Politique santé sécu social de l’exécutif

Le Monde.fr : Retraites : le calendrier de la réforme dans le flou

Juin 2019, par infosecusanté

Le Monde.fr :
Retraites : le calendrier de la réforme dans le flou

Dans son discours de politique générale, Edouard Philippe a seulement confirmé que Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire chargé du dossier, ferait comme prévu ses « recommandations » en juillet.

Par Raphaëlle Besse Desmoulières •

Le 12 juin 2019

Ceux qui attendaient des précisions sur le calendrier de la réforme des retraites en seront pour leurs frais. Edouard Philippe n’a pas détaillé, dans son discours de politique générale mercredi 12 juin à l’Assemblée nationale, les prochaines étapes de ce vaste chantier qui vise à fusionner les 42 régimes existants en un système universel. Le premier ministre a seulement confirmé que Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire chargé du dossier, ferait comme prévu ses recommandations en juillet.

Si le premier ministre avait affirmé fin avril que le projet de loi serait présenté d’ici « à la fin de l’été », Matignon expliquait mercredi que ce serait plutôt « à l’automne ». L’hypothèse d’un examen à l’Assemblée nationale avant la fin de l’année, qui avait été évoquée, semble désormais compromise. « La probabilité est faible, reconnaît une source proche du dossier. C’est plutôt pour début 2020 mais rien n’est décidé encore. » Il semble cependant compliqué de parvenir à glisser la réforme des retraites dans un agenda parlementaire déjà très chargé.

Toujours selon Matignon, entre le rapport de M. Delevoye et la présentation du projet de loi, une deuxième concertation s’ouvrira avec les partenaires sociaux « sur la base des préconisations » du haut-commissaire. Un schéma qui a récemment été évoqué par M. Delevoye devant plusieurs de ses interlocuteurs syndicaux. « Le calendrier précis dépendra de la concertation », ajoute-t-on dans l’entourage de M. Philippe.

Age légal maintenu à 62 ans

Le chef du gouvernement a aussi confirmé ce qu’avait annoncé Emmanuel Macron fin avril : l’âge légal de départ en retraite sera maintenu à 62 ans mais l’exécutif définira « un âge d’équilibre et des incitations à travailler plus longtemps », a indiqué l’ancien maire du Havre, sans plus de précisions. Le président de la République avait pour sa part parlé fin avril d’« un système de décote » autour de 63 à 64 ans : avant cette borne, la pension serait minorée ; après, elle pourrait être majorée. Un changement de vocabulaire pour désigner un mécanisme similaire, également appelé âge pivot, qui n’avait pas été évoqué par M. Delevoye lors de la concertation de plus d’un an menée avec les partenaires sociaux. Ce dernier s’était contenté de parler de bonifications pour ceux choisiront de continuer leur activité après 62 ans. Mais pour M. Philippe, ainsi, « chacun pourra faire son choix, en liberté et en responsabilité ».

Cette idée fait bondir les syndicats. Dans un communiqué, la CFDT, pourtant la plus ouverte à un système universel de retraites, a ainsi jugé qu’« une telle mesure compromettrait l’équilibre du projet de réforme et le rendrait inacceptable ». « Un âge d’équilibre identique pour tous qui n’est ni nécessaire financièrement ni juste pour celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt », ajoute la centrale dirigée par Laurent Berger.

L’exécutif à la recherche d’économies

Les tensions pourraient redoubler s’il se confirmait que le gouvernement envisage bien de modifier les paramètres du système actuel de retraites. L’exécutif est en en effet à la recherche d’économies à court terme pour financer les mesures d’urgence annoncées depuis décembre. D’autant que le rapport de la commission des comptes de la Sécurité sociale, publié mardi et qui fait état d’une dégradation des comptes sociaux, comme les projections inquiétantes du Conseil d’orientation des retraites sur la trajectoire financière du système, détaillées dans une version quasi définitive du rapport annuel de l’organisme également dévoilée mardi, donnent des arguments à ceux qui, au sein du gouvernement, plaident en ce sens.

L’hypothèse d’une accélération du calendrier de la loi Touraine de 2014, qui a augmenté le nombre de trimestres nécessaires pour une retraite à taux plein à 172, soit 43 ans, et doit progressivement entrer en vigueur à partir de l’année prochaine, est aussi sur la table. Cela pourrait intervenir dès cet automne dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020. Le chef de l’Etat, comme son premier ministre, ont par ailleurs maintenu une ambiguïté : celle de savoir si la « décote » ou l’« un âge d’équilibre » s’appliquerait uniquement dans la future réforme, prévue pour entrer en vigueur à partir de 2025, ou avant.

Raphaëlle Besse Desmoulières