Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Le Quotidien du médecin - 5 000 médecins libéraux toujours non vaccinés : l’Ordre national promet des poursuites

Septembre 2021, par Info santé sécu social

PAR LOAN TRANTHIMY - PUBLIÉ LE 15/09/2021

Lors de sa conférence de rentrée, ce mercredi, le Dr Patrick Bouet, président du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom), s’est montré extrêmement ferme sur le respect de l’obligation vaccinale par la profession, qui entre en vigueur ce 15 septembre. « Ceux qui sont réfractaires à la vaccination ne feront plus de médecine », a-t-il lancé

« C’est un peu plus de 10 000 médecins dont un peu moins de 5 000 médecins libéraux. Ce n’est pas une petite quantité. Notre objectif est de 100 % vaccinés », a martelé le généraliste de Villemomble (Seine-Saint-Denis).

Les ARS aux manettes

Dans ce contexte, le patron de l’Ordre regrette que son instance ne dispose pas de toutes les informations nécessaires pour agir contre les médecins réfractaires, surtout pour les libéraux. « Il y a une instruction relative aux médecins hospitaliers et salariés. Mais on attend une instruction ministérielle dont on nous dit qu’elle est en arbitrage sur la procédure pour les libéraux », dit-il.

La loi du 5 août 2021 donne pourtant un cadre de contrôle du statut vaccinal des médecins libéraux – conventionnés ou pas – dont la mission revient aux agences régionales de santé (ARS). Ces dernières sont habilitées à prendre connaissance des données relatives au statut vaccinal des médecins avec le concours de l’Assurance-maladie. La loi prévoit aussi que l’ARS concernée informe l’Ordre lorsqu’elle « constate qu’un professionnel de santé ne peut plus exercer son activité [en raison de l’obligation vaccinale] depuis plus de trente jours ».

C’est sur la base de cette information que l’Ordre agira au niveau départemental et national pour engager des poursuites disciplinaires vis-à-vis des praticiens réfractaires pour non-respect du code de déontologie. « Nous n’avons pas accès aux données nominatives. C’est à l’ARS de nous les transmettre. Et nous ne pouvons pas suspendre les médecins en urgence, ce pouvoir appartient aux ARS », a rappelé le Dr Bouet.

Les sanctions infligées aux libéraux restent à préciser. Selon l’ARS Ile de France contactée par « Le Quotidien », le type de sanctions dépendra de la situation et aura un « caractère progressif » : mises en demeure, interdiction d’exercice, suspension des remboursements par l’Assurance-maladie… « Mais la suspension des remboursements concerne-t-elle également le remplaçant du médecin qui a eu cette décision de l’Assurance-maladie  ? Il y a des interrogations. Dans certaines situations, il faudra proposer des solutions pour assurer la continuité des soins », suggère le patron du Cnom. Quoi qu’il en soit, en cas de plainte de patients, des poursuites disciplinaires seront systématiquement engagées contre les médecins non vaccinés qui exercent.

« Moi-même, je fais l’objet de menaces »

C’est donc dans cette situation encore complexe que l’Ordre entend agir avec « sang froid » pour tenir « la barque de l’action sanitaire et de la sécurité de la population ».

Le Cnom ne sous-estime pas non plus les menaces « lourdes » et appels à la haine qui pèsent contre les soignants depuis la rentrée. « Moi-même, je fais l’objet de menaces comme d’autres membres de l’Ordre. C’est une très grande violence », a-t-il confié. Face à de tels faits, l’instance ordinale incite les médecins concernés à les signaler et à porter plainte auprès des conseils départementaux, capables d’engager des poursuites. Pour l’heure, une vingtaine de plaintes ont été portées à la connaissance de l’Ordre national. « Mais c’est inférieur à ce qui peut exister et ce sont des plaintes qui émanent davantage des acteurs représentatifs que des médecins visés individuellement », a-t-il précisé.

Reconnaissant que les actions contre les réseaux sociaux sont compliquées, le président de l’Ordre a demandé au ministère de l’Intérieur et au secrétariat d’État chargé de la transition numérique « d’assurer la sécurité des professionnels et de renforcer les moyens informatiques pour contrôler les réseaux sociaux ».

40 médecins poursuivis par l’Ordre

Dans un autre registre, l’Ordre rappelle avoir saisi directement les chambres disciplinaires de première instance de plaintes à l’égard d’une quarantaine de médecins, pour des faits ou propos tenus publiquement sur la pandémie de coronavirus. Parmi les praticiens visés figurent le Pr Didier Raoult, l’infectiologue Christian Perronne ou la députée médecin Martine Wonner. « Tous les médecins que nous avons jugés comme susceptibles d’avoir commis une infraction sont poursuivis sur le plan disciplinaire », a-t-il souligné.

Parfois critiqué pour sa lenteur à déclencher des poursuites disciplinaires, le Dr Bouet a mis les points sur les « i ». « Je vais à la vitesse d’une institution responsable. Quand je présente un dossier en chambre disciplinaire, il est ficelé et va amener la juridiction à se prononcer ». Le président du Cnom est toutefois conscient que son institution doit accroître ses capacités à agir rapidement « comme la possibilité de suspendre dans l’urgence un professionnel ».