Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - Le variant omicron contourne davantage nos défenses mais sa gravité reste en question

Décembre 2021, par Info santé sécu social

Depuis sa détection fin novembre en Afrique du Sud, le monde entier attend avec anxiété de connaître les caractéristiques du variant omicron de Covid-19. Si sa gravité pourrait être moindre, sa capacité à lutter contre le système immunitaire s’établit peu à peu. La troisième dose de vaccin permet de mieux le neutraliser.

par Olivier Monod
publié le 9 décembre 2021 à 6h45

Et si le variant omicron causait moins de cas graves du Covid-19 que delta ? C’est d’abord Olivier Véran, lundi, qui a esquissé ce scenario. Omicron « est manifestement plus contagieux, manifestement pas plus dangereux », affirmait-il. Le lendemain, c’est au tour du conseiller à la Maison Blanche Anthony Fauci de tenir le même type de propos. « Il est quasiment certain qu’il n’est pas plus grave que Delta. […] Il y a quelques signes montrant qu’il se pourrait même qu’il soit encore moins grave. »

Les deux hommes prennent peut-être leurs espoirs pour des réalités. L’émergence d’un variant plus transmissible mais moins dangereux serait en effet le scenario rêvé dans cette crise. Mais, si les hospitalisations dues à omicron en Afrique du Sud « semblent moins élevées que pour delta », remarque Anthony Fauci, il reconnaît qu’il faut attendre « encore deux semaines au moins » avant de pouvoir conclure sur le sujet. Dans cette pandémie, l’augmentation des hospitalisations et des décès est toujours décalée de quelques semaines par rapport à la hausse des cas.

Un échappement immunitaire de plus en plus certain
Entre-temps, les premiers éléments sur la capacité du virus à contourner les défenses immunitaires provenant d’une première infection ou d’une vaccination tombent, et ils ne sont pas positifs. Une première expérimentation menée par Alex Sigall en Afrique du Sud a comparé l’action des anticorps chez six personnes vaccinées par deux doses de Pfizer et chez six personnes remises d’une infection puis vaccinées. Les résultats sont clairs. L’action des anticorps produits par les six vaccinés est quarante fois moins bonne contre le nouveau variant omicron que contre la souche historique.

Cet échappement immunitaire est « bien plus important » que celui observé pour les précédents variants. Seule bonne nouvelle, les personnes infectées puis vaccinées présentent un meilleur taux de protection. Ces résultats, encore préliminaires, doivent encore être confirmés.

La question de l’ampleur de la diminution d’activité est en question. Ainsi, l’équipe de Ben Murrel de l’institut Karolinska en Suède trouve aussi une baisse d’activité du plasma contre omicron, mais seulement d’un facteur sept en moyenne (contre quarante chez Sigall) . Enfin, Sandra Ciesek, virologue à Francfort a aussi partagé ses premiers résultats sur Twitter. Les anticorps générés par une vaccination avec deux doses de Pfizer semblent perdre toute activité contre omicron. Mais une troisième dose ou un historique d’infection suffisent à retrouver une certaine protection. L’importance de la campagne de rappel semble donc ravivée.

Au passage, selon plusieurs chercheurs, cette capacité à mieux infecter les personnes protégées explique peut-être en partie le fait qu’omicron semble se propager plus vite que delta.La protection contre les formes graves pas nécessairement remise en cause

Depuis la publication de ces résultats, tard mardi soir, les commentaires scientifiques vont bon train. Bien que cette baisse soit inquiétante, le fait qu’elle ne soit pas totale et largement compensée par un rappel ou un historique d’infection tend à rassurer les chercheurs. Par ailleurs, il convient de rappeler que les anticorps ne disent pas tout de l’immunité.

« Une réduction de 40 fois l’activité de neutralisation ne signifie pas que la vaccination protégera 40 fois moins. La perte réelle de l’immunité est bien moindre », souligne Christian Drosten, directeur du département de virologie de l’hôpital universitaire berlinois de la Charité, sur Twitter. Ainsi, l’efficacité des vaccins contre le risque de formes graves du virus n’est pas nécessairement remise en cause par ces résultats.

C’est d’ailleurs ce qu’ont communiqué Pfizer et BioNTech à propos de leur produit. « Bien que deux doses du vaccin puissent encore offrir une protection contre la maladie grave causée par la souche Omicron, il est clair, d’après ces données préliminaires, que la protection est améliorée avec une troisième dose de notre vaccin », affirme le PDG de Pfizer dans un communiqué. Une posture rassurante qui n’empêche pas les entreprises de « poursuivre le développement d’un vaccin spécifique au variant Omicron [..] d’ici mars au cas où une adaptation serait nécessaire », ont-elles indiqué.

L’espoir d’une vague d’omicron à faible impact sur les hospitalisations n’est pas vain. Que ce soit en raison d’une moindre dangerosité intrinsèque du variant, ou d’une protection acquise par la vaccination ou une infection précédente, un horizon avec un Covid-19 circulant mais moins mortel reste atteignable.