Protection sociale

Lequotidiendumedecin.fr : Un think tank de gauche s’attaque au paiement à l’acte et à la liberté d’installation

Juin 2018, par infosecusanté

Un think tank de gauche s’attaque au paiement à l’acte et à la liberté d’installation

Marie Foult

| 08.06.2018

Conventionnement sélectif, remise en question du paiement à l’acte mais aussi relance du tiers payant ou des réseaux de soins : L’Hétairie, un groupe de réflexion classé à gauche, dirigé par Floran Vadillo, ex-conseiller de l’ancien garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas, exhorte le gouvernement à agir d’urgence sur la santé en bousculant la médecine libérale.

Dans une note d’une quinzaine de pages signée Camille Villermé*, le think tank juge l’action du gouvernement « timorée », limitée à quelques « effets d’annonce », et appelle de ses vœux une politique de santé plus « ambitieuse ».

Reste à charge zéro « démago »

Pour le think tank, l’abandon en l’état de la généralisation obligatoire du tiers payant en ville marque « un réel recul en matière d’accès aux soins ». Il recommande de « publier un calendrier clair du report de la généralisation (...), y compris concernant l’étude de faisabilité technique pour la part complémentaire ». Pour retrouver la confiance des médecins, un plan d’accompagnement ciblé des professionnels doit être adjoint au nouvel agenda.

Autre priorité : la réorganisation engagée des régimes de Sécurité sociale (RSI, étudiants) doit s’accompagner d’un « plan d’accès aux soins en direction des publics fragiles et précaires », dont la situation demeure « préoccupante ».

Le think tank épingle au passage « la fausse promesse d’une prise en charge intégrale des soins lunettes, prothèses auditives et dentaires » faite par le président de la République. « La solution privilégiée par la ministre, à trois niveaux (zéro reste à charge, reste à charge maîtrisé ou honoraires libres) paraît doublement démagogique », accuse la note qui redoute la hausse du prix des complémentaires et réclame une étude d’impact « sur les gains réels de la réforme ». Elle plaide aussi pour le développement des réseaux de soins et la valorisation des actes de prévention.

Un « minimum » de régulation

Sur la démographie médicale, L’Hétairie considère que le gouvernement fait preuve « d’attentisme » depuis un an. Les maisons de santé ne garantissent « en rien la bonne coordination des professionnels ». Pis, « l’absence de volonté de régulation de la médecine libérale laisse craindre une aggravation des inégalités », estime le laboratoire d’idées.

La note recommande d’introduire « un minimum de contrainte dans la régulation de l’installation des praticiens ». Comment ? En limitant le conventionnement de certaines spécialités dans les zones « suffisamment dotées » en praticiens. Pour encourager les jeunes à s’installer en libéral, le think tank suggère d’alléger les contraintes administratives et économiques, comme l’affiliation des étudiants à la CARMF (mesure déjà supprimée pour 2018, NDLR).

Côté modes de rémunération, la note va assez loin. La stratégie de transformation du système de santé doit s’accompagner de l’ouverture prioritaire de nouvelles négociations avec les syndicats de médecins, négos dont « le point de départ doit être la remise en cause du paiement à l’acte ». Difficile d’être plus direct.

Enfin, le nouveau cadre conventionnel de la télémédecine marque des progrès « en demi-teinte ». Une augmentation des ressources est nécessaire afin de garantir que la substitution des consultations classiques par la télémédecine s’opère réellement au bénéfice des populations vivant dans les zones fragiles, peut-on lire.
* Un pseudonyme pour un groupe de spécialistes et praticiens de la santé.