Le droit à la santé et à la vie

Médiapart - De l’hôpital à la rue

Septembre 2016, par Info santé sécu social

Par Alicia Deys Blog : L’Etre au Monde

12 sept. 2016

L’indifférence frappe tous azimuts, Rroms, SDF, mais aussi nombre de citoyens isolés sans visibilité. Chômage, salaires trop bas pour des loyers délirants, maladie, la machine à exclure conduit à la rue nombre de personnes sans filet de sécurité. La politique de gentrification des métropoles et la spéculation immobilière qui l’accompagne font des ravages. Silencieusement. Histoire de Laure.

Les personnes atteintes de maladie graves et chroniques sont soumises de plus en plus fréquemment à une sorte de double voire triple, quadruple peine. Atteintes dans leur intégrité physique et se battant sans relâche pour leur vie, elles basculent souvent dans la pauvreté, perdent à terme tout ce qui constituait leur vie sociale -qu’il s’agisse de leur travail, de leur réseau professionnel, amical et familial-. Quand ce n’est pas leur droit à l’accès aux soins. Refus de soins ou de prise en charge pour un nombre grandissant, non organisation du suivi lors du retour à domicile après une hospitalisation, dépenses croissantes résultant du déremboursement de nombreux matériels de soins (et ce n’est pas fini*), vivre avec une maladie grave coûte très cher contrairement au sens commun et aux déclarations des responsables politiques en charge de la santé. Certains perdent y compris leur toit et se retrouvent à la rue, le plus souvent en raison d’une expulsion ou confrontés à l’absence de solidarité familiale. C’est notamment le cas de Laure pour laquelle une pétition lancée par l’une de ses amies, circule sur le site change.org. Le cas de cette jeune femme est emblématique de l’aveuglement volontaire et largement partagé à l’endroit des personnes gravement malades. Beaucoup d’autres, morts dans l’indifférence générale -de l’entourage mais aussi des édiles sollicités pour les aider- ne sont plus là pour conter leur parcours du combattant, combien la vie devient parfois un métier à temps plein, pour dire l’abandon et le silence qui s’est abattu autour d’eux. C’est la raison pour laquelle je relaie l’appel lancé par Dominique Rondeau, signataire du texte ci-dessous.

"Elle a été opérée il y a maintenant cinq ans et demi d’une hernie discale. Rentrée au bloc opératoire sur ses deux jambes elle en est ressortie avec une monoplégie du membre inférieur. Sa vie a basculé, elle ne peut plus marcher ni se tenir debout.
Suite à des problèmes familiaux, elle s’est retrouvée à la rue, à Nantes, ville où elle logeait à cette époque. On lui a alors diagnostiqué un cancer, avec une espérance de vie de 6 mois. Heureusement, elle est toujours parmi nous.

Montée sur Paris il y a quatre ans, elle a été suivie pendant un an à l’hôpital militaire de Clamart pour une maladie de peau orpheline, sur laquelle les autorités médicales ont reconnu leur incapacité à la soigner.

Elle a été hospitalisée en clinique en décembre 2015, toujours sans domicile. L’assistante sociale de l’établissement a tenté pendant quatre mois et demi de lui trouver un logement social ou un hébergement d’urgence sans succès.
Elle a donc été rendue à la rue, toujours en fauteuil.

Elle a été ensuite illicitement hébergée dans un foyer d’urgence parisien dans des conditions de vie très difficiles, jusqu’à ce qu’elle subisse une mastectomie bilatérale (ablation des deux seins), suite à laquelle elle s’est de nouveau retrouvée sans domicile, l’établissement hospitalier devant "libérer des lits". Hébergée dans une arrière boutique de banlieue, avec une ordonnance de "Soins à domicile", sans domicile, avec des problèmes de surinfection et de nécrose. Durant son séjour hospitalier, l’assistante sociale n’a pu lui trouver de solution d’hébergement, bien qu’elle lui eut promis une place en centre de soins de suite ou en foyer hospitalier. Elle lui a donné rendez-vous dans deux mois et demi !

Elle est actuellement sous trithérapie, avec un système immunitaire inexistant, toujours à la rue et toujours en fauteuil.

J’adresse cette pétition à Madame la Maire de Paris afin que les services sociaux de la Ville trouvent une solution pour que l’enfer de Laure cesse enfin.

Je compte sur vous, et Laure aussi !

Dominique Rondeau

Pour soutenir Laure : https://www.change.org/p/de-l-hôpital-à-la-rue-trouvons-un-logement-pour-laure 3

*Début août, le Comité économique des produits de santé (CEPS), organisme interministériel placé sous l’autorité du ministère de la Santé, de la Sécurité sociale , des Finances et de l’Economie, a annoncé un nouveau plan d’économies de 200 millions d’euros portant sur ce qu’on appelle les dispositifs médicaux. Plus de 250 "produits" ou prestations de santé sont concernés notamment dans les domaines de l’autosurveillance glycémique, de l’autotraitement du diabète, de la nutrition entérale (absolument essentielle en cas de dénutrition consécutive à une maladie grave ou d’escarres ou de plaies chroniques), de l’apnée du sommeil, de l’orthopédie, liste non exhaustive.

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