen au Figaro il y a un an. Cette surcharge de travail génère une dégradation des conditions de travail car le personnel ne peut plus s’occuper correctement des personnes âgées. Dans certains Ehpad, on parle même de « maltraitance institutionnelle ».

« Les sorties dehors, les repas, les appels à la famille, tout ça c’est fait à la va-vite. On a basculé dans l’indignité et nous on veut pas être complice de ça », confie ce lundi à l’AFP Héloïse Valles, aide-soignante dans un Ehpad de l’Essonne (91). « Aujourd’hui une aide-soignante doit être en mesure de s’occuper de dix personnes contre la moitié il y a vingt ans. Ça n’est pas possible ! », ajoute-t-elle.
Deux facteurs accentuent les besoins de personnels : le vieillissement de la population et la dépendance. Plus de 11,5 millions de Français ont plus de 65 ans, dont 1,5 million n’est plus autonome, selon les chiffres officiels. Le nombre de personnes de plus de 75 ans, qui approche actuellement des 10% de la population, devrait dépasser les 15% d’ici 20 à 30 ans, selon l’Insee. Les personnes accueillies seront ainsi de plus en plus dépendantes.
Pour rappel, la ministre de la Santé Agnès Buzyn avait décidé en mai 2018 de débloquer 360 millions d’euros sur trois ans pour le recrutement de personnels soignants supplémentaires.

• Un taux d’encadrement plus élevé, comme en Europe du Nord
Cette question est directement liée à celle des effectifs. Le taux d’encadrement moyen dans les Ehpad français est de 0,57 soignant pour un résident (moins de 60 agents pour 100 résidents). La France fait figure de mauvais élève par rapport aux pays d’Europe du Nord, où le ratio est d’un soignant pour un résident.
Pour Pascal Champvert, le compte n’y est pas. « Rendez-vous compte : en 2006, Dominique de Villepin, Premier ministre, a promis huit professionnels pour dix seniors en 2012 », rappelle-t-il dans Le Parisien. Selon lui, « pour faire face au défi du vieillissement, de la perte d’autonomie, il faut un taux de dix pour dix ».

• De meilleurs salaires
Des revalorisations salariales, dans un secteur où les temps partiels et les bas salaires sont nombreux, font aussi partie des revendications de longue date.

• La question des accidents du travail (plus importants que dans le BTP)
Preuve du mal-être dans les Ehpad : les accidents du travail y sont nombreux. « Notre secteur est, de l’aveu de l’assurance maladie, le seul où accidents et maladies professionnelles continuent d’augmenter. Ils sont deux fois plus fréquents que dans le bâtiment ! » explique au Parisien Pascal Champvert. Dans le secteur des services et soins à la personne, les taux d’accidents au travail et de maladies professionnelles sont en effet préoccupants : 9,4% (contre 6% dans le BTP), selon l’Assurance maladie.
Ces chiffres s’expliquent par une forte hausse des lombalgies (la douleur située en bas du dos), responsable à 20% du nombre d’accidents du travail et des troubles musculo-squelettiques qui représentent 87% des maladies professionnelles. Autre symptôme du malaise des professionnels du secteur, le taux d’absentéisme, qui est « en moyenne de 10% », selon des sources parlementaires.