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Les Echos - Les départements refusent d’assumer une nouvelle hausse des aides sociales

Février 2016, par Info santé sécu social

La Seine-Saint-Denis ne budgétisera pas l’essor du RSA, l’Essonne doit étaler sur six ans un trou de 106 millions d’euros. Les élus demandent à Matignon d’accélérer la négociation sur la nationalisation du RSA.

La pression monte encore d’un cran sur la négociation financière en cours entre les départements et Matignon. Mercredi, le président de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS), a annoncé son intention « de ne pas inscrire pour 2016 d’augmentation des crédits affectés au RSA car le département ne peut pas supporter plus longtemps une dérive inégalitaire qui pèse sur ses capacités d’investissement ». Une décision qu’il entérinera jeudi en séance du conseil départemental. De nombreux départements ont prévu d’appliquer cette démarche légale, à défaut d’être très sincère. Certains pourraient même décider d’inscrire les dépenses 2014, arguant que les comptes 2015 ne sont pas encore certifiés. Ils appliquent en fait les recommandations votées par l’Assemblée des départements de France (ADF) lors de son congrès, en octobre. A cette occasion, l’ADF et son président, Dominique Bussereau (LR), avaient convaincu Matignon d’étudier une renationalisation du RSA. Avec la crise, cette compétence est devenue le premier poste de dépense des conseils départementaux : en 2014, ils ont versé 9,8 milliards, quasiment le double d’il y a dix ans, l’Etat laissant aux collectivités un reste à charge croissant (près de 4 milliards d’euros).

Un terrible effet de ciseau

Les départements remboursent actuellement aux Caisses d’allocations familiales les versements aux demandeurs d’emploi. Dans la renationalisation, l’Etat envisage de reprendre cette charge mais aussi quelques recettes départementales, comme les frais de notaire (DMTO) ou des taxes (TICPE). Des recettes trop dynamiques pour l’ADF, qui propose de céder des dotations. Autre enjeu de la négociation, l’année de référence, l’ADF pointant 2014 comme le pic de croissance du RSA. Stéphane Troussel a exhorté mercredi le gouvernement à conclure ces discussions au plus vite. Une prochaine réunion de travail est prévue le 19 janvier avec la fin mars pour objectif. Le dirigeant de la Seine-Saint-Denis rappelle que, en 2015, il avait intégré dans son budget une progression de 6 % du RSA, dépassée, au final, de près de 5 millions, avec le franchissement du cap symbolique des 100.000 allocataires.

En 2016, les prévisions nationales de croissance du RSA dépassent les 7 %. Conjuguée à une nouvelle baisse des dotations, elles promettent un effet de ciseau terrible pour de 30 à 40 départements. A l’ADF, on répète que de nombreux départements pourraient ne plus pouvoir verser leurs aides fin 2016. Surtout ceux qui ne budgétisent pas d’emblée le surcroît de dépenses. Dominique Bussereau avait déjà brandi en octobre la menace qu’une dizaine de collectivités pourraient ne pas pouvoir verser les aides fin 2015. Manuel Valls leur avait accordé en décembre un coup de pouce de 50 millions d’euros, évitant le scénario noir. Il est plus probable qu’en l’absence d’accord sur le RSA ce risque augmente fin 2016.

Les départements réduisent aussi peu à peu les dépenses non obligatoires (subventions aux communes, tourisme, aides aux entreprises, etc.), des économies que certains experts jugent trop peu actionnées par les élus. Autre piste évoquée mercredi par les Ardennes, selon la presse locale : une hausse de sa fiscalité de 2,5 % à 4 %. Une solution dont les collectivités raffolent beaucoup moins qu’avant.

Matthieu Quiret, Les Echos