Les retraites

Le Monde - Le sujet du financement des retraites revient sur le devant de la scène

Septembre 2020, par Info santé sécu social

A la demande du premier ministre, les partenaires sociaux ont travaillé sur le système de pensions

Revoilà l’explosif dossier des retraites. Alors qu’ils avaient exprimé le souhait, en juillet, de ne pas revenir sur ce sujet – à court terme –, les partenaires sociaux viennent de le hisser de nouveau en tête d’agenda, à la demande de l’exécutif. Ils se sont, en effet, pliés à cet exercice, mercredi 9 septembre, à l’occasion d’une réunion du Conseil d’orientation des retraites (COR). Les membres de cette instance ont échangé sur la délicate mission que leur a confiée le premier ministre, Jean Castex : travailler sur la situation financière de notre système de pensions.

Cette commande avait été passée par le biais d’un courrier adressé, le 14 août, au président du COR, Pierre-Louis Bras. Dans cette lettre, le chef du gouvernement réaffirme que la réforme, suspendue en mars à cause de la crise sanitaire, « sera poursuivie ». La création d’un régime universel sera cependant « distinguée des mesures qui seront nécessaires au rétablissement de l’équilibre financier du système actuel ».

Notant que les comptes des caisses de retraites se sont « encore dégradés », M. Castex explique qu’il y aura une concertation avec les organisations d’employeurs et de salariés, pour identifier les « moyens de remédier aux déficits prévus ». Le premier ministre précise que la question doit être envisagée « à court, moyen et long termes ». En juin, le COR avait indiqué que les régimes de pension pourraient plonger dans le rouge, à hauteur de – 29,4 milliards d’euros en 2020.

« Inflammabilité sociale »

Pour M. Castex, les travaux du COR devront permettre de distinguer « ce qui relèverait d’une dégradation exceptionnelle » des « évolutions plus structurelles susceptibles de peser directement sur l’équilibre des régimes ». Dans sa lettre, le premier ministre réclame un « premier point d’étape » à la fin septembre, mais un délai supplémentaire a été accordé : une note intermédiaire sera présentée le 8 octobre.

Les syndicats refusent de voir le sujet réapparaître au premier plan. Plusieurs d’entre eux considèrent que le gouvernement cherche à prendre des mesures rapidement pour assainir les finances du système de pensions : l’hypothèse d’un allongement de la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein plane.

« On ne va pas accroître le temps passé au travail, alors que près de 900 000 emplois pourraient être détruits cette année, ce n’est pas cohérent », déclare Michel Beaugas, représentant Force ouvrière au COR. « Je ne suis pas certain que la résorption, à court terme, du déficit soit l’urgence du moment, poursuit Pierre Roger (CFE-CGC). L’idée d’une augmentation de la durée de cotisation pose problème, car si une telle disposition est prise, elle risque de jouer au détriment de l’emploi des jeunes. Il faudra en discuter. »

Le pouvoir en place est dans « l’affichage politique », estime Pierre-Yves Chanu (CGT), déplorant que le projet de réforme n’ait pas été abandonné. « Le monde d’après de M. Macron est comme le monde d’avant, poursuit-il. Le discours sur la concertation avec les partenaires sociaux, c’est du vent  ! »

Le 2 septembre, dans un entretien au Monde, le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, avait de nouveau mis en garde : si une mesure d’âge était prise, sa confédération la contesterait « vivement ». « En termes d’inflammabilité sociale, une telle démarche serait périlleuse », avait-il martelé.

Du côté du patronat, on trouve que les intentions de l’exécutif ne sont pas forcément opportunes. Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, avait déclaré au Figaro, le 26 août, qu’il y a « un problème de financement à régler » ; il avait ajouté être prêt à en reparler, « mais pas tout de suite ». Pour lui, « la priorité du moment, c’est la relance de l’économie ». Eric Chevée, vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises, estime, lui aussi, que « ce n’est pas l’urgence, mais on ne peut pas non plus renvoyer le problème aux calendes grecques ». Son organisation se mettra autour de la table si le gouvernement s’engage dans cette direction dès cet automne.

par Raphaëlle Besse Desmoulières Et Bertrand Bissue