Politique santé sécu social de l’exécutif

Le généraliste - Entre espoirs et agacement, les médecins partagés après l’annonce du plan santé

Septembre 2018, par Info santé sécu social

Amandine Le Blanc - 18.09.2018

De très nombreux acteurs du monde médical ont commenté ce mardi le plan santé, présenté par Emmanuel Macron le matin même. Après les annonces tant attendues, tout le monde n’a pas la même grille de lecture.

Un certain nombre de syndicats de médecins ont exprimé leur satisfaction, tout en restant prudents. C’est le cas notamment de MG France, qui voit une des propositions, qu’il a défendu ardemment ces derniers mois, figurer en bonne place dans le plan. En effet 4 000 postes d’assistants médicaux seront bien créés pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron. Cette « mesure de bon sens » n’aura d’impact « réel que si elle est facile à déclencher par les médecins généralistes qui en ont besoin », estime le syndicat du Dr Jacques Battistoni. Le regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR) se félicite aussi du prochain renfort des assistants qui vont permettre « aux médecins de gagner un temps médical précieux ». « Ce nouveau dispositif est un bon moyen pour encourager le travail collaboratif et ainsi pallier la désertification médicale », ajoute le Dr Marie Brosset, porte-parole de ReAGJIR.

Inquiétudes sur les moyens

Sur l’organisation territoriale et notamment l’augmentation programmée des communautés professionnelles territoriales en santé (CPTS) – 1 000 d’ici à 2022–, la plupart des syndicats disent banco mais attendent un accompagnement fort, notamment financier. « Si on nous donne les moyens de mieux nous organiser dans les territoires (...), nous pourrons prendre en charge y compris les soins non programmés et nous nous organiserons collectivement », affirme ainsi le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. MG France abonde et réclame des moyens financiers « au-delà de l’augmentation de l’Ondam » (qui sera de 2,5 % en 2019, soit 400 millions d’euros supplémentaires pour la santé). Le Dr Yannick Schmitt, président de ReAGJIR souligne quant à lui que la mise en place des CPTS est lourde, notamment du point de vue administratif. « Peut-être faudrait-il envisager par exemple que l’ARS mette à disposition un temps de secrétariat, ou valoriser le temps passé à faire fonctionner ces CPTS, aujourd’hui temps bénévole », avance-t-il.

Le SML appelle aussi à ne pas faire des CPTS « des monstres de bureaucratie » et se montre mesuré sur la fin de l’exercice isolé voulu par le président de la République. « Ce n’est pas un objectif à l’horizon d’un quinquennat, sauf à couper les têtes ». Il ne partage pas non plus la vision d’Emmanuel Macron sur la rémunération et veut que « le paiement à l’acte reste majoritaire ».

Décloisonnement

Le syndicat se félicite en revanche du « décloisonnement entre la ville et l’hôpital » et salue dans l’ensemble « un plan ambitieux » où « l’on sort des positions doctrinaires pour rentrer enfin dans une approche pragmatique ».

Du côté des hospitaliers, le président de la FHF, Frédéric Valletoux, même s’il approuve les directions données, regrette aussi la taille de l’enveloppe budgétaire. « 400 millions d’euros supplémentaires à répartir sur l’ensemble des professionnels de santé, c’est à peine la moitié de l’effort demandé aux hôpitaux en 2018 », souligne-t-il.

Le patron de l’Ordre des médecins le Dr Patrick Bouet s’est également dit « satisfait » des annonces du plan. « Beaucoup de nos préoccupations ont été prises en compte. Nous avions évoqué la nécessité de légiférer sur le système de santé, ce sera fait en 2019. Un calendrier s’ouvre et l’Ordre sera un élément moteur des discussions », a-t-il réagi.

Le généraliste reste cependant sur la retenue concernant la mise en œuvre effective de certaines mesures. Il s’interroge notamment sur le processus de sélection qui remplacera le numerus clausus ou le statut et les compétences des futurs assistants médicaux. « Il reste des interrogations. Il faut désormais rentrer dans le concret », nuance le patron de l’Ordre.

Rendez-vous manqué

Le plan santé a également fait des déçus. C’est le cas de l’UFML-S pour qui la mesure des assistants ne résout en rien le problème d’épuisement professionnel des généralistes, « à qui l’on va demander d’accélérer encore contre une baisse du temps administratif ». Pour son président, le Dr Jérôme Marty seuls « des tarifs justes permettraient aux médecins d’embaucher sur tout le territoire ». Il déplore que les CPTS, qui « n’ont pas réussi à s’imposer » en trois ans d’existence, soient présentées comme « l’alfa et l’omega de l’organisation de la médecine de ville ». Le salariat de 400 médecins dans des établissements situés dans des déserts est également perçue comme un risque de mettre les médecins libéraux sous la coupe des GHT. « Il s’agira de postes-papiers », estime la CSMF qui prédit qu’ils resteront vacants.

Du côté de la FMF, qui demandait hier au président une réforme d’envergure, la déception prime. « Le gouvernement n’a pas saisi l’ampleur de la catastrophe, il joue petit bras. Le système de santé tombe en quenouille, c’est un peu désespérant d’entendre ce discours-là ». Le président « a sûrement compris mais il ne veut pas mettre le paquet », juge le Dr Jean-Paul Hamon.