Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Coronavirus : le Sénat adopte une version largement modifiée du texte prolongeant l’état d’urgence sanitaire

Mai 2020, par infosecusanté

Le Monde.fr : Coronavirus : le Sénat adopte une version largement modifiée du texte prolongeant l’état d’urgence sanitaire

Les élus ont notamment approuvé sous conditions, mardi soir, la création d’un « système d’information » pour identifier les personnes infectées par le Covid-19 et leurs contacts.

Le Monde avec AFP

Publié le 06/05/2020

Le Sénat à majorité de droite a voté, dans la nuit de mardi à mercredi 6 mai, le projet de loi prolongeant l’état d’urgence sanitaire, mais largement modifié après cette première lecture et moyennant des « garanties » en vue du déconfinement sur le suivi des malades du Covid-19 et la responsabilité des maires. Le texte a été adopté avec 240 voix contre 25, et 80 abstentions.

Le projet de loi va maintenant être examiné à l’Assemblée nationale, mercredi en commission, puis jeudi dans l’hémicycle, en vue d’une adoption définitive avant la fin de la semaine et dans une course contre la montre avant le déconfinement lundi 11 mai. Les sénateurs, notamment socialistes, ont annoncé une saisine du Conseil constitutionnel, ce qui va retarder la promulgation du texte.

Le ministre de la santé, Olivier Véran, s’est félicité que « l’essentiel a été maintenu » de la version initiale du texte du gouvernement, en espérant un accord entre députés et sénateurs. Les élus du Palais du Luxembourg ont retenu la date du 10 juillet pour le terme de la prolongation de l’état d’urgence, alors que le gouvernement l’avait fixé au 24 juillet.

Les sept articles du projet de loi visent à « conforter le cadre juridique » du régime dérogatoire de l’état d’urgence sanitaire et à l’« élargir » pour « y intégrer les enjeux du déconfinement », selon Olivier Véran.

Contre l’avis du gouvernement, le Sénat a donné un très large feu vert au dispositif du rapporteur visant à aménager le régime de responsabilité pénale des employeurs, élus locaux et fonctionnaires amenés à prendre des mesures pour la sortie du confinement.

La présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, y voit un « projet de loi d’auto-amnistie préventive ». « La Macronie n’a pas traîné », a-t-elle lancé sur Twitter. Le député de Paris Gilles Le Gendre (La République en marche, LRM) espère, lui, « un compromis » : « On ne peut pas ouvrir grand une protection tous risques. »

Identifier les contaminés mais « pas à n’importe quel prix »
Autre mesure majeure : le Sénat a approuvé la création d’un « système d’information » pour identifier les personnes infectées par le coronavirus et leurs contacts. Mais il a posé ses conditions, avec des limites à la dérogation au secret médical, une instance de contrôle et encore le droit individuel d’opposition dans certains cas.

Les sénateurs, à majorité de droite, ont notamment adopté le sensible article 6 du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire. « Si on n’a pas de “tracing”, on n’a pas de déconfinement » à partir du 11 mai, a assuré le ministre de la santé, Olivier Véran.

Des « brigades » ou « anges gardiens », notamment agents à l’Assurance-maladie, seront chargés de faire remonter la liste des cas contacts des personnes infectées. Le système qui centralisera les informations est « le dispositif central du déconfinement » car il faut pouvoir « identifier les personnes contaminées » afin qu’elles s’isolent, mais pas « à n’importe quel prix » pour les libertés ou la protection des données personnelles, selon le rapporteur (Les Républicains, LR) au Sénat Philippe Bas.

Les sénateurs ont validé les « garanties » apportées en commission : dérogation au secret médical limitée dans la durée − celle de l’état d’urgence sanitaire –, et le périmètre – uniquement les données concernant l’infection par le virus. Ils ont refusé d’habiliter le gouvernement à légiférer par ordonnances sur cette question et ont créé une instance de contrôle. Ils ont encore prévu la possibilité de refuser d’être inscrit au fichier de suivi des malades, par exemple pour les personnes ayant été désignées à tort comme ayant été en contact avec un malade.

Ils ont enfin explicitement exclu que le texte puisse servir de base juridique au déploiement de l’application pour smartphones StopCovid. « Il n’y a pas de lien entre l’article 6 et StopCovid », a martelé Olivier Véran. Les sénateurs ont en outre, mardi soir, prévu un avis « conforme » de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) sur le système d’information.

Régimes de mise en quarantaine
Le projet de loi encadre en outre les régimes de mise en quarantaine et de placement à l’isolement pour les malades, obligatoires pour les personnes arrivant sur le territoire national, dans une collectivité d’outre-mer ou en Corse. Le texte prévoit la possibilité de recours devant le juge des libertés et de la détention. Contre l’avis du gouvernement, le Sénat a adopté un amendement visant à écarter du placement préventif en quarantaine à leur arrivée dans l’Hexagone les Français des collectivités et territoires d’outre-mer.

A l’unanimité, et avec cette fois un avis favorable du gouvernement, les sénateurs ont voté un amendement PS pour que les femmes victimes de violences conjugales ne puissent pas être placées en quarantaine ou à l’isolement avec leur conjoint violent.

En vue du 11 mai, le projet de loi adapte en outre la réglementation des déplacements, de l’ouverture des établissements recevant du public et des lieux de regroupement de personnes. Le texte élargit aussi aux agents assermentés de la SNCF et de la RATP ainsi qu’aux capitaines de navires le pouvoir de verbaliser les infractions aux mesures de l’état d’urgence, telle que l’obligation du port du masque dans les transports en commun.