Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Libération - Un virus mutant plus contagieux ?

Décembre 2020, par Info santé sécu social

Par Camille Gévaudan — 20 décembre 2020

Une variante du Sars-CoV-2 encore méconnue serait à l’origine de la flambée des contaminations.

Noël approche, et Londres retourne sous cloche. La raison ? Les cas de contamination s’envolent, « causés par une nouvelle variante du virus » qui « semble se répandre plus facilement », a justifié samedi Boris Johnson.

La thèse d’une mutation plus contagieuse du Sars-CoV-2 est soutenue par le médecin-chef de l’Angleterre, Chris Witty, qui affirme que la nouvelle version du virus est responsable de 60 % des infections à Londres. Des travaux ont été lancés « en urgence » pour établir si la mutation du virus peut entraîner un taux de mortalité plus élevé, ou si elle affecte l’efficacité des traitements et des vaccins.

Le plus urgent est en effet de mieux comprendre le sujet avant d’affoler la population en désignant cette variante comme responsable de la flambée des infections. Un article publié mercredi dans le British Medical Journal, revue de référence, rappelle qu’on n’a aucun moyen actuellement d’établir un lien de cause à effet.

Lait sur le feu

Il y a bien une nouvelle variante du Sars-CoV-2 en circulation active dans le sud-est du Royaume-Uni, qui diffère du virus « modèle » en 17 points et qu’on a surnommée VUI-202012 /01 (soit la première « variante sous investigation » de décembre 2020). Elle a été repérée par un consortium britannique (COG-UK) qui étudie, depuis des mois, le génome des coronavirus parmi des échantillons de tests positifs à travers tout le pays. « Aucune donnée ne suggère que cette mutation a été importée depuis l’étranger, donc elle a probablement émergé au Royaume-Uni », note Nick Loman, professeur de génomique microbienne à l’université de Birmingham.

Au 13 décembre, 1 108 cas de contamination par la variante VUI-202012 /01 ont déjà été identifiés au Royaume-Uni, ce qui est beaucoup pour des échantillons pris au hasard et suggère, par extrapolation, qu’elle concerne désormais une grande proportion de malades. Ces cas sont majoritairement situés dans le Sud-Est, mais ont atteint récemment de nouveaux territoires, dont le pays de Galles et l’Ecosse.

Peut-on pour autant conclure que la nouvelle mutation est plus contagieuse que le « vieux » Sars-CoV-2 ? Sûrement pas, insiste Nick Loman : « Cette variante est fortement associée avec les lieux où on voit une hausse des contaminations. C’est une corrélation, mais on ne peut pas dire que c’est une cause. » Rien ne permet de savoir non plus si la nouvelle variante est susceptible d’être plus ou moins dangereuse ou grave. La seule chose dont on est sûrs, résume Nick Loman, c’est que cette variante se répand vite. C’est une raison suffisante pour la surveiller comme le lait sur le feu.

Protéines Spike
Les mutations font partie de l’évolution naturelle des virus. « Des milliers de mutations ont déjà émergé, et la vaste majorité n’a aucun effet sur le virus mais peut être utilisée comme un code-barres pour surveiller l’épidémie », a expliqué la microbiologiste Sharon Peacock, directrice du consortium COG-UK. Rien que sur les protéines Spike, ces épines qui enveloppent le virus et lui permettent de se fixer aux cellules humaines, on dénombre environ 4 000 mutations.

La protéine Spike est aussi la cible des vaccins. Il serait donc gênant que les épines du coronavirus soient tellement transformées par les mutations successives qu’elles finissent par leur échapper. Mais on a de la marge : les vaccins visent plusieurs endroits distincts des Spike. Il faudrait que tous ces endroits deviennent méconnaissables pour que l’efficacité soit annulée. Si cela doit finir par arriver, au fil des mois et des nouvelles mutations, alors il faudra réajuster les vaccins anti-Covid comme on réajuste les vaccins anti-grippe chaque année.