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Le Monde.fr : Fillon veut « débureaucratiser l’action sociale »

Janvier 2017, par infosecusanté

Fillon veut « débureaucratiser l’action sociale »

Le candidat Les Républicains à la présidentielle est allé à la rencontre de SDF à Paris, mercredi soir. Il a jugé la situation « intolérable », sans faire de promesses.

LE MONDE

19.01.2017

Par Matthieu Goar

de Paris, et François Fillon, à la Maison des voisins, à Paris, le 18 janvier.
Alors que les températures négatives se sont installées sur toute la France, François Fillon a adapté son programme de campagne. Mercredi 18 janvier, le candidat à la présidentielle issu de la primaire de la droite a effectué deux visites non prévues à son agenda. En début de soirée, le député (Les Républicains) de Paris s’est rendu dans la mairie du 1er arrondissement de la capitale, où ont été installés 19 lits de camp pour héberger des sans-domicile fixe et où
35 repas chauds sont servis tous les soirs par l’association Emmaüs solidarité. « C’est rudimentaire, mais la salle est chaude », a décrit Jean-François Legaret, maire (LR) de l’arrondissement.

Après avoir échangé avec un homme expulsé de son logement par son propriétaire il y a un mois, M. Fillon s’est rendu près de la Bourse du Travail pour parler avec Mustapha et Nordine, deux Marocains qui ont posé leur tente près d’une palissade de travaux publics. Arrivés en 2014 et en 2015, ils ont évoqué les « vols », les « violences » de la rue, leur difficulté à trouver un travail de paysagiste, mais aussi leur volonté de rester à Paris malgré les galères. « Quand je pars d’ici, j’ai le mal du pays », a ainsi confié Nordine.

Ce déplacement du candidat avait été organisé en toute discrétion. Seulement une poignée d’élus, notamment Valérie Pécresse, et quelques journalistes accompagnaient M. Fillon. Plus tôt dans la journée, François Hollande avait présidé une réunion interministérielle sur « la mise en œuvre du plan grand froid ». Selon les chiffres de l’exécutif, 130 000 places d’hébergement sont disponibles pour les personnes sans-abri. 3 400 places ont été ouvertes ces derniers jours. François Fillon n’a fait aucune promesse, mais a jugé la situation « intolérable ». « J’ai été en responsabilité. Je ne donne pas de leçons », a-t-il déclaré tout en dénonçant « l’autosatisfecit » de la gauche : « C’est une situation que je trouve intolérable dans un pays comme le nôtre. Je ne supporte pas que l’on ne cherche pas des solutions nouvelles pour régler des problèmes de plus en plus criants. (…) Dans notre pays qui bat des records de dépenses publiques, on devrait être capable de trouver des logements d’urgence pour que les gens ne dorment pas dans la rue. »

Réduire la part de l’Etat

Reste à savoir comment François Fillon veut, lui, améliorer la lutte contre la grande précarité tout en économisant 100 milliards d’euros sur le quinquennat. Dans son projet de la primaire, il souhaite mettre en place une allocation sociale unique et parle sans plus de précisions d’un « plan d’action pluriannuel de lutte contre la pauvreté et l’exclusion ». Mercredi, le candidat a évoqué la « chasse aux gaspillages », la « suppression des aides inutiles », la réduction de la « bureaucratisation de l’action sociale », tout en mettant « le paquet sur les associations qui font le travail que l’on a vu ce soir »…

Comme pour de nombreux pans de son programme, François Fillon veut réduire la part de l’Etat pour s’appuyer sur la solidarité de la société civile. Plus tôt dans la journée, il avait ainsi rencontré les membres de l’association Voisins solidaires, qui développe des relations d’entraide de proximité. « Dans le système public, la transaction prend parfois le pas sur la relation. La solidarité spontanée, elle, ne coûte rien, c’est un gisement sans fin », lui a expliqué Atanase Périfan, créateur de la Fête des voisins et conseiller (LR) de Paris. Le candidat s’est dit à plusieurs reprises très intéressé par l’initiative, qui ne reçoit pas de subventions de l’Etat. « Quand on veut faire mieux avec moins d’argent, il faut être créatif », poursuit Mme Pécresse, présidente LR de la région Ile-de-France.

Sur ce sujet comme sur d’autres, François Fillon poursuit donc sur sa ligne de désengagement de l’Etat, tout en essayant de ne pas se montrer totalement coupé des préoccupations sociales. Un exercice d’équilibriste imposé par l’ambiance politique de ce début d’année. Alarmés par les sondages en baisse, certains élus de son propre camp commencent à s’inquiéter de son programme « radical » en matière d’économie. Mercredi matin, lors d’une réunion au QG, des parlementaires lui ont demandé de mettre un peu plus d’espoir dans sa campagne.

M. Fillon assure que cela ne le fera pas dévier de sa ligne. « Je suis imperméable, car ce sont les mêmes critiques que pendant la primaire et ce sont les mêmes critiques qui ne nous ont pas permis de réussir en 2002, 2007 et 2012. » Depuis le début de l’année, il a pourtant donné une coloration plus sociale à son agenda. Le 3 janvier, il avait déjà effectué un déplacement dans un centre Emmaüs du 19e arrondissement de Paris. Et, sans rien enlever à son programme d’économies, il devrait faire des annonces en matière de pouvoir d’achat lors d’un meeting à Paris, le 29 janvier.

Matthieu Goar
Journaliste au Monde