Les mobilisations sur les retraites

Le Monde.fr : Retraites : les syndicats appellent à une nouvelle journée de mobilisation mardi 17 décembre

Décembre 2019, par infosecusanté

Le Monde.fr : Retraites : les syndicats appellent à une nouvelle journée de mobilisation mardi 17 décembre

Mardi 10 décembre au soir, à la veille des annonces d’Edouard Philippe sur le contenu de la réforme des retraites, l’intersyndicale a annoncé une nouvelle mobilisation pour le mardi 17.

Par Bertrand Bissuel et Raphaëlle Besse Desmoulières •
Publié le 11/12/2019

Deux fois moins nombreux qu’il y a cinq jours, mais tout aussi déterminés. Les opposants à la réforme des retraites étaient, mardi 10 décembre, 339 000 à battre le pavé dans toute la France, selon le ministère de l’intérieur, 885 000 selon la CGT. Si les transports sont restés fortement perturbés mardi – une situation qui devrait perdurer mercredi et les jours suivants à la RATP et à la SNCF –, la mobilisation était donc en baisse. Mais pas de quoi décourager l’intersyndicale à l’origine de cet appel interprofessionnel.

Dans la soirée, la CGT, FO, Solidaires, la FSU et des organisations de jeunesse ont appelé à des grèves et à des manifestations, « localement », jeudi 12 décembre – au lendemain des annonces d’Edouard Philippe sur le futur système universel –, et ce week-end. Elles entendent aussi et surtout faire du mardi 17 décembre une « nouvelle journée de mobilisation interprofessionnelle massive ».

« Faire plier ce gouvernement »

« On compte faire plier ce gouvernement, a lancé Catherine Perret, numéro deux de la CGT. C’est le moment d’en mettre un grand coup pour qu’enfin [il] nous entende. » Dans son communiqué, l’intersyndicale, qui s’est réunie au siège de Force ouvrière, avenue du Maine, à Paris, a considéré que le mouvement « s’est inscrit depuis le 5 décembre dans la durée ».

Selon elle, la journée du 10 décembre a été « un nouveau temps fort avec de nouveaux salariés du privé et davantage de jeunes ». « Il y a eu sans doute des salariés qui n’ont pas fait grève aujourd’hui parce que ça coûte cher, la grève ; c’est perdre des journées de travail », a cependant reconnu Mme Perret. Mais, pour Eric Beynel, l’un des porte-parole de Solidaires, le mouvement « dépasse largement le seul secteur de ceux qu’on a tenté de jeter en pâture – les régimes soi-disant privilégiés » : le 17 « doit être un moment d’irruption des travailleurs dans les manifestations », a-t-il martelé.

L’intersyndicale attend de M. Philippe qu’il ouvre des négociations pour améliorer le système actuel.

L’intersyndicale attend désormais de M. Philippe qu’il tienne compte du « rejet massif » exprimé ces derniers jours, en retirant son projet et en ouvrant « sans préalable » des négociations pour améliorer le système actuel. Comme la semaine dernière, la CFE-CGC, qui ne s’était pas associée à l’action de mardi, était représentée lors de la rencontre au siège de FO, mais elle n’a pas signé le texte commun.

L’envoi d’un communiqué par la CGT pour appeler à deux nouvelles dates de mobilisation les 12 et 17 décembre a tendu l’atmosphère – le texte ayant été diffusé avant la fin de la réunion intersyndicale. Une façon de procéder qui a agacé ses partenaires, notamment FO. « Il n’y a pas eu de soucis ni de frictions », a cependant affirmé Frédéric Souillot, l’un de ses dirigeants :d’après lui, la longueur de la réunion était due à « des problèmes d’orthographe »…. « La CGT s’est impatientée et s’est excusée », a indiqué Mme Perret. « L’intersyndicale est, plus que jamais, unie », a assuré M. Souillot.

Il n’en demeure pas moins que la confédération de Philippe Martinez est susceptible de « donner l’impression qu’elle se montre sûre d’elle-même et qu’elle veut apparaître comme la meneuse des luttes », relève Raymond Soubie, président du groupe en stratégie sociale Alixio et fin connaisseur de ces thématiques : « Or, poursuit-il, une telle posture, si elle vient à se confirmer, n’est pas forcément en adéquation avec la réalité des rapports de force et – moins encore – avec les aspirations des autres organisations qui s’opposent à tout ou partie de la réforme. »

Des opérations plus décentralisées toute la semaine

Organiser une nouvelle journée interprofessionnelle dès jeudi s’avérerait compliqué en termes de logistique pour les confédérations de salariés – sans compter le risque qu’elle se transforme en échec. Le fait de retenir cette date, en vue d’opérations plus décentralisées, leur permet toutefois de ne pas être absentes ces prochains jours, tout en se projetant sur le 17 décembre, avec l’espoir que les annonces de M. Philippe leur permettent d’élargir le mouvement. D’autant que, ce jour-là, une mobilisation des personnels hospitaliers est également programmée.

D’autres organisations pourraient à l’inverse rentrer dans le rang si elles décrochaient des concessions suffisantes à leurs yeux. Ainsi, la CFDT-Cheminots pourrait mettre fin à sa mobilisation si la « clause du grand-père » – qui consiste à n’appliquer la réforme qu’aux nouveaux embauchés – était retenue pour les régimes spéciaux. Une hypothèse que ne semblait pas retenir Edouard Philippe, mercredi.

Les actions programmées jeudi laissent la main « aux organisations locales ou aux assemblées générales, ce qui n’est jamais un très bon signe », juge Dominique Andolfatto, chercheur en sciences politiques à l’université de Bourgogne-Franche-Comté. A ses yeux, ce type de configuration peut préfigurer « un mouvement en archipel qui risque de se disperser et de se dissiper face à un gouvernement qui reste ferme sur les principes de la réforme ». « C’est aussi une sorte de stand-by en attendant les précisions sur la réforme que doit annoncer le premier ministre », complète-t-il.

Bertrand Bissuel et Raphaëlle Besse Desmoulières