Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Monde.fr : Covid-19 : l’exécutif se résigne à des restrictions en Ile-de-France et dans les Hauts-de-France « dès ce week-end »

Mars 2021, par infosecusanté

Le Monde.fr : Covid-19 : l’exécutif se résigne à des restrictions en Ile-de-France et dans les Hauts-de-France « dès ce week-end »

Emmanuel Macron écarte toujours, pour l’heure, l’éventualité d’un confinement national. Le chef de l’Etat a dû reconnaître qu’il était en train de perdre « la course de vitesse » entre les variants et le vaccin.

Par Alexandre Lemarié

Publié le 18/03/2021

Le feuilleton semble s’éterniser. Mais la riposte se précise. Après plusieurs jours de tergiversations, Emmanuel Macron s’est finalement résolu à mettre en œuvre de nouvelles restrictions pour tenter de juguler l’épidémie de Covid-19.

Lors d’un nouveau conseil de défense sanitaire, l’exécutif a décidé de « prendre des mesures supplémentaires dans les territoires les plus touchés », l’Ile-de-France et les Hauts-de-France, a déclaré le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, mercredi 17 mars, à l’issue du conseil des ministres. Ces mesures doivent rentrer en « application dès ce week-end », a-t-il souligné, afin de faire baisser la pression dans les services hospitaliers de ces régions, qui sont totalement saturés.

« Avec les variants, la donne a changé. C’est presque une nouvelle épidémie qui a commencé », a constaté M. Attal. La « situation se dégrade », a-t-il prévenu, avec « une incidence en hausse » sur trois-quarts du pays. Et un niveau de saturation des services de réanimation, jugé « préoccupant », dans plusieurs territoires.

Particulièrement en Ile-de-France, où « le virus n’est pas sous contrôle », s’est alarmé Martin Hirsch, le directeur de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), mercredi sur RTL, à cause d’un « taux d’incidence supérieur à 400 » pour 100 000 habitants. Dans la région, il y a actuellement « autant de malades en réanimation qu’il y en avait au pic de la deuxième vague », a-t-il alerté.

Deux scénarios
Une situation critique, qui pousse Emmanuel Macron à durcir le dispositif. « On continuera de prendre des décisions, comme on l’a fait depuis le début », a-t-il assuré mercredi, lors d’une visite au centre hospitalier de Poissy (Yvelines), où il a rencontré les équipes de réanimation et de soins critiques.

Les nouvelles mesures en Ile-de-France et dans les Hauts-de-France seront détaillées par le premier ministre Jean Castex, et le ministre de la santé, Olivier Véran, lors d’une conférence de presse jeudi à 18 heures. Si la perspective d’un confinement semble ne plus faire de doutes, reste à en déterminer les modalités exactes. « La question, c’est quel confinement ? Il faut voir la graduation des mesures », résume un participant au conseil de défense.

Selon plusieurs sources, deux scénarios restent sur la table pour ces deux régions : un confinement le week-end ou permanent. La première option, présentée comme la plus probable, a été avancée comme « une hypothèse » par Jean Castex, mardi soir, sur BFM-TV, sur le modèle du dispositif mis en place dans les agglomérations de Nice, Dunkerque (Nord) et le département du Pas-de-Calais. Elle recueille les faveurs de la présidente de l’Ile-de-France, Valérie Pécresse, qui privilégie un confinement le week-end, « moins pénible » qu’un confinement total.

Une certitude : les écoles resteront ouvertes en Ile-de-France et dans les Hauts-de-France. L’hypothèse de leur fermeture « ne fait pas partie de la base de travail », a assuré le porte-parole du gouvernement. « L’école, c’est ce qu’il faut fermer en dernier », soutient le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, en soulignant que « la contamination reste encore faible en milieu scolaire grâce au respect des mesures barrières ».

Restrictions « proportionnées, territorialisées »
Autre enseignement majeur : Emmanuel Macron écarte, pour l’heure, l’éventualité d’un confinement national. Mercredi, il a évoqué des restrictions « pragmatiques, proportionnées, territorialisées » pour « protéger les plus vulnérables et nos soignants ». « La stratégie localisée reste la bonne, a confirmé M. Attal. Elle permet de limiter de manière précise et proportionnée l’extension du virus. » Et d’épargner certains territoires, comme Provence-Alpes-Côte d’Azur, où le gouvernement ne prévoit pas « à ce stade » de mesures supplémentaires.

D’ici aux annonces de M. Castex jeudi, l’exécutif affiche sa volonté de trouver un consensus avec les élus locaux concernés, en menant des concertations. Mercredi, le premier ministre a tenu une réunion avec le comité de liaison parlementaire, qui regroupe les chefs de groupe à l’Assemblée nationale et au Sénat, afin de les informer des différents scénarios à l’étude. Une manière de répondre au procès instruit par l’opposition contre M. Macron, accusé de décider de tout, seul, « dans le secret du conseil de défense ». « Jamais le pouvoir n’a été aussi concentré. Un seul homme ne peut pas tout coordonner », a regretté le chef de file des sénateurs Les Républicains (LR, Vendée) Bruno Retailleau, mercredi.

Un an après avoir instauré un premier confinement national, le chef de l’Etat se retrouve une nouvelle fois à devoir restreindre les libertés pour contenir la troisième vague de l’épidémie. Une décision prise contraint et forcé. Un peu malgré lui, en somme, tant il entendait s’accrocher à son engagement du 29 janvier, considéré comme « un pari politique », de ne pas reconfiner. Il est possible que la France ne soit « jamais reconfinée », avait même osé déclarer le ministre de la santé, Olivier Véran, le 9 février.

Cinq semaines plus tard, la potion est amère. M. Macron, qui se vantait d’être le « maître des horloges » a dû reconnaître que l’exécutif était en train de perdre « la course de vitesse » entre les variants et le vaccin. « Le maître du temps, c’est le virus, malheureusement », a-t-il concédé, lundi 15 mars. Avec un mélange d’amertume et d’impuissance, dénoncé par le député (LR) du Lot Aurélien Pradié : « On est en train de mettre sous cloche la moitié du pays. Cette méthode du confinement est moyenâgeuse, on ne peut pas s’y habituer. »

Retards sur le front vaccinal
A cette perspective de confinements locaux vient s’ajouter la décision de suspendre le vaccin AstraZeneca, en raison des doutes sur de possibles effets secondaires, qui vient freiner la campagne de vaccination. Mercredi, M. Attal s’est dit « optimiste » sur la décision que devait annoncer jeudi l’Agence européenne des médicaments (EMA) sur ce vaccin, dont l’utilisation a été suspendue par plusieurs pays, comme la France, dans la foulée de l’Allemagne.

En cas de feu vert, le gouvernement entend « reprendre sans délai » les injections, afin d’atteindre les dix millions de personnes vaccinées au 15 avril. Un objectif toujours réalisable, selon le premier ministre. Mais désormais sous conditions. Encore faut-il que le vaccin d’« AstraZeneca puisse de nouveau être utilisé », « que les Français reprennent confiance en ce vaccin ». Et surtout « que les délais de livraison des doses soient respectés », selon lui.

Si les retards s’accumulent, le gouvernement assure toutefois être en mesure de tenir la promesse de M. Macron de proposer un vaccin à chaque adulte d’ici à la fin de l’été. Pour compenser les retards d’AstraZeneca, la ministre déléguée à l’industrie, Agnès Pannier-Runacher, mise notamment sur un doublement des livraisons du vaccin Pfizer-BioNTech, qui doivent atteindre 40 millions de doses fin juin.

Sans parvenir à lever les doutes et les critiques ; 81 % des Français estiment que l’exécutif a mal géré le nombre de doses de vaccin disponible, selon un sondage Elabe, publié le 16 mars. Une opinion en forte hausse (+ 11 points par rapport au 6 janvier).

Au sommet de l’Etat, les retards de livraisons inquiètent. « Si les labos n’honorent pas les commandes de l’Europe, c’est quand même nous qui prenons la balle ! », grince un pilier du gouvernement, où la prudence domine désormais.

Alors que la mi-avril avait été évoquée comme un possible horizon de sortie de crise, il y a quelques semaines, Jean Castex juge désormais qu’il n’est pas « raisonnable » d’annoncer « une date de réouverture » des musées ou des restaurants. Le premier ministre dit désormais espérer « une reprise de la vie normale en avril-mai », en restant flou sur le calendrier à venir. Comme si le pilotage à vue était redevenu de rigueur.