Le privé (cliniques, centres de santé, hôpitaux...)

Le Parisien - Coronavirus à Melun : le loyer demandé par la clinique privée à l’hôpital public fait tousser les syndicats

Mai 2020, par Info santé sécu social

Le directeur du groupe hospitalier sud Ile-de-France attend une facture d’environ 50 000 euros dans le cadre d’une convention signée avec le groupe Saint-Jean l’Ermitage qui lui a loué une aile d’hébergement de 36 lits durant la crise du Covid-19.

Par Sophie Bordier
Le 18 mai 2020

« C’est scandaleux ! A l’heure où des entreprises, des collectivités et des particuliers ont fait des dons de masques, de surblouses, etc, à notre hôpital, la clinique facture un loyer à l’hôpital pour avoir prêté un espace de 36 lits. On nous parle de 20 000 euros par mois. Faire du business en ce moment, c’est inadmissible ! » Les adhérents du syndicats Sud Santé du Groupe hospitalier sud Ile-de-France (GHSIF) voient rouge.

En cause : la convention qui lie l’hôpital à la clinique Saint-Jean l’Ermitage qui jouxte ses murs au sein du Santépôle. Pour faire face à la grave crise sanitaire liée au coronavirus et à l’afflux de patients, le site privé qui a dû stopper ses activités chirurgicales programmées mi-mars a reconverti son bloc opératoire en unité de réanimation de quinze lits ; l’Agence régionale de santé (ARS) l’a dédommagé pour cela.

Mais la clinique a aussi mis à disposition de l’hôpital une aile d’hébergement de 36 lits de début avril au 14 mai. Le GHSIF y traitait des patients de médecine atteints du Covid-19 , mais aussi des patients de chirurgie pouvant être Covid-19 positifs ou négatifs (mais très souvent négatifs). La chirurgie était évidemment à distance de la partie médecine. Au final, ce geste s’est traduit par le paiement d’un loyer.

« Contrepartie équitable »
« La convention prévoit un loyer de 20 000 € TTC par mois pour 15 lits et 48 000 € TTC par mois pour 36 lits. La location a pris fin car l’hôpital a retransféré le 14 mai les derniers malades présents au sein de la clinique », précise Dominique Peljak, le directeur du groupe hospitalier Sud Ile-de-France. Selon lui, « Les loyers qui seront facturés par la clinique s’élèvent à environ 50 000 euros . La facture n’est pas encore émise puisque la location vient de prendre fin. »

« C’est honteux ! », lance Fabienne Bezio, déléguée CGT au GHSIF. « D’autant plus que la clinique a touché 350 000 euros de l’ARS alors que ce sont les médecins et une partie du personnel de l’hôpital qui se sont occupée de cette aile !Bon, le principal, c’est qu’on a soigné les patients ! »

Le Dr Philippe Cosson, dirigeant de la clinique Saint-Jean l’Ermitage, estime que le loyer demandé à l’hôpital est une « contrepartie équitable »
Directeur de la clinique Saint-Jean l’Ermitage, le Dr Cosson garde pour lui le montant de la transaction entre l’hôpital et son établissement. Mais il insiste : « Cet accord avec le GHSIF a été parfaitement consensuel, n’en déplaise aux syndicats de l’hôpital. Il correspond à une mise à disposition de nos propres locaux, sur lesquels nous payons nous même un crédit bail, justifiant une contrepartie équitable, d’autant que cette activité a évidemment généré du chiffre d’affaires pour le GHSIF. Notre activité s’est effondrée de 80% pendant la même période, avec des charges fixes... »

En fait, la chirurgie programmée représente 90 % de l’activité de la clinique qui réunit 70 praticiens et 210 salariés. Or, sur injonction de l’Etat dans le cadre de l’activation du niveau 2 du Plan blanc, les activités chirurgicales non urgentes ont été reportées partout en France dès le 12 mars...

Plus de 4 millions d’euros de surcoût liés au Covid-19 pour l’hôpital
« Les conditions de cet accord ont d’ailleurs dû plutôt satisfaire le GHSIF puisque son directeur m’a demandé tout récemment si nous pourrions de nouveau lui accorder cette mise à disposition en cas de besoin dans les mois qui viennent si rebond épidémique », conclut le Dr Cosson.

Et il poursuit : « Le GHSIF a perçu, en deux fois, près de 2,5 M€ d’aide pour les couvrir ; d’abord 1,5 M€ puis un peu moins d’1 M€. L’ARS nous a indiqué que tous les surcoûts Covid-19 seraient couverts. J’ai confiance dans la parole donnée par l’Etat. En fin de crise, j’imagine qu’il y aura d’autres délégations de crédits . »