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Le Monde - « Les gens s’enfoncent dans la pauvreté, qu’ils soient Français ou migrants »

Novembre 2019, par Info santé sécu social

Le Secours catholique, qui a aidé plus de 1,3 million de personnes en 2018, dit, dans son rapport annuel, que deux tiers de ses bénéficiaires vivent dans l’extrême pauvreté.

Le rapport 2019 du Secours catholique, publié jeudi 7 novembre, dresse un portrait saisissant de la pauvreté en France. Les 66 000 bénévoles de cette association ont accueilli 1,347 million de personnes, dont 631 000 enfants, en 2018.

« Les gens s’enfoncent dans la pauvreté, qu’ils soient Français ou migrants, dont les conditions d’accueil se durcissent, constate Véronique Fayet, présidente du Secours catholique. Le revenu moyen de notre public est de 535 euros [par unité de consommation], en baisse de 15 euros, en euros constants, par rapport à 2017. »

Ce constat recoupe celui de l’Insee qui, fin septembre, estimait à 14,7 % de la population, soit 9,3 millions de personnes, la proportion de ménages vivant sous le seuil de pauvreté établi à 1 015 euros par mois. Après trois ans de stagnation à 14,1 %, ce taux est reparti à la hausse. Ainsi, 65 % des personnes accueillies par le Secours catholique vivent même dans l’extrême pauvreté (soit 1,3 point de plus qu’en 2017), avec moins de 666 euros par mois.

Le diplôme ne protège plus de la précarité : 45 % des personnes aidées ont suivi des études secondaires et 16 % ont un niveau bac ou plus (dix points de plus qu’en 2008).

« Ce qui me frappe, c’est que nous accueillons désormais une majorité (52 %) de personnes inactives, soit dix points de plus qu’en 2008. Ce sont des marginaux éloignés de l’emploi, des personnes inaptes ou trop malades pour travailler mais aussi beaucoup d’étrangers sans statut légal qui n’ont pas même le droit de travailler, détaille Mme Fayet. Quant à ceux qui ont un emploi, il s’agit dans les trois quarts des cas de postes précaires ou de temps partiels. »

« On fragilise tout le monde »
Le gouvernement a, en septembre 2018, lancé sa stratégie de lutte contre la pauvreté, avec un effort de 8,5 milliards d’euros étalés sur quatre ans. « Il y a de bonnes mesures, comme les repas à 1 euro dans les cantines, mais elles dépendent des municipalités et mettent du temps à être opérationnelles, constate Mme Fayet. Il faut une cohérence globale des politiques, mais elle manque. Des pans essentiels sont oubliés, comme l’emploi, le logement, la santé. »

La réforme de l’assurance-chômage risque, en effet, de priver d’indemnisation nombre de personnes dès ce mois de novembre. Pire, en avril 2020, le nouveau mode de calcul du salaire de référence réduira les indemnités elles-mêmes.

Sur le front du logement, trois personnes sur dix n’en ont pas de stable et vivent en caravane, en squat ou à l’hôtel. Parmi ceux qui ont un logement, 40 % sont criblés d’impayés.

Quant à l’accès à la santé, les projets de restrictions aux migrants inquiètent le Secours catholique. « Au nom de quelques abus montés en épingle, on punit et on fragilise tout le monde, regrette Mme Fayet. Nous sentons une méfiance envers les pauvres et des préjugés très forts contre les migrants alors que tous ont un farouche désir de s’insérer et contribuer à la collectivité, en travaillant ou dans des missions bénévoles. »