Réforme retraites 2023

Le Monde.fr : Réforme des retraites : le Sénat vote le recul de l’âge légal à 64 ans, l’examen complet du texte avant dimanche encore incertain

Mars 2023, par infosecusanté

Le Monde.fr : Réforme des retraites : le Sénat vote le recul de l’âge légal à 64 ans, l’examen complet du texte avant dimanche encore incertain

L’article 7 a été adopté assez largement, dans la nuit de mercredi à jeudi, par Les Républicains, l’Union centriste, les Indépendants et le groupe macroniste. « Je me réjouis que les débats aient permis de parvenir à ce vote », a réagi Elisabeth Borne.

Par Mariama Darame et Jérémie Lamothe

Publié le 09/03/2023

Il aura fallu quinze heures de débats et son lot de séances mouvementées entre la majorité de droite et du centre et la gauche pour que le Sénat adopte en première lecture, à 00 h 10, dans la nuit du mercredi 8 au jeudi 9 mars, l’article 7 de la réforme des retraites. Le cœur du projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, qui prévoit le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et l’allongement de la durée de cotisations, a été voté assez largement par Les Républicains (LR), l’Union centriste, les Indépendants et le groupe macroniste, avec 201 voix pour, 115 contre et 29 abstentions.

Fragilisé par la mobilisation syndicale qui ne faiblit pas contre un projet de réforme toujours en quête d’une majorité sûre à l’Assemblée nationale, le ministre du travail, Olivier Dussopt, a salué, sur BFM-TV, « un vote de responsabilité du Sénat, qui a fait le choix de suivre le gouvernement ». Là où les députés n’étaient pas arrivés à franchir le cap de l’article 3 concernant les alternatives de financement de la réforme, M. Dussopt a affiché son souhait que « l’ensemble des articles du texte soient débattus et adoptés » d’ici à la date limite de l’examen au Sénat, fixée au dimanche 12 mars à minuit. « Je me réjouis que les débats aient permis de parvenir à ce vote », a réagi la première ministre, Elisabeth Borne.

Sous la présidence de séance du président LR du Sénat, Gérard Larcher, la deuxième partie de soirée, qui a abouti au vote du report de l’âge légal, mercredi, a aussi vu l’adoption de quelques amendements transpartisans. Dont un permettant aux enseignants en école primaire de partir à la retraite en cours d’année scolaire.

« Jamais nous n’accepterons que vous “mélenchonisiez” le Sénat »
Dans la nuit de mardi à mercredi, les débats avaient pris une tournure éruptive, marquée, pour la première fois depuis 2015, par le recours à l’article 38 du règlement, par la droite. Celui-ci permet « la clôture des débats » en réduisant les demandes de prises de parole sur un amendement ou un article. Depuis, il a été demandé à quatre reprises sur des amendements de la gauche, mercredi, par Bruno Retailleau (LR), François Patriat (Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, majorité présidentielle) et le centriste Claude Malhuret (Indépendants).

Une utilisation justifiée selon eux par « l’obstruction » de la gauche à coups de milliers d’amendements. L’image de « sérénité » et de « sagesse » qu’aime à revendiquer le Palais du Luxembourg s’est retrouvée écornée face à la multiplication des procédures parlementaires, des suspensions de séance et du départ in fine des groupes de gauche de l’hémicycle. La majorité sénatoriale avait fait voter une réécriture de l’article 7 rendant caduques d’un seul coup 1 100 amendements en majorité issus de la gauche.

La droite et le centre, bien que majoritaires, se retrouvent déstabilisés par l’aplomb dans l’hémicycle des groupes de gauche, ragaillardis par la mobilisation sociale. « Jamais nous n’accepterons que vous “mélenchonisiez” le Sénat », a mis en garde Bruno Retailleau.

Une guérilla parlementaire s’annonce donc dans les prochaines heures entre la gauche, qui ne souhaite pas forcément aller au bout de l’examen du projet de loi, et la droite, qui en fait une priorité. Mercredi matin, la conférence des présidents, en vertu de l’article 42 du règlement, a entériné la décision de limiter les prises de paroles à un orateur par groupe pour les explications de vote sur les articles comme sur l’ensemble du texte, jusqu’à la fin de l’examen du projet de loi.

« Une ligne rouge a été franchie »
Pour la présidente du groupe communiste, Eliane Assassi, « une ligne rouge a été franchie », portant « gravement atteinte au principe constitutionnel de clarté et de sincérité des débats. Votre objectif, c’est de censurer l’opposition ». Pour contrer cette accélération des débats souhaités par la majorité sénatoriale, les élus de gauche ont déposé quelque 200 sous-amendements.

Malgré les critiques, la gauche sénatoriale continue ainsi son opposition frontale à une réforme dont elle réclame le retrait. Après s’en être prise directement à Olivier Dussopt, dont le nom « restera à jamais attaché à une réforme qui fait revenir presque quarante ans en arrière », la sénatrice socialiste des Landes Monique Lubin a condamné un projet de loi qui « fera travailler plus longtemps les salariés les plus modestes ».

Habitué à voter au cours de chaque budget de la Sécurité sociale depuis quatre ans un amendement LR repoussant l’âge légal de départ à la retraite couplé à l’allongement de la durée de cotisations, la majorité sénatoriale a, pour sa part, défendu la « nécessité financière » de ce projet. Cet article 7 « permettra de sauver le régime de retraite par répartition », a assuré M. Retailleau. Mais la droite et le centre n’ont pas fait le plein des voix mercredi soir, avec 15 abstentions et deux votes contre chez LR, ainsi que 12 votes contre et 10 abstentions chez les centristes.

Désormais, il reste 13 articles à examiner d’ici à dimanche minuit. Avec une incertitude qui plane quant à la capacité des sénateurs à procéder à un vote final sur l’ensemble du texte. « Que deviendrait [la démocratie représentative] si ni l’Assemblée, ni le Sénat, ne se prononçait sur un texte aussi essentiel ? », s’est inquiété mercredi soir le sénateur centriste du Nord Olivier Henno.