Les Ehpads et le grand âge

Le Monde.fr : Après les décès dans l’Ehpad de Lherm, la réputation du groupe Korian encore mise à mal

Avril 2019, par infosecusanté

Après les décès dans l’Ehpad de Lherm, la réputation du groupe Korian encore mise à mal

Avant cet accident tragique, le groupe de maisons de retraite avait connu des épisodes très compliqués ayant écorné son image.

Par Philippe Jacqué

Publié le 2 avril 2019

Pour Korian, le décès de cinq résidents à la suite d’une probable intoxication alimentaire au sein de La Chêneraie, son établissement de Lherm (Haute-Garonne), n’est pas seulement une tragédie humaine, il pourrait également se transformer en accident industriel, selon les résultats de l’enquête diligentée.

La Bourse l’a entendu ainsi. Le cours du champion européen des maisons de retraite, qui a racheté mi-février le groupe Omega, dont l’Ehpad haut-garonnais faisait partie, a connu une véritable descente aux enfers, en chutant de 7 % en séance. Lundi soir, Korian affichait une baisse de 4,8 %, à 34,36 euros.

Bénéfice de 123 millions d’euros

Avant cet accident, le groupe avait déjà connu plusieurs épisodes très compliqués qui ont écorné sa réputation ces dernières années. Entre fin 2016 et début 2017, treize pensionnaires d’un de ses établissements à Lyon avaient succombé à la grippe. En 2017, l’émission de France 3 « Pièces à conviction » avait étrillé la société, montrant comment elle limitait ses coûts, quitte à restreindre l’usage des couches pour les résidents.

De fait, le groupe est bien géré. Mi-mars, Korian a présenté un chiffre d’affaires de 3,3 milliards d’euros, en augmentation de 6,4 %, pour un bénéfice de 123 millions d’euros. Sous la direction de Sophie Boissard, une ancienne dirigeante de la SNCF, la société n’a d’ailleurs cessé de croître, en multipliant les acquisitions. Elle compte désormais 803 établissements en Europe, qui accueillent 300 000 personnes dans ses cliniques et Ehpad.

La société affiche une image haut de gamme et revendique notamment une offre de repas élaborés par ses propres équipes de cuisine, notamment à Lherm. D’ailleurs, le groupe a assuré que « le dernier contrôle réglementaire d’hygiène périodique, réalisé par un bureau d’étude externe, avait eu lieu le 12 février 2019. Les résultats de ce contrôle étaient conformes ». Selon des témoins cités par l’AFP, l’établissement avait fait cependant appel à un prestataire extérieur, ce qu’il a formellement démenti mardi.

« L’urgence est de comprendre » ce qu’il s’est passé

La ministre de la santé, Agnès Buzyn, a répété, mardi, sa volonté de « comprendre » les circonstances des décès. « Nous ne comprenons pas exactement ce qu’il s’est passé, donc l’urgence est de comprendre » pour que « toute la lumière apparaisse et que je puisse prendre des décisions éventuelles », a-t-elle dit après une réunion à la mairie de Lherm. L’enquête, ouverte par le parquet, doit déterminer « si c’est un accident, un défaut de prise en charge ou une faute ».

Mme Buzyn a réaffirmé que la suspicion était celle d’une intoxication alimentaire, mais sans « encore de preuves ». Trois plaintes émanant de familles de victimes ont été déposées jusqu’ici à la gendarmerie de Muret, chargée des investigations, selon une source proche de l’enquête.

Philippe Jacqué