Les professionnels de santé

Le Généraliste - La Sécu plombée par le Covid-19, les libéraux de santé devront se serrer la ceinture en 2021

Septembre 2020, par Info santé sécu social

Ancien rapporteur général du budget de la Sécu, le ministre de la Santé Olivier Véran présentait ce mardi à Bercy son premier projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Une première particulièrement marquée par l’épidémie de coronavirus qui a fait plonger les comptes publics. Le déficit de la Sécurité sociale s’est ainsi creusé dramatiquement ces derniers mois pour atteindre, selon les prévisions, les 44,4 milliards d’euros en 2020. C’est un peu mieux que les 52 milliards redoutés en juin.

4,3 milliards d’euros de provisions pour faire face au coronavirus

À crise exceptionnelle, budget exceptionnel  ! Le PLFSS 2021 présenté par le gouvernement dans ces circonstances inédites, prévoit une évolution des dépenses de santé (Ondam) de +3,5 % l’an prochain après une hausse de + 7,6 % en 2020 du fait notamment des nombreuses mesures mises en œuvre pour lutter contre la crise sanitaire.

Cette nette hausse est en partie due aux 4,3 milliards d’euros de provisions au titre des tests de dépistage, de vaccins et de masques dans le cadre de l’épidémie de Covid-19 qui sévit toujours. Sur ce total, 2 milliards d’euros seront consacrés aux tests pour « pouvoir continuer d’assurer, en 2021, le nombre de tests nécessaires pour lutter efficacement contre le Covid-19, en assurant la juste rémunération des professionnels mobilisés ». La provision pour les éventuels vaccins s’élève, elle, à 1,5 milliard d’euros. Elle correspond « au prix moyen estimé d’une vaccination pour chaque personne prioritaire en cible de vaccination ». Enfin, 700 millions d’euros sont prévus pour la distribution de masques pour les personnes vulnérables atteints d’une pathologie chronique, les personnes testées positives au virus et les cas contacts.

300 millions d’euros prévus pour revaloriser les soignants libéraux

Hors prise en compte des dépenses liées à la crise sanitaire, l’Ondam 2021 s’élève à + 6 % en 2021 par rapport à cette année (voir tableau ci-dessous). Plus d’un tiers de cette augmentation (+ 12,5 milliards d’euros au total) sera dédié aux mesures salariales prises dans le cadre du Ségur de la santé, dont l’augmentation de 183 euros net des salaires mensuels de l’ensemble des personnels des établissements de santé et des EHPAD.

Evolution de l’Ondam

Alors que les syndicats de médecins libéraux espèrent obtenir des moyens significatifs pour revaloriser la médecine de ville à l’occasion des négociations entamées il y a deux semaines avec l’Assurance maladie, le projet de budget de la Sécu ne prévoit en revanche d’allouer que 300 millions d’euros seulement à la « revalorisation des professionnels de santé libéraux » (voir le diagramme ci-dessous), ce qui devrait faire réagir ses représentants.

Dépenses supplémentaires

La prise en charge à 100 % des téléconsultations prolongée

Mise en place au début de l’épidémie, la prise en charge intégrale des téléconsultations par l’Assurance maladie pour l’ensemble des assurés et pour quelque motif que ce soit est maintenue pour les deux prochaines années. Soit une année supplémentaire par rapport à la proposition de la Caisse dans son rapport « Charges et produits ». Cette disposition doit « permettre de faciliter le recours à la télémédecine, notamment dans les zones sous-denses où l’accès aux soins peut être d’autant plus difficile que les médecins sont peu nombreux », selon le gouvernement.

La nouvelle convention médicale reportée à 2022

Paraphée à l’été 2016, la convention médicale devait toucher à son terme en 2021. Les négociations pour la prochaine convention devaient donc débuter dès janvier prochain. Le PLFSS 2021 prévoit de la prolonger d’un an et demi afin de « permettre aux syndicats de médecins représentatifs de se consacrer d’abord au moment démocratique à venir (élections aux URPS d’avril 2021, NDLR) et de se préparer ensuite à la négociation de la prochaine convention médicale ».

Par ailleurs, pour susciter une « participation plus active des syndicats représentatifs des professionnels de santé », le projet prévoit de leur allouer un nouveau « financement pérenne ». Celui-ci « proviendra d’une fraction de l’actuelle contribution aux unions régionales (CURPS) payée par les professionnels de santé libéraux et d’une dotation de l’assurance maladie pour la participation des syndicats aux activités conventionnelles ». Sa mise en place « fera l’objet d’une concertation avec les professionnels de santé concernés au premier semestre 2021 », précise le projet de loi.

Quatre milliards d’économies attendues

Pour atténuer l’explosion des dépenses de santé 2021, près de quatre milliards d’euros d’économies des acteurs de santé (industrie du médicament, hôpitaux, médecins libéraux...) sont espérés par le gouvernement . En juin la Cnam tablait pourtant sur un montant bien inférieur avec seulement un milliard d’euros. En 2021, une contribution exceptionnelle des organismes d’assurance maladie complémentaire, qui ont économisé près de deux milliards d’euros du fait de la prise en charge à 100 % de certaines dépenses par l’Assurance maladie (tests, téléconsultations notamment), sera mise en place. Elle sera de 500 millions d’euros, contre un milliard cette année.

Economies

Véran insiste sur le nécessaire quoique difficile retour à l’équilibre

Soulignant que ce projet de budget était un « PLFSS de réponse à la crise et résolument tourné vers l’avenir », Olivier Véran a insisté lourdement sur la nécessité de revenir à terme à l’équilibre financier.

« La situation de nos comptes sociaux ne me satisfait pas, a-t-il indiqué. Je suis lucide, l’ancien rapporteur général du budget de la Sécu que je suis n’a pas perdu ses réflexes. Je suis le ministre de l’équilibre des comptes de la Sécurité sociale. » Refusant de repousser sur les générations futures les « déséquilibres d’aujourd’hui », le ministre a expliqué que la sortie de crise devrait s’accompagner d’une refondation du système de régulation des dépenses. Une réflexion, réclamée par le Premier ministre Jean Castex, devra être engagée en ce sens. « Il ne faudra s’interdire aucun sujet, aucun débat, aucune solution, a prévenu Olivier Véran. Elle prendra un peu de temps mais elle est nécessaire car la pérennité de notre système social n’existerait pas sans retour à un équilibre financier. » Celui-ci est pour l’heure reporté aux calendes grecques.