Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - C’est reparti. Covid-19 : l’Europe redevient le principal foyer de la pandémie

Novembre 2021, par Info santé sécu social

La situation épidémique est devenue hors de contrôle dans les pays de l’Est et laisse présager le pire ailleurs.

La reprise épidémique est telle en Europe de l’Est est centrale que la résistance affichée en France ou en Italie laisse augurer une « nouvelle vague », prévient l’épidémiologiste Antoine Flahault.

par Lucie Beaugé et AFP
publié le 6 novembre 2021

On compte plus de 1,3 million de morts en Europe depuis le début de la pandémie. C’est l’équivalent de la population en Estonie, l’un des pays les plus touchés du continent à l’heure actuelle. Depuis six semaines, les indicateurs virent au rouge dans de nombreux pays européens. Au total, l’AFP compile 250 000 cas et 3 600 décès quotidiens. « Le rythme actuel de transmission dans les 53 pays de la région européenne est très préoccupant […]. Si nous restons sur cette trajectoire, nous pourrions voir un autre demi-million de décès dus au Covid-19 dans la région d’ici à février, a mis en garde jeudi le directeur de l’OMS Europe, Hans Kluge. Nous sommes, de nouveau, à l’épicentre. »

Dans l’Est, la Russie, la Roumanie et la Bulgarie enregistrent le plus de décès quotidiens, et les pays baltes ne sont pas en reste. Dans l’Ouest, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Belgique voient le nombre de cas flamber. Dans le Sud, la situation semble sous contrôle pour la France, l’Italie et l’Espagne, bien que la vigilance reste accrue.

L’Est s’enfonce

Du côté de l’Europe de l’Est, les voyants ne sont pas rouges, mais écarlates, à commencer par les pays baltes. L’Estonie observe la plus grande hausse du nombre de malades : en moyenne, elle passe de 844 cas quotidiens par million d’habitants le 19 octobre à 1 366 cas le 4 novembre, d’après Covid Tracker. Chez ses voisins, les signaux sont tout aussi inquiétants, même si le nombre de cas baisse depuis quelques jours en Lettonie. En effet, le pays impose à sa population un confinement depuis le 21 octobre et jusqu’au 15 novembre. Mais les Lettons enregistrent plus de décès quotidiens, avec 17 morts par million d’habitants sur les sept derniers jours, un chiffre supérieur à la Lituanie (13) et l’Estonie (9), toujours selon Covid Tracker.

Quant à l’Ukraine et la Roumanie, elles enregistrent respectivement 590 et 453 morts en moyenne chaque jour depuis une semaine. En Russie aussi, le nombre de morts est dramatique. Selon les données officielles du Kremlin, plus de 1 000 personnes succombent du Covid-19 chaque jour, en moyenne, depuis le 20 octobre, bien que ces chiffres soient souvent considérés, par de nombreux observateurs, comme inférieurs à la réalité. Reste que ses données sont aussi à mettre en perspective avec la densité de population : on dénombre en Russie huit morts par million d’habitants sur les sept derniers jours.

Dans ces pays de l’Est, la couverture vaccinale est loin d’être celle de la France et ses 68 % de vaccinés. Signe du fort rejet des vaccins, la Lettonie relève 50 % de vaccinés. Quant à l’Ukraine, l’un des pays les plus endeuillés de l’Europe depuis le début de la pandémie, seulement 16 % des Ukrainiens se sont fait vacciner jusqu’à présent.

Dans l’Ouest, l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas inquiètent

Dans une moindre mesure, la situation en Europe de l’Ouest inquiète les autorités. Un nouveau record quotidien de nouvelles infections a été établi en Allemagne, avec 37 120 nouveaux cas déclarés vendredi, selon l’institut de veille sanitaire Robert-Koch. Ce chiffre n’avait pas été atteint depuis décembre 2020. Les cas de Covid-19 remontent également en flèche chez les Belges et les Néerlandais. Le 19 octobre, on relevait en Belgique 293 nouveaux malades quotidiens par million d’habitants sur sept jours glissants, contre 634 le 4 novembre. La comparaison entre ces deux dates est également frappante aux Pays-Bas, un chiffre qui passe de 216 à 486. Quant au Royaume-Uni, le nombre de cas par million d’habitants est en légère baisse, mais il enregistre toujours 40 000 nouveaux malades par jour.

Les hôpitaux commencent à ressentir fortement les effets de cette hausse. Mercredi, 236 patients de Covid-19 ont été admis dans les structures belges. Ce qui n’était jamais arrivé depuis avril, au moment de la troisième vague. Mais la hausse du nombre de morts dans ces trois pays reste moins importante qu’en Europe de l’Est, grâce à une campagne vaccinale plus efficace : 66 % de vaccinés en Allemagne, 68 % au Royaume-Uni, 69 % aux Pays-Bas, et même 74 % en Belgique. Néanmoins, il y a du retard pour certaines poches de population. C’est le cas au Royaume-Uni où seuls 64 % des 18-29 ans étaient vaccinés mi-octobre, selon les données des autorités sanitaires, contre 85 % dans l’Hexagone. Reste que le relâchement des gestes barrières pourrait aussi expliquer cette flambée, notamment chez les Néerlandais. Après avoir levé le port du masque dans les lieux publics fermés fin août, le Premier ministre, Mark Rutte, vient d’annoncer son rétablissement.

Le Sud dans l’expectative

Si les chiffres sont moins inquiétants dans le sud de l’Europe, l’épidémiologiste Antoine Flahault se montre pessimiste. « La France, l’Espagne, le Portugal et l’Italie sont les derniers bastions en Europe de l’Ouest à résister [à la reprise de l’épidémie], a-t-il déclaré sur BFM TV. On ne va pas échapper à cette nouvelle vague. » Le nombre de cas ne flambe effectivement pas comme ailleurs − exemple des 41 cas quotidiens en moyenne par million d’habitants sur les sept derniers jours en Italie, contre 1 366 en Estonie. Pour autant, l’Italie passe de 2 253 cas le 19 octobre à 4 496 cas le 4 novembre.

D’autres indicateurs laissent présager une reprise épidémique : dans l’Hexagone, le site Covid Tracker recense 66 admissions en soins critiques pour Covid-19 chaque jour, en hausse de 8 % par rapport à la semaine dernière. Quant au nombre de morts, ils sont 33 à succomber du virus, en augmentation de 12 %. Pour le Premier ministre, Jean Castex, « l’heure n’est pas venue de baisser la garde ». Preuve que la situation inquiète jusqu’à l’Elysée, Macron s’adressera aux Français mardi.