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Libération - La mairie FN d’Hayange envoie les huissiers au Secours populaire

Octobre 2016, par Info santé sécu social

L’huissier est arrivé à l’heure, ce vendredi matin, à 10 heures, devant l’antenne du Secours populaire d’Hayange rue Jean-Jaurès. Comme Thull. A Hayange, cela fait des semaines que le Secours populaire est promis à l’expulsion. Le maire, Fabien Engelmann, a cette fois mis ses menaces à exécution.

« Nous n’avons pas l’intention de rendre les clés »

Entourées de dizaines de bénévoles et de bénéficiaires de l’aide du Secours populaire, venus en soutien – certains étaient en larmes, selon des témoins –, Anne Duflot-Allievi et Marie-Françoise Thull ont opposé un refus à la demande de l’huissier, comme prévu aussi. La veille, déjà, elles avaient prévenu qu’elles ne comptaient pas quitter les lieux, où sont stockés des denrées alimentaires et des vêtements à destination des personnes à faible revenu. « Nous n’avons pas l’intention de rendre les clés, ni de partir. Nous n’avons pas vidé ni nettoyé le local », qui vient en aide à plus de 800 bénéficiaires. Tout s’est fait dans le calme, malgré l’émotion suscitée par la décision de la mairie FN de virer l’asso, qu’elle accuse d’être « pro-migrants » et de fricoter avec le Parti communiste. Une procédure d’expulsion va être lancée, sauf décision contraire du conseil municipal, qui n’arrivera pas.

Les locaux de la rue Jean-Jaurès, qui depuis près de 20 ans sont prêtés gracieusement à l’association par la mairie, mais sans contrat de bail, sont occupés « de manière tout à fait illégale », argue Fabien Engelmann. Selon le Monde, il aurait en tête de les refiler à d’autres prévu, il était accompagné d’un policier municipal et de la directrice générale des services de la ville, mais pas d’élus. Et comme prévu, il a demandé les clés du local de l’association caritative à sa présidente, Anne Duflot-Allievi, et la responsable départementale, Marie-Françoise associations, notamment Fraternité française, un organisme dirigé par l’eurodéputée FN Mireille d’Ornano, laquelle dément formellement : « Je n’ai eu aucun contact avec M. Engelmann concernant une éventualité de local dans sa ville. Je ne sais pas d’où cette information sort, mais il n’en a jamais été question. »

« Une succursale du Parti communiste »

La vraie raison est politique : dans un communiqué publié sur Facebook, Engelmann accuse Anne Duflot-Allievi d’avoir « instrumentalisé l’antenne de Hayange à des fins politiques », « en [salissant] par voie de presse […] la majorité municipale, [en répandant sa] propagande "pro-migrants" », et en faisant de l’antenne « une succursale du Parti communiste ». En cause, selon Anne Duflot-Allievi, des propos qu’elle a tenus dans les colonnes de Libé en décembre 2015, à propos d’un goûter de Noël dont les enfants de migrants auraient été exclus sur décision de la municipalité. « Engelmann a décidé que seuls pourraient venir ceux dont les parents touchent les minima sociaux, donc exit les migrants ! » expliquait-elle à l’époque. Selon le Monde, Engelmann reproche aussi à Duflot-Allievi d’avoir aidé le collectif anti-FN « Hayange en résistance » à organiser un repas pour des réfugiés. « Ce sont des gens qui ont une idéologie communiste. Qu’ils soient adhérents ou pas au Parti communiste, je m’en fous », a répondu le maire d’Hayange au quotidien qui l’interrogeait sur ce point.

Hayange, « le FN, c’est une petite dictature »

« Puisque les dirigeants de cette antenne ont la fibre communiste, nous leur conseillons de faire une demande auprès des maires de la vallée qui se réclament encore de cette idéologie pour l’attribution d’un local », dit encore le communiqué d’Engelmann. « On n’est pas dans la politique, le seul combat qu’on mène c’est contre la misère », répond Anne Duflot-Allievi. « On n’est pas sur le même terrain. Nous, on est là pour les gens, le maire est dans un combat politique », précise Marie-Françoise Thull. « Le maire nous reproche d’aider les migrants, mais nous, on aide tout le monde. Le maire imagine que le Secours populaire est politisé. Il n’a pas de connaissance de l’association. [En règle générale], Engelmann n’a pas compris ce que c’était, une association. Que son principe est l’indépendance. C’est désolant, et ça l’est encore plus parce que les victimes, ce sont des personnes dans la misère », dit-elle, assurant que le Secours populaire se battra jusqu’au bout pour garder son antenne d’Hayange, jusqu’à porter l’affaire devant la justice.

Depuis l’arrivée d’Engelmann à la tête de la mairie, la subvention de l’association caritative est passée de 2 700 euros annuels, à 550 euros, puis zéro cette année. Sollicitée par Libération, la municipalité n’a pas souhaité donner suite.