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Lequotidiendumedecin.fr : François Braun, ministre de la Santé : « La catastrophe annoncée ne s’est pas produite »

Août 2022, par infosecusanté

Lequotidiendumedecin.fr : François Braun, ministre de la Santé : « La catastrophe annoncée ne s’est pas produite »

PAR DR IRÈNE DROGOU - CYRILLE DUPUIS -

PUBLIÉ LE 29/08/2022

Dans un entretien au « Quotidien », le nouveau ministre de la Santé revient sur la crise des urgences et l’impact qu’il juge positif des mesures flash décidées début juillet. « Il faut être prudent mais la catastrophe annoncée ne s’est pas produite grâce à l’investissement fort des professionnels sur le terrain », se réjouit François Braun. Il estime que la régulation médicale préalable avant de se déplacer aux urgences, « ça peut fonctionner » et confirme l’augmentation des appels aux Samu-Centres 15 – de l’ordre de 20 %. Il salue aussi les généralistes libéraux « qui ont fait un énorme boulot ». Quant à la majoration de 15 euros sur leurs consultations non programmées régulées, elle a eu « un effet indéniable », selon lui. Néanmoins, il attend pour la fin du mois de septembre les conclusions de l’Igas avant de décider quelles mesures seront pérennisées.

LE QUOTIDIEN : Vous avez été nommé ministre début juillet en pleine crise des urgences. Deux mois plus tard, quel premier bilan tirez-vous des mesures de la « mission flash » mises en place pour passer cet été à risques  ?

François BRAUN : L’été n’est pas fini et ces mesures courent jusqu’à fin septembre. C’est une période compliquée de reprise d’activité, avec des personnels qui sont encore en congé. Il faut donc être prudent mais la catastrophe annoncée ne s’est pas produite grâce à l’investissement fort des professionnels sur le terrain, hospitaliers comme libéraux. Je me suis assuré que les ARS et les services du ministère soient aussi mobilisés fortement pendant l’été pour assurer un suivi très rapproché des situations. Comme quoi, il est possible de trouver des solutions quand tout le monde s’y met ensemble. Ce que nous avons fait cet été servira de point d’appui.

Pourtant, Samu-Urgences de France, votre ancien syndicat, a alerté début août sur une situation explosive et la fermeture de services d’urgences…

La réalité, c’est que tout le monde a joué le jeu même si j’aurais aimé que certaines mesures se développent davantage, comme la participation à la permanence des soins commune public/privé dans les spécialités. Je salue les généralistes libéraux, qui ont fait un énorme boulot, avec des solutions variables selon les territoires, pour venir en soutien de l’hôpital et des urgences.

Quant à la fermeture de certains services d’urgences au cours de l’été, ce n’est pas nouveau  ! En revanche, nous avons accompagné les territoires pour que nos concitoyens soient mieux informés, trouvent des solutions adaptées et parfois préférables à l’attente aux urgences. Je n’ai toutefois jamais prétendu qu’on réglerait tous les problèmes de l’hôpital avec une mission flash. Il était important de garantir à nos concitoyens qu’ils soient pris en charge de façon adéquate pendant l’été, notamment les urgences vitales. Nous avons encore beaucoup à faire.

Justement, combien d’hôpitaux ont mis en place une forme de « tri » avant l’entrée aux urgences  ? Allez-vous généraliser cette régulation médicale préalable  ?

Ce « tri » à l’entrée des urgences, comme vous dites – je préfère moi parler d’orientation ou de régulation – a toujours existé. La qualification du besoin de santé est faite depuis toujours par les infirmiers organisateurs de l’accueil, mais cette orientation est parfois compliquée à gérer, faute de solution. Cet été, on a clairement recommandé aux patients d’appeler le 15 et la régulation médicale avant de se déplacer pour ne pas pénaliser ceux qui avaient vraiment besoin du plateau technique des urgences. Globalement, ce message est passé, il y a eu une augmentation des appels aux Samu-Centres 15 – de l’ordre de 20 % – même si cette croissance s’observait déjà depuis le début d’année. J’affirme que la régulation médicale préalable, ça peut fonctionner, et permettre des solutions plus qualitatives pour les gens. En revanche, cela s’accompagne, il faut des équipes, il faut des rendez-vous en ville pour les soins non programmés, etc. L’évaluation précise sera établie fin septembre.

Où en est le déploiement du service d’accès aux soins (SAS), plateforme censée répondre sur tout le territoire aux besoins de soins urgents et non programmés 24h/24 ? On a le sentiment que ça patine…

Nous avions déjà 22 sites pilotes. On est en train d’élargir ce mode « SAS », tous les départements vont se lancer dans des dispositifs de ce type. Les mesures prises cet été pour faciliter le recrutement d’assistants de régulation médicale ou améliorer la rémunération des médecins libéraux régulateurs vont accélérer ce mouvement, de même que le décroché « bi-niveau » avec l’ARM qui intervient en première intention très rapidement, et oriente soit vers la médecine générale, soit vers la médecine d’urgence. L’objectif, c’est 99 % des appels décrochés, dont 90 % dans les trente secondes, ce qui correspond aux critères de qualité des meilleurs centres internationaux d’urgences. Je constate aussi que certains Samu ont déjà mis en place de nouvelles filières spécialisées en gériatrie ou en psychiatrie. Je ne lâcherai pas sur ces objectifs.

La majoration de 15 euros sur les consultations non programmées régulées par le 15 ou le SAS, au profit des généralistes, a-t-elle été efficace ?

Je constate que les généralistes se sont organisés pour répondre aux soins non programmés en journée. La majoration a donc eu un effet indéniable. La simplicité et la clarté de ce supplément de 15 euros par rapport à la complexité de l’avenant 9 de la convention médicale est une évidence. Je rappelle qu’il y a un plafond en volume pour éviter les dérives. Les chiffres de la majoration augmentent, l’Assurance-maladie suit cela de très près. Cela fera partie de l’évaluation en fin d’été.

Certaines mesures seront-elles pérennisées, au-delà des trois mois initiaux  ?

Avant de décider de la suite, j’ai saisi l’Igas sur deux points : l’efficacité des 41 mesures de la mission flash et une saisine spécifique sur la régulation médicale préalable. Cette évaluation se fera en intégrant les retours de tous les acteurs : patients, professionnels, élus. Je l’attends pour la fin du mois de septembre. Il faut que l’on puisse intégrer certaines dispositions efficaces au PLFSS 2023 notamment [projet de loi de financement de la Sécurité sociale, Ndlr].