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Le Monde.fr : La santé, nouvel axe du discours frontiste

Mai 2016, par infosecusanté

La santé, nouvel axe du discours frontiste

LE MONDE

17.05.2016

Par Olivier Faye

S’il ne devait retenir qu’un sujet, ce serait celui-ci. « Nous n’avons pas mis assez en avant la question de la santé », reconnaît Florian Philippot, vice-président du Front national. Le parti d’extrême droite est connu pour ses positions contre l’immigration, l’euro ou l’Union européenne. Mais il peine encore à faire entendre sa voix sur de nombreuses questions qui régissent le quotidien. Mardi 17 mai, le FN lance un « collectif des usagers de la santé », une dixième structure créée en trois ans, après celles sur l’éducation, les PME ou encore l’écologie. Et qu’importe que certains, au sein du parti, qualifient ces collectifs de « coquilles vides ».

A un an de l’élection présidentielle de 2017, le FN veut croire que la santé peut jouer un rôle clé dans son entreprise de conquête du pouvoir. « Le vieillissement est une problématique qui interpelle, nous avons un travail à faire là-dessus. Cela touche tous les Français, tout le monde a quelque chose à dire sur le sujet », note un cadre frontiste. « La France est une grosse consommatrice du système de santé avec le vieillissement de la population », ajoute M. Philippot.

L’objectif est à peine voilé : parvenir à toucher les seniors, qui sont les plus rétifs à voter pour la formation dirigée par Marine Le Pen. Selon le directeur du département Opinion de l’Ifop Jérôme Fourquet, seuls 19 % des plus de 65 ans ont voté pour le Front national au premier tour des élections régionales de décembre 2015. Un score largement inférieur au résultat de 27,73 % obtenu à cette occasion par le parti d’extrême droite. La peur d’une sortie de la zone euro – proposition phare du FN – est notamment perçue comme un frein auprès des personnes âgées, soucieuses de préserver leur épargne. Pour les rassurer, il convient donc de se montrer en pointe sur des sujets qui les concernent.

Le discours anti-islam appliqué aux hôpitaux

Marine Le Pen s’était déjà essayée à un long développement sur cette thématique, en septembre 2015, lors de son discours de clôture de l’université d’été du FN, à Marseille. Las, le passage en question n’avait pas suscité d’intérêt particulier de la part de la presse, ni soulevé la clameur des militants, plus enclins, en pleine crise migratoire, à applaudir ses phrases chocs contre l’immigration ou l’« islam radical ».

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Le propos de la députée européenne sur le système de santé, « qui subit tout à la fois les ravages de l’austérité imposée par Bruxelles, et les drames du communautarisme, qui sont eux-mêmes la conséquence directe d’une immigration massive incontrôlée », reprenait pourtant les principaux axes du discours frontiste, pour les appliquer à la question de la santé.

S’il dénonce la faiblesse des rémunérations des personnels hospitaliers, les suppressions de lits, les déremboursements de médicaments ou les non-renouvellements de postes, le parti d’extrême droite s’appuie aussi sur ses arguments habituels pour aborder le sujet : la sécurité et la dénonciation du rôle de l’islam. « Combien de médecins ont été agressés dans leurs cabinets ? Combien d’urgentistes brutalisés par des maris obscurantistes, refusant de laisser approcher leurs femmes par un homme, qui est payé pour les soigner ? », s’interrogeait ainsi Mme Le Pen dans son discours à Marseille.

« L’insécurité, les incivilités, un pouvoir d’achat qui n’augmente pas : les personnels hospitaliers arrivent à exaspération », note la députée européenne Joëlle Mélin, spécialiste de la santé au sein du FN. Reste à voir si ces arguments seront suffisants pour convaincre de la crédibilité du parti sur cette question.

Olivier Faye
Journaliste au Monde