Revenu de base - Salaire universel

Le Monde.fr ; Le débat sur le « revenu universel » agite aussi... la Silicon Valley

Juin 2016, par infosecusanté

Le débat sur le « revenu universel » agite aussi... la Silicon Valley

LE MONDE ECONOMIE

04.06.2016

Par Corine Lesnes (San Francisco, correspondante)

Les ténors de la Silicon Valley ne sont pas tous insensibles aux conséquences sociales de la révolution technologique. Même dans ce paradis libertarien, l’idée d’un revenu minimum universel fait son chemin. Sam Altman, l’un des jeunes gourous de la Vallée, avait le projet en tête depuis plus d’un an. Il vient de passer à la phase des essais. L’entrepreneur a annoncé, le 31 mai, sur son blog, le démarrage de son projet « Basic Income » (revenu de base). « Dans cinquante ans, il paraîtra ridicule que nous ayons utilisé la peur de ne pas avoir à manger pour motiver les gens », estime-t-il.

Sam Altman, 31 ans, fondateur de Y Combinator, l’un des principaux incubateurs de la Silicon Valley, est un personnage à part dans la « tech ». Il lui arrive de « se lever le matin » en s’interrogeant sur un métier qui consiste à « détruire l’emploi » de nombre de ses concitoyens. En mai 2015, il mettait en garde contre les réductions d’emploi « massives » qui s’annoncent. Et il regrettait que la société américaine ne soit pas préparée au moment où le travail ne sera plus le centre de l’existence.
10 millions de dollars*

Son parcours est de ceux qui font rêver les « geeks ». Après avoir intégré le club d’élite des étudiants en informatique de Stanford, il a laissé tomber l’université à 19 ans pour fonder Loopt, une application permettant de localiser ses amis sur mobile. Trois ans plus tard, il a revendu la start-up pour 43 millions de dollars (38 millions d’euros). Son incubateur, Y Combinator, a financé un millier de sociétés, dont plusieurs, comme Airbnb ou Dropbox, ont atteint des valorisations de plusieurs milliards.

Sam Altman va consacrer 10 millions de dollars à YC Research, la branche de recherches de l’incubateur, qui supervisera l’étude sur le revenu universel. Loin du principe « à chacun selon ses besoins », « Basic income » entend donner le même « salaire » à tout le monde. Il ne s’agit pas « de socialisme, insiste l’investisseur. Le revenu minimum est un plancher. Après, les gens peuvent s’enrichir comme ils veulent ». Selon lui, les progrès techniques permettront, à terme, de générer « une abondance de ressources » qui réduira considérablement le coût de la vie.

L’étude devra répondre à plusieurs questions de base : « Est-ce que les gens restent assis devant leurs jeux vidéo ou créent-ils de nouvelles choses ? Sont-ils heureux, épanouis ? Apportent-ils globalement plus de valeur à l’économie qu’ils n’en reçoivent » ? La phase pilote va commencer à Oakland, de l’autre côté de la baie de San Francisco. Elle décidera du protocole d’expérience : comment choisir les participants, et surtout combien les payer. Les bénéficiaires du revenu minimum seront libres de travailler, de devenir bénévoles, d’entamer des études, d’aller s’installer dans un pays étranger. « Nous voulons voir ce que les gens font de leur liberté », indique M. Altman.

Corine Lesnes (San Francisco, correspondante)
Correspondante du Monde aux Etats-Unis basée à San Francisco