Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - Rémi Salomon : « La nouvelle enquête sur les variants du Covid-19 montre une tendance inquiétante »

Février 2021, par Info santé sécu social

Interview

Alors que la proportion des nouveaux variants de Covid-19 poursuit sa progression en France, la communauté scientifique s’interroge sur la nécessité de renforcer les mesures sanitaires. Le président de la Commission médicale de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), se dit « inquiet ».

par Julie Richard
publié le 2 février 2021

Les variants de Covid-19 se propagent rapidement et leur présence pourrait bien accélérer la reprise de l’épidémie. Invité au micro de France Info mardi matin, Rémi Salomon, président de la Commission médicale de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a alerté sur la hausse significative de nouvelles souches de Covid-19, plus contagieuses, depuis début janvier.

« Une première enquête, publiée début janvier et ne portant que sur la souche britannique, a permis d’estimer que celle-ci était responsable de 3,3 % des cas de Covid-19 diagnostiqués par test RT-PCR au moment de l’enquête, c’est-à-dire le 7 et 8 janvier », peut-on lire sur le site Santé publique France (SPF). Les 135 laboratoires, répartis dans douze régions de France métropolitaines qui ont participé à l’enquête, ont permis de révéler des disparités importantes selon les régions.

L’Ile-de-France est arrivée en tête avec une présence du variant dans « 6,9 % des cas de Covid-19 diagnostiqués », estime SPF. Alors que les chiffres d’une seconde enquête flash, réalisée le 27 janvier, doivent paraître dans les prochains jours, le médecin Rémi Salomon craint une hausse exponentielle des cas de variants. Il s’explique à « Libération ».

Les résultats de la deuxième enquête flash concernant la présence du variant en France devraient paraître très prochainement. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Je suis inquiet. J’ai pris connaissance des résultats d’une petite dizaine de laboratoires en région parisienne et tous montrent une forte augmentation du variant par rapport à début janvier. On était plutôt aux alentours de 6 % le 7 janvier et on est monté à 15-20 % la semaine dernière. Cependant, je préfère rester prudent : ces résultats restent à confirmer et je ne suis pas capable, à l’heure actuelle, de dire si l’échantillon analysé est représentatif de l’ensemble du territoire. Quoi qu’il en soit, la nouvelle enquête sur les variants du Covid-19 montre une tendance inquiétante, le variant britannique étant à peu près 50 % plus contagieux.

Selon vous, les mesures sanitaires actuelles sont insuffisantes pour lutter contre la reprise de l’épidémie. Que préconisez-vous ?
Les mesures qui ont été prises ont sans doute été utiles, je pense notamment à la fermeture des centres commerciaux de plus de 20 000 m². Mais ça ne suffit pas et je suis d’avis qu’il faille prendre des mesures supplémentaires concernant les écoles. Etant pédiatre, je suis tout à fait conscient de ce que représente une longue fermeture des écoles et des universités. J’ai en tête tous les problèmes de décrochage scolaire que cela implique et je sais que ce sont les plus défavorisés qui en payent le prix lourd. Sans parler de la souffrance psychologique et des tentatives de suicide qui ont explosé. Il faudrait donc augmenter la période de congés scolaires et donner un coup d’arrêt fort pendant deux à trois semaines maximum à la rentrée. Il faudra ensuite rouvrir les écoles en testant massivement et changer l’organisation des repas pour éviter au maximum les contaminations en dehors des heures de cours.

Comment expliquer que la hausse de variant soit moins importante en France que dans d’autres pays, comme notamment en Angleterre ou en Irlande ?
Compte tenu des mesures sanitaires en vigueur en France, nous n’aurons probablement pas de dynamique d’explosion de nouveaux variants comme cela a été le cas à Londres où, rappelons-le, les restaurants étaient ouverts à l’époque où la nouvelle souche a été découverte. En France, on a une augmentation qui est lente mais continue. De plus en plus d’hôpitaux sont saturés aujourd’hui et on commence à déprogrammer les autres actes médicaux. Si cette augmentation se poursuit, même sans accélération, ça risque de poser problème dans un futur proche.