Parti Socialiste

JIM (Journal International de Médecine) - Quand les médecins ont mal à leur gauche (ou pas)…

Février 2017, par Info santé sécu social

Si la victoire de Benoît Hamon à la primaire de la Belle Alliance Populaire, quand rien ne permettait de le prévoir il y a encore quelques semaine, n’a finalement presque pas été une surprise dans le climat bouleversé actuel et alors que les affaires qui touchent François Fillon monopolisent toute l’attention de la campagne électorale, certains cependant se sont penchés sur celui qui porte désormais les couleurs du parti socialiste. Un mélange de curiosité et de circonspection animent généralement ceux qui s’intéressent à l’ancien ministre de l’Education nationale. Des sentiments qui nourrissent également les rangs de la gauche.

Qu’ils partagent ou non les grandes lignes du programme de Benoît Hamon, un grand nombre d’observateurs s’enthousiasment pour ce renouveau, pour cette rupture avec les errances et les erreurs des éléphants du parti socialiste. Ainsi, le médecin et journaliste Jean-Yves Nau invite à se rappeler de l’action menée par Benoît Hamon en faveur de la reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle. Si à l’époque, Jean-Yves Nau postulait « qu’il s’agissait peut-être d’une manière d’exister médiatiquement dans un paysage de plus en plus mouvementé », il paraît aujourd’hui nuancer ce jugement. Il constate en effet qu’alors que le panorama politique de la gauche a été totalement éclaté (« François Rebsamen a disparu. (…), Marisol Touraine et Myriam El Khomri ne seront bientôt plus ministres, ni François Hollande président ») et qu’il n’a désormais plus besoin de telles causes pour exister, l’ancien ministre de l’Economie sociale et solidaire demeure fidèle à ses anciennes préoccupations. « Il reparle, régulièrement, du contenu de sa proposition de loi (…). C’est le seul de sa catégorie à s’intéresser à ce sujet d’avenir. C’est le seul, aussi, à parler de futur désirable et désiré » semble se féliciter Jean-Yves Nau.

Œil brillant et cheveu fou

Salué pour la teneur de son message, Benoît Hamon ne fait cependant pas l’unanimité, même chez ceux qui ont longtemps semblé aspirer à l’émergence d’une nouvelle gauche, coupée de Solférino. « Des années que les prétendants au trône se déchirent, se rabibochent. Des années que l’on nous présente, d’un côté des partisans d’une gauche d’ordre et de gouvernement, et de l’autre des frondeurs rebelles, le cheveu fou et l’œil brillant, prêts à toutes les aventures révolutionnaires » ironise le docteur Christian Lehmann dans un récent post publié sur son blog En attendant H1N1. « Et un vent d’espoir se lève chez certains. Face à Valls, l’énervé identitaire qui voit des musulmans partout, Hamon entonne le chant des Partisans, parle "social", parle "solidarité", parle "renouveau". Une "vraie gauche" à la "puissante imagination" appelle tous les militants à la Résistance » poursuit-il sur un ton proche. Mais pour Christian Lehmann, Benoît Hamon est loin d’être à la hauteur de ces espoirs.

Hamon et le scandale de la LDME

Christian Lehmann relève tout d’abord que les méthodes de Benoît Hamon en temps que président de la fédération du Parti Socialiste dans les Yvelines ne se dépareraient guère des traditionnels « petits arrangements entre amis » qui sont légions dans le parti de la rue de Solférino. Mais surtout, Christian Lehmann invite à s’intéresser à l’implication de Benoît Hamon dans un dossier qui lui est cher : celui de la mutuelle des étudiants. Pour lui, il s’agit d’un élément emblématique. « C’est à travers ce prisme de l’accès aux soins des étudiants que j’ai découvert l’intrication de tous ces gens qui, la main sur le coeur et Jaurès à la bouche, ont pendant des années vidé de son sens la notion de socialisme, jusqu’au bout de la trahison. Pendant des années, la MNEF, puis la LMDE, ont servi à payer des permanents, des petites mains, finançant à l’UNEF ceux qui plus tard grimperaient dans l’organigramme socialiste. La raison d’être de ces "mutuelles étudiantes", garantir aux étudiants un meilleur accès aux soins, a été dévoyée. Les scandales sont quotidiens : des milliers d’étudiants jamais remboursés de leurs soins, des milliers de professionnels de santé, pharmaciens, médecins, dentistes, chirurgiens, jamais payés. En Juillet 2014, après des années d’immobilisme coupable, un coup de tonnerre survient : la LMDE est placée sous administration provisoire. La nouvelle tombe un 4 Juillet, juste au moment où, comme chaque année, les nouveaux bacheliers, leur Bac en poche, commencent à s’inscrire dans les facultés et se font démarcher par les mutuelles étudiantes. Panique à la LMDE, et par ricochet à l’UNEF, au MJS, et jusqu’à Solferino. Si les étudiants délaissent par prudence la LMDE, la pompe à fric se tarit… » résume Christian Lehmann. Qu’allait donc faire le gouvernement socialiste face aux déboires de la LMDE épinglés par plusieurs enquêtes journalistiques mais aussi par la Cour des Comptes ? Le médecin blogueur constate que ceux qui n’ont jamais trouvé le temps nécessaire pour mettre fin aux franchises médicales en dépit de leurs promesses datant de l’époque où ils étaient dans l’opposition, n’ont eu besoin que de « trois jours » pour voler « au secours de la très transparente LMDE et réaffirmer leur attachement au régime étudiant de sécurité sociale ». Un communiqué qui oublie tout ton de reproche face aux dérives de la LMDE publié le 7 juillet confirmant l’action rapide du gouvernement sera signé par Michel Sapin, Marisol Touraine et Benoît Hamon. « Lequel est abondamment cité dans le documentaire « Mutuelles étudiantes, remboursez ! », lorsque des étudiants venus discuter du dossier avec le ministre de l’Education qu’il est alors se heurtent à un refus définitif de régler ce problème. Comme le notent ses interlocuteurs, le conseiller du ministre à l’époque n’est autre qu’un ancien Président de l’UNEF. Quelques années plus tard, la LMDE n’est plus qu’une coquille vide, adossée au régime général et à la Caisse Nationale d’Assurance-Maladie. Ses administrateurs, comme l’avait alors prévu un bon connaisseur du dossier, en sont réduits à choisir la couleur des préservatifs lors des manifestations autour de l’accès aux soins. Le dossier a été enterré, ainsi que les créances impayées. Depuis lors, comme par miracle, les soins des étudiants sont remboursés. Lorsqu’ils signent ce communiqué de presse commun le 7 Juillet 2014, garantissant le remboursement des soins qui "continuera à être assuré", alors que toute personne un tant soit peu au fait du dossier sait que cela est totalement faux, Hamon, Touraine et Sapin le font-ils par incompétence, ou par malhonnêteté ? Je vous en laisse juge » tempête Christian Lehmann. Il conclura ce billet en considérant que contrairement à ce que certains voudraient croire il est probable que Benoît Hamon ne soit pas le candidat « anti système » que beaucoup vantent.

Semaine après semaine, les médecins blogueurs révèlent une attention aussi soutenue que désabusée pour la campagne électorale et ses affres. Ici, face à la gauche, la violence des critiques se montre plus vive que les premiers enthousiasmes, comme le confirme la lecture in extenso des blogs de :
Jean-Yves Nau : https://jeanyvesnau.com/2017/01/30/connaissiez-vous-benoit-h-specialiste-du-burn-out-et-des-perturbateurs-endocriniens/
Et de Christian Lehmann : http://enattendanth5n1.20minutes-blogs.fr/archive/2017/01/25/benoit-hamon-last-apparatchik-standing-934280.html

Aurélie Haroche