Covid-19 (Coronavirus-2019nCoV) et crise sanitaire

Médiapart - Covid-19 : après plusieurs pays européens, la France suspend l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca

Mars 2021, par Info santé sécu social

VACCINS ANTI-COVID : LES EFFETS INDÉSIRABLES SOUS SURVEILLANCE (3/3)

15 MARS 2021 PAR ROUGUYATA SALL

Emmanuel Macron vient d’annoncer la suspension du vaccin anglo-suédois, en attendant que l’Agence européenne du médicament se prononce sur le lien entre la vaccination et des cas de thrombose. Celle-ci enquête sur trente cas recensés, au 10 mars, parmi cinq millions de personnes vaccinées.

Plusieurs pays en Europe et dans le monde ont décidé d’interrompre, lundi, l’injection du vaccin AstraZeneca, troisième à être autorisé par l’Agence européenne du médicament pour lutter contre l’épidémie de Covid-19. Quelques dizaines de minutes après l’Allemagne, Emmanuel Macron a annoncé la suspension du produit anglo-suédois, à titre préventif.

Soumya Swaminathan, directrice scientifique de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), vient pourtant de recommander lors d’une conférence de presse à Genève « que les pays continuent de vacciner avec AstraZeneca ».

Le président de la République veut attendre l’avis de l’Agence européenne de médicament, qui devrait se prononcer mardi sur ces cas de thrombose, des problèmes de coagulation pouvant entraîner la formation de caillots sanguins, causant des décès dans les cas les plus graves. Une réunion extraordinaire est déjà prévue, jeudi, pour apporter des informations supplémentaires.

Ces annonces contradictoires risquent d’ajouter du scepticisme et de ralentir une campagne de vaccination déjà compliquée par l’accès aux doses nécessaires pour immuniser l’ensemble de la population.

Dimanche 14 mars, Jean Castex appelait pourtant à « avoir confiance » dans ce vaccin et à se faire vacciner. « Je le dis de la façon la plus solennelle, sinon on aura des retards dans la vaccination, les Françaises et Français seront moins protégés et la crise sanitaire durera longtemps », a précisé le premier ministre, invité sur la chaîne Twitch du journaliste Samuel Étienne dimanche.

« Il n’y a pas lieu de suspendre la vaccination par AstraZeneca », estimait trois jours plus tôt, le 11 mars, le ministre de la santé Olivier Véran. Le même jour, l’Agence européenne du médicament se voulait elle aussi rassurante, car « les bénéfices du vaccin restent supérieurs à ses risques et il peut continuer à être administré pendant que les cas d’événements thromboemboliques font l’objet d’une enquête ».

Certains pays suspendent des lots, d’autres interrompent l’utilisation de ce vaccin
En moins d’une semaine, une dizaine de pays, européens pour la plupart, ont annoncé l’arrêt de l’injection du vaccin AstraZeneca. D’abord en Autriche, où après le décès d’une infirmière les autorités sanitaires ont décidé le 8 mars de suspendre le lot concerné. Idem en Italie où après le décès d’un enseignant, un premier lot puis tous ont été suspendus.

D’autres pays, comme le Danemark, la Norvège et l’Islande, ont quant à eux interrompu complètement l’injection de ce vaccin. Sur le continent africain, la République démocratique du Congo a décidé de reporter sa campagne de vaccination, qui devait démarrer le 15 mars. Même décision en Asie, pour la Thaïlande puis l’Indonésie, par principe de précaution.

AstraZeneca réaffirme la sécurité de son vaccin
Dans son communiqué de presse publié le dimanche 14 mars, le groupe pharmaceutique confirme son « examen minutieux de toutes les données de sécurité disponibles concernant plus de 17 millions de personnes vaccinées dans l’Union européenne (UE) et au Royaume-Uni ».

AstraZenaca assure qu’il n’y a « aucune preuve d’une augmentation du risque d’embolie pulmonaire, de thrombose veineuse profonde (TVP) ou de thrombocytopénie, dans aucun groupe d’âge, sexe, lot ou pays particulier ».

L’industriel mentionne quinze cas de TVP et vingt-eux cas d’embolies pulmonaires signalés parmi les personnes ayant reçu le vaccin. Pour l’entreprise AstraZeneca, « ces chiffres sont bien inférieurs à ceux que l’on s’attendrait à observer naturellement dans une population générale de cette taille et sont similaires à ceux des autres vaccins Covid-19 homologués ». Et l’entreprise d’ajouter, « lors des essais cliniques, si le nombre d’événements thromboemboliques était faible, ceux-ci étaient encore plus bas dans le groupe vacciné ».

De son côté, l’Agence européenne du médicament (AEM) a recensé au 10 mars trente cas de thrombose parmi cinq millions de personnes ayant reçu le vaccin AstraZeneca dans l’espace économique européen. L’agence poursuit son investigation, avec l’aide de « l’entreprise, des experts spécialisés sur des troubles sanguins, et les autorités sanitaires nationales, dont l’agence britannique Medicines and Healthcare products Regulatory Agency, forte de son expérience basée sur 11 millions de doses administrées ».

En attendant les résultats de son enquête, l’AEM maintient que « les avantages du vaccin AstraZeneca dans la prévention du Covid-19, avec son risque associé d’hospitalisation et de décès, l’emportent sur les risques d’effets secondaires ».

Pour l’heure, aucun cas de décès n’a été recensé en France, d’après l’Agence nationale de sécurité du médicament, qui recommande aux personnes vaccinées de consulter leur médecin généraliste en cas de symptômes signalant un effet indésirable.

Ces derniers ont la possibilité de vacciner avec l’AstraZeneca depuis le 25 février dernier seulement. Puis les commandes ont été suspendues en raison du petit nombre de doses livrés par le laboratoire anglo-suédois. La direction générale de la santé venait tout juste d’annoncer une campagne de commande d’un seul flacon de dix doses pour « au maximum 30 000 médecins ».