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Lequotidiendumedecin.fr : Ebola en République Démocratique du Congo : des vaccins prévus en milieu de semaine

Mai 2018, par infosecusanté

Ebola en République Démocratique du Congo : des vaccins prévus en milieu de semaine

Damien Coulomb

14.05.2018

Le directeur général de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, a annoncé l’arrivée de vaccins contre le filovirus Ebola « mercredi ou jeudi », lors de sa venue dans la ville de Bikoro, dans le nord ouest de la République Démocratique du Congo (RDC), où une nouvelle épidémie Ebola a été confirmée la semaine dernière. Le Dr Tedros a rencontré à cette occasion le président de la RDC, Joseph Kabila, ainsi que le ministre de la Santé, le Dr Oly Ilunga Kalenga.

Le vaccin qui doit être acheminé est le VSV Zebov, mis au point par l’agence de santé publique du Canada et développé par Merck. Ce vaccin, qui avait montré une efficacité de 100 % lors d’un essai coordonné par l’OMS, ne sera utile « que si l’on parvient à suivre correctement l’épidémie et à assurer un bon traçage des cas », précise auprès du « Quotidien » le Pr Éric Delaporte du laboratoire mixte international « Prévention et prise en charge des maladies infectieuses émergentes (LMI PréVIHMI). Le vaccin sera en effet utilisé pour immuniser « en ceinture » les personnes qui ont été en contact avec les cas suspects, et ceux qui ont été en contact avec ces contacts.

« Le vaccin est spécifique de certaines souches, c’est pourquoi le travail d’identification mené en ce moment par le laboratoire de Kinshasa et le LMI PréVIHMI, est important », ajoute le Pr Delaporte. La confirmation des 2 premiers cas par le laboratoire de la capitale de la RDC est à ce titre « une première », souligne le Pr Delaporte.

Une situation inquiétante

Le directeur de l’OMS pour la région Afrique, le Dr Matshidiso Moeti s’est réjoui de « la rapidité avec laquelle le gouvernement de la RDC a déclaré l’épidémie », mais n’a pas caché son inquiétude concernant « la proximité entre les lieux où les cas se sont déclarés et certaines zones urbaines ». Bikoro est en effet situé à 150 km seulement de Mbandaka, capitale de la province de l’Équateur.

D’autres indices inquiètent le Dr Peter Salama, directeur général de la préparation et de la réponse aux urgences sanitaire à l’OMS : « Les cas se répartissent dans 3 lieux différents, sur un diamètre de 60 km, et 3 personnels de santé ont déjà été infectés, dont un est décédé, explique-t-il. Les professionnels de santé peuvent être un facteur multiplicateur dans ce genre d’épidémie. »

Pour le Pr Delaporte, « les chaînes de transmission ne sont pas très claires. Lors de la grande épidémie en Afrique de l’Ouest, on a compris qu’il existe des formes très peu symptomatiques, avec des diarrhées fébriles, mais qui peuvent être transmises », précise-t-il.

Des premiers cas vers février

Depuis le 4 avril, un total de 39 cas a été reporté au cours des 5 dernières semaines, dont 2 cas confirmés, 20 cas probables (dont18 sont décédés), et 17 cas suspects. « Certains signalements nous laissent penser que le virus circule à bas bruit depuis février, ajoute le Pr Delaporte. Le début de l’épidémie correspond à la même période de l’année que celle de Guinée ou celle de 2017 dans la région de Litaki, ce qui suppose que quelque chose se passe à ce moment-là que nous devons comprendre. »

Il s’est écoulé moins d’un an entre l’épidémie de la province de Litaki et celle de la province de l’Équateur, ce qui illustre la plus grande fréquence des épidémies de fièvre hémorragique dans la région. « Les épidémies sont mieux détectées qu’avant, précise le Pr Delaporte, mais il y a peut-être des facteurs environnementaux qui font qu’il y a plus d’interactions entre les hommes et la faune. Il faudrait d’ailleurs savoir de quelle faune il s’agit. On évoque sans cesse les chauves-souris, mais du virus n’a été retrouvé dans certaines d’entre elles qu’au cours d’une seule étude il y a dix ans. La plupart du temps on ne retrouve que des anticorps. Lors de l’épidémie en Afrique de l’ouest on n’a quasiment pas vu de chauves-souris infectées », rappelle-t-il.

En ce qui concerne les traitements spécifiques, « il existe 3 pistes rappelle le Pr Delaporte : le favipiravir, mais il faut l’utiliser à fortes doses ce qui pose des problèmes de toxicité et de risque de stérilité masculine même si cela reste à prouver ; l’antiviral de Gilead encore en phase de mise au point et l’anticorps monoclonal Zmapp sont aussi spécifiques de certaines souches. »

La réaction internationale se met en place : coordonnées par l’OMS, elle implique l’UNICEF, MSF, la croix rouge internationale et le programme alimentaire mondial.