Réforme retraites 2023

Libération - Réforme des retraites : la France à l’arrêt ou l’apocalypse selon Véran

Mars 2023, par Info santé sécu social

A six jours d’une nouvelle mobilisation que les syndicats espèrent massive, le porte-parole du gouvernement agite la menace d’une « catastrophe écologique, agricole, sanitaire voire humaine ». Une sortie grotesque qui témoigne de la fébrilité de l’exécutif.

par Frantz Durupt
publié le 1er mars 2023

Le 7 mars, début de la fin du monde ? A écouter Olivier Véran ce mercredi, peut-être bien. Lors de son traditionnel point presse à l’issue du Conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement s’est en effet mis à lister toutes les plaies qui s’abattront sur la France si d’aventure le pays doit être « mis à l’arrêt » mardi prochain à l’appel des syndicats opposés au projet de réforme des retraites du gouvernement. Autant vous prévenir tout de suite, grévistes en puissance suivant aveuglément les ordres des gourous Laurent Berger et Philippe Martinez, que les conséquences iront bien au-delà de ce que votre esprit simple – pour ne pas dire un peu naïf – aurait pu imaginer.

Pour bien se rendre compte de son caractère grotesque, il est sûrement préférable de regarder la séquence (sur la chaîne YouTube de l’Elysée par exemple). Mais tentons de la résumer en quelques phrases. On y voit Olivier Véran debout derrière un pupitre, sérieux comme un pape, qui commence par dire que « mettre la France à l’arrêt, ce serait alourdir une facture déjà salée » pour les ménages en période d’inflation. En quoi ? Le ministre ne le précise pas et enchaîne, se lançant dans une anaphore. « Mettre la France à l’arrêt », dit-il, ce serait aussi, dans le contexte de sécheresse que connaît le pays, « prendre le risque d’une catastrophe écologique, agricole, sanitaire voire humaine dans quelques mois ». Ce serait encore « négliger la santé de nos enfants », au moment où la vaccination contre le papillomavirus permettrait « d’éradiquer le cancer du col de l’utérus ». Ce serait, enfin, « rater le train du futur » alors que le gouvernement annonce un plan d’investissement de 100 milliards d’euros.

Le rapport de tout cela avec une mobilisation sociale contre le report de l’âge de départ en retraite ? On ne le connaîtra pas, hélas. Il faut croire sur parole le porte-parole, le remercier de n’avoir pas « fait une liste beaucoup plus longue » – il prétendra en effet, quelques minutes plus tard, qu’il en avait la possibilité – et sans doute faire montre d’un peu de mansuétude. Si Olivier Véran en est là, réduit à prononcer de telles énormités, c’est que cette journée du 7 mars et ses suites doivent sérieusement inquiéter l’exécutif. C’est d’ailleurs l’analyse qu’en fait Laurent Berger : « La sécheresse, c’est la faute des syndicats ? La crise sanitaire, idem ? Et pourquoi pas la défaite en Coupe du monde ? Vos tentatives pour décrédibiliser une mobilisation sans précédent contre les 64 ans sont grossières », a tweeté le secrétaire général de la CFDT.

« Le passage de la grève au blocage, avec toutes les contraintes que cela peut faire peser sur les Français, la facture que cela peut aussi entraîner, ne nous semble pas nécessaire », dira encore Olivier Véran pour étayer son propos, en ratant du même coup le fond de l’affaire : si « blocage » il y a, ce sera parce que « les Français » l’ont voulu, et que le gouvernement n’a rien fait pour l’empêcher.