Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - Le Covid-19 reconnu maladie professionnelle seulement pour certains soignants : colère de la CFDT et de la CGT

Septembre 2020, par Info santé sécu social

Par Frantz Durupt — 16 septembre 2020

Un décret, paru lundi, restreint la reconnaissance automatique du Covid-19 comme maladie professionnelle aux personnels soignants ayant eu besoin d’un apport d’oxygène. Les autres soignants et salariés devront défendre leur cause devant un comité.

Près de six mois écoulés et le compte n’y est toujours pas. Alors que le gouvernement avait annoncé dès la fin mars que l’ensemble des personnels travaillant dans des établissements de santé bénéficieraient d’une reconnaissance automatique du Covid-19 comme maladie professionnelle, il aura fallu attendre cette semaine pour qu’un décret entérinant la mesure soit enfin adopté. Au soulagement de tout le monde ? Loin s’en faut.

Selon la CFDT, le dispositif finalement annoncé « trahit les engagements pris par le gouvernement ». Car ne seront concernés par cette reconnaissance automatique (qui permet une prise en charge à 100% des frais médicaux, des indemnités en cas de séquelles et le versement d’une rente aux proches en cas de décès) que les personnels soignants ayant eu besoin d’un apport d’oxygène. Une version trop restrictive aux yeux du syndicat, qui souligne dans un communiqué que « d’autres manifestations du Covid-19 sont aujourd’hui largement observées, voire scientifiquement établies. Les témoignages de fatigue chronique, migraines, désordre des systèmes nerveux et digestifs se multiplient ». Le constat est d’autant plus amer que « c’est un sujet qu’on a pris à bras-le-corps dès le début du mois d’avril, relève Catherine Pinchaut, chargée des questions de santé au travail à la CFDT. On a fait des propositions, des contre-propositions, on a argumenté… et en face, ça a été le silence radio ».

Pour Alain Bobbio, secrétaire général de l’Association nationale des victimes de l’amiante (Andeva) cité par l’AFP, « c’est en retrait non seulement sur ce que demandaient les associations, mais même par rapport aux propres engagements du ministère ». En mars, le ministre de la Santé, Olivier Véran, se montrait en effet bien plus générique : « Aux soignants qui tombent malades, je le dis : le coronavirus sera systématiquement et automatiquement reconnu comme une maladie professionnelle, et c’est la moindre des choses. »

« On est loin des paroles [glorifiant] ces travailleurs »
Avec ce décret, la CFDT estime qu’est remise en cause la notion même d’automaticité, puisque les soignants ayant contracté la maladie sous une forme moins grave devront faire valoir leur cas devant un comité spécial, composé d’un médecin-conseil de la Caisse d’assurance maladie et d’un praticien hospitalier ou d’un médecin du travail. Mardi, la fédération FO des personnels de santé a jugé le décret « outrageant pour tous ceux qui, dans les services, se sont engagés pleinement auprès des patients, des résidents, des personnes âgées, alors même que les moyens de protection individuelle faisaient défaut, pour ensuite, à leur tour, être contaminés ».

Une autre restriction concerne cette fois tous les travailleurs non-soignants qui auraient subi une forme sévère du Covid-19 : ils devront démontrer devant le même comité que c’est bien au travail qu’ils ont contracté la maladie. « C’est la croix et la bannière, estime Catherine Pinchaut. Pour tous les salariés qui n’étaient pas en télétravail, qui ont continué à faire tourner la boutique et qui ont été dans des situations où il y avait au début peu ou pas du tout de protection, ça doit être une évidence qu’ils ont été contaminés au boulot. » Et le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, de renchérir ce mercredi matin sur RTL : « On est loin des paroles extrêmement belles qui ont été dites pendant le confinement pour glorifier ces travailleurs. » En avril, l’Académie de médecine demandait que la reconnaissance automatique du Covid-19 comme maladie professionnelle soit accordée aux salariés de l’alimentation, des transports ou encore de la sécurité.

Mise à jour à 18 heures. Dans un communiqué, la CGT a également dénoncé ce mercredi après-midi ce décret comme « une véritable usine à gaz » en appelant le gouvernement à « revoir sa copie ».

Frantz Durupt