Industrie pharmaceutique

Le Parisien - Déficit de la Sécu : les laboratoires pharmaceutiques se rebiffent

Octobre 2016, par Info santé sécu social

Daniel Rosenweg

Trop c’est trop ? Souvent montrés du doigt pour l’envolée tarifaire de certaines innovations et un lobbying très très actif, les laboratoires de médicaments, représentés par le syndicat Leem (les entreprises du médicament), protestaient chaque année contre l’effort demandé au secteur pour contribuer à réduire le déficit de l’assurance maladie. Mais le Projet de loi de financement de la sécurité sociale, 0leur est cette fois rester en travers de la gorge. Entre baisse des prix et baisse des prescriptions demandée aux médecins, l’industrie pharmaceutique va contribuer à plus de 1,6 milliard d’euros au comblement du trou de la sécu en 2017.

Plus qu’une paille comparée aux 22,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires réalisé sur les médicaments remboursables en 2015. De quoi aussi mettre « sérieusement en danger la capacité d’innovation du secteur », disent-ils, à un moment où « la course mondiale à l’innovation nécessite des moyens ». Sans compter l’impact sur l’emploi, le secteur ayant déjà fait un gros ménage dans ses effectifs.3500 emplois supprimés depuis 2014. « Onze PSE (plans de sauvegarde de l’emploi) sont en cours dans nos entreprises, rappelait ce midi Patrick Errard, président du Leem. Entre 2015 et 2016, nous aurons supprimé 3500 postes de collaborateurs dans nos entreprises. « Je vois beaucoup de gens se précipiter pour sauver les 400 emplois d’Alstom, mais personne pour s’intéresser à ceux de notre secteur », ironise le patron du Leem.

La capacité d’innovation menacée

Si le Leem « tire la sonnette d’alarme », comme il dit, c’est parce que cette fois, « C’est le financement de l’innovation que ce PLFSS met en péril, martèle Patrick Errard. On nous a d’abord mis à contribution sur les blockbusters (Médicaments rentables à grosse diffusion), puis sur les génériques, et maintenant qu’il n’y a plus rien à prendre de ces côtés là, les pouvoirs publics se servent sur l’innovation ». Résultat, selon le Leem toujours, là où il y a dix ans la France pesait 5,3% du marché mondial de la production, elle ne représente plus que 3,4%. Malgré les nouveaux médicaments innovants et chers, son chiffre d’affaires est resté le même depuis 2012 alors qu’ailleurs il ne cesse de grandir. En Allemagne entre 2014 et 2015, il a progressé de 6%, au Royaume Uni de 10%, en Italie de 13% et en Espagne de 16%. Enfin et surtout, sa capacité d’investissement ne cesse de reculer. Selon le ministère de la Santé, de 5 milliards en 2008, l’investissement en R&D était déjà tombé à 4,5 milliards en 2013.

5,6 milliards de contribution en 4 ans

S’il est vrai que l’industrie pharmaceutique n’est pas toujours exemplaire sur ses pratiques tarifaires, il est vrai que depuis le début de la crise, elle a été beaucoup mise à contribution pour combler le déficit de l’assurance maladie. « Sur dix milliards d’euros d’économies, les industriels du médicament en ont fournis 5,6. Notre contribution atteint 56% alors que notre poids dans la dépense de santé n’est que de 15% », souligne de son côté Eric Baseilhac, directeur des affaires économiques et international au Leem.Du coup, les industriels se lâchent, dénoncent « les lenteurs administratives qui aboutissent à un délai de 400 jours pour qu’un médicament arrive sur le marché, contre cent jours aux Pays-Bas, par exemple » et soulignent les fausses économies figurant dans le PLFSS. Ils préviennent donc : « c’est l’attractivité de la France qui est en jeu cette fois, et par là l’emploi mais aussi l’accès à l’innovation et l’indépendance sanitaire ».

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