Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Covid-19 : après un mois de répit, la hausse des hospitalisations confirme la reprise de l’épidémie

Octobre 2021, par infosecusanté

Le Monde.fr : Covid-19 : après un mois de répit, la hausse des hospitalisations confirme la reprise de l’épidémie

Les admissions à l’hôpital ont bondi de 14 % en une semaine et de 12 % en soins critiques. Le porte-parole du gouvernement évoque « une reprise légère mais sensible ».

Par Delphine Roucaute

Publié le 29/10/2021

Il y a comme un air de déjà-vu. Après le relatif répit du mois de septembre, la reprise de la circulation virale du SARS-CoV-2, observable depuis deux semaines dans le rebond du taux d’incidence, se confirme depuis quelques jours via un indicateur sans ambiguïté : la hausse des admissions à l’hôpital (+ 14 % en une semaine) et en soins critiques (+12 %). Impossible pour le moment de savoir quelle sera l’ampleur du rebond qui s’amorce depuis début octobre, mais une chose est certaine pour Vincent Maréchal, professeur de virologie à la Sorbonne : « Ce ne sera pas un hiver sans Covid-19 ».

Comment expliquer cette reprise épidémique alors que la rentrée scolaire, perçue comme une période à risques par les épidémiologistes, n’a pas provoqué de rebond particulier en septembre ? Tout d’abord, le réservoir de personnes âgées et vulnérables non vaccinées, les plus à risques de développer des formes graves, est encore important. Quelque 2,5 millions de personnes âgées de 50 ans et plus ne sont toujours pas vaccinées, selon les données du ministère de la santé, et particulièrement 500 000 personnes de plus de 80 ans, alors que le 28 octobre, un tiers des lits en réanimation étaient occupés par des personnes de 60 à 69 ans.

Qu’est-ce qui peut m’arriver de pire ? Maintenant, ce n’est que du gain »
Il faut ensuite considérer les personnes âgées ayant déjà reçu un schéma complet mais dont la protection s’émousse au cours des mois. Au 24 octobre, seuls 64 % des personnes de plus de 65 ans ne vivant pas en Ehpad et éligibles au rappel avaient passé le pas, ainsi que 63 % des résidents d’Ehpad. Enfin, l’entrée dans la saison hivernale, plus favorable à la circulation virale, et le relâchement des gestes barrières contribuent à la nouvelle dynamique. « La reprise épidémique actuelle ressemble à la reprise hivernale de l’année dernière, le virus devient presque saisonnier, observe Mahmoud Zureik, professeur d’épidémiologie et de santé publique à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Mais la vaccination ne sera pas le seul remède. Parmi les mesures à privilégier qui ne sont toujours pas assez mises en avant, la ventilation des lieux clos est importante. »

Les nouvelles contaminations sous-estimées ?
Mercredi, le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a confirmé « une reprise légère mais sensible ». « Le taux d’incidence dépasse à nouveau les 50 pour 100 000 habitants au niveau national et le seuil d’alerte a été franchi dans une quarantaine de départements » même si « nous partons d’un niveau faible », a-t-il précisé. Si la tendance à la hausse est irréfutable, les données de l’incidence sont, elles, sujettes à caution depuis la fin du remboursement des tests virologiques pour tout le monde, le 15 octobre, mais aussi le moindre empressement des personnes vaccinées à se faire tester en cas de légers symptômes, surtout avec l’arrivée d’autres virus, comme le rhume ou la grippe.

Avec une baisse de 25 % du taux de dépistage, « les nouvelles contaminations sont sous-estimées, alors que beaucoup de mesures politiques et sanitaires sont prises sur la base du taux d’incidence », souligne Mahmoud Zureik. « Actuellement en France, on enregistre environ 5 200 cas et à peu près 200 hospitalisations par jour, soit un rapport de 1/25. En Grande-Bretagne, ils ont 50 000 cas et 1 000 hospitalisations par jour, soit un rapport de 1/50, c’est-à-dire la moitié d’en France, alors que depuis la deuxième vague, le ratio était similaire dans les deux pays », avance-t-il. Des données qui suggèrent une sous-estimation importante des cas de Covid-19 en France.

Du côté de Santé publique France (SPF), on assure s’attendre à un impact faible du déremboursement des tests sur les indicateurs et surveiller de près le taux de positivité. L’analyse des eaux usées est aussi mise en avant comme outil de surveillance épidémiologique. « C’est un complément important aux données issues des tests car la construction épidémiologique des courbes d’incidence est affectée par un certain nombre de changements de comportement au cours du temps », appuie Vincent Maréchal, cofondateur du réseau Obépine, qui surveille l’évolution de l’épidémie à travers la charge virale présente dans les selles rejetées dans les eaux usées.

Une situation très contrastée
Sur les 200 stations du réseau, 34 sont actuellement sur un plateau et 68 sont en reprise de circulation virale. « Il y a un retournement de situation marqué entre fin septembre et début octobre, mais sur des niveaux de circulation moyens correspondant à peu près à ceux de septembre 2020 », explique-t-il. La situation est très contrastée suivant les points de sonde, ce qui est attendu en période de circulation modérée du virus, au gré des clusters. « On est en train de recréer un écosystème où le virus peut circuler. Et quand un virus circule dans une population largement vaccinée, on crée un environnement favorable à la sélection de nouveaux variants pouvant échapper aux vaccins », rappelle le virologue.

Outre-Manche, un variant est d’ailleurs sous surveillance étroite : un sous-lignage de Delta, le AY.4.2, qui « représente une proportion lentement croissante des cas au Royaume-Uni », précise l’agence de sécurité sanitaire britannique dans un rapport du 22 octobre, qui l’a d’ores et déjà reclassé en nouveau variant sous surveillance, le « VUI-21OCT-01 ». Repéré pour la première fois en juillet, on compte désormais plus de 15 000 cas en Angleterre. C’est en particulier son taux de croissance de 17 % par rapport aux autres variants circulant sur le territoire qui a attiré l’attention des autorités. « Il faut déterminer dans quelle mesure les différences observées relèvent des propriétés du virus [par exemple des mutations qui favoriseraient un échappement] ou sont purement épidémiques, à savoir des effets aléatoires liés à des clusters, analyse Etienne Simon-Lorière, responsable de laboratoire génomique évolutive des virus à ARN à l’Institut Pasteur. Il faut attendre avant d’affirmer que c’est un nouveau variant. »

L’impact des deux mutations additionnelles repérées sur la protéine Spike de AY.4.2 (Y145H et A222V) n’étant pas aujourd’hui connu, il est trop tôt pour savoir si sa transmissibilité est plus grande que celle de Delta, ou si un échappement immunitaire est possible. « A ce stade, rien n’indique que l’augmentation de l’incidence des cas confirmés de Covis-19 actuellement observée en Angleterre soit uniquement due à la diffusion du variant AY.4.2 », souligne SPF avec prudence dans une analyse de risque du 21 octobre. L’arrêt quasi-total des mesures de contrôle de l’épidémie depuis juillet ainsi que la saison actuelle « contribuent certainement de façon majeure à cette dynamique ». En attendant, seuls 19 cas ont pour le moment été identifiés en France et les autorités sanitaires ne considèrent pas qu’il s’agisse d’une menace. Ses mutations sont toutefois intégrées au système de surveillance des variants pour ne pas manquer d’éventuelle propagation.