Les Ehpads et le grand âge

Libération - Le groupe d’Ehpad Korian visé par deux nouvelles enquêtes judiciaires

Mai 2020, par Info santé sécu social

Par Chloé Pilorget-Rezzouk et Ismaël Halissat — 19 mai 2020 à 22:30

Les deux enquêtes préliminaires du parquet de Nanterre pour homicide involontaire, mise en danger de la vie d’autrui et non-assistance à personne en danger, visent l’établissement « Bel-Air » de Clamart.

Les procédures judiciaires visant le groupe d’Ehpad Korian se multiplient. Le parquet de Nanterre a annoncé, ce mardi soir, l’ouverture de deux enquêtes préliminaires à la suite des plaintes de deux familles ayant perdu un proche, pendant l’épidémie de coronavirus, dans l’établissement « Bel-Air » de Clamart dans les Hauts-de-Seine. Ces enquêtes ont été ouvertes des faits d’homicide involontaire, de mise en danger de la vie d’autrui, et de non-assistance à personne en danger. Les investigations ont été confiées à la police judiciaire parisienne. Le parquet a en outre annoncé l’ouverture d’une autre procédure concernant une maison de retraite, non gérée par Korian, à Clichy-la-Garenne.

Saluant une « décision forte », Me Arakelian, conseil des familles de défunts, notamment dans plusieurs établissements Korian, se félicite auprès de Libération : « Que le parquet de Nanterre, qui a l’opportunité des poursuites, se décide à ouvrir ces enquêtes préliminaires, c’est juste la démonstration que nos plaintes sont tout sauf fantaisistes. » Les proches qu’il représente dénoncent une série de dysfonctionnements et de négligences dans la gestion de la crise sanitaire au sein des Ehpad. Au « Bel-Air » de Clamart, au moins huit personnes sont mortes au cours de l’épidémie sur une centaine de résidents.

Autre enquête préliminaire
Olivia Mokiejewski, qui a perdu sa grand-mère, Hermine, 96 ans, est une des plaignantes : « Nous sommes très satisfaits de cette décision, qui permettra, je l’espère que toute la lumière soit faite. Nous voulons des réponses, nous voulons comprendre ce qui s’est passé », a réagi auprès de Libé celle qui a fondé le collectif 9471, en référence aux nombres de morts dans les Ehpad, au jour de son lancement, le 5 mai. « Cela ne les fera pas revenir, mais au moins, on a le sentiment qu’il y a un début de justice en train de se mettre en œuvre, que nos proches ne sont pas que des chiffres », poursuit la journaliste, qui a déjà reçu une centaine de témoignages depuis la création de l’association regroupant des familles de victimes mortes du Covid-19.

Korian, leader du secteur des maisons de retraite en France, fait déjà l’objet d’une autre enquête préliminaire, ouverte pour « homicide involontaire », « mise en danger de la vie d’autrui » et « non-assistance à personne en danger » par le parquet de Grasse, après que plusieurs familles ayant perdu un proche à l’Ehpad de La Riviera à Mougins (Alpes-Maritimes) ont déposé plainte. Dans cet établissement, au moins 38 résidents sur 109 sont morts. Contacté par Libération, l’avocat du groupe, Emmanuel Daoud, estime que « l’ouverture de cette enquête préliminaire était inévitable » : « La justice va pouvoir démêler le vrai du faux, sereinement et avec sérieux. Korian collaborera à la manifestation de la vérité et la démonstration sera faite, d’une part, qu’il n’y a pas eu de faute d’imprudence ou de négligence, et d’autre part que les personnels de l’établissement de Bel-Air ont tout fait pour protéger les résidents. »

Chloé Pilorget-Rezzouk , Ismaël Halissat